Je suis partiellement d'accord vous. La centrale d'achat E. Leclerc ne fait que négocier l'achat, tandis que le groupe GBH négocie l'achat mais possède aussi l'industrie. Encore une fois, je ne comprends pas que la Dgccrf n'ait pas mené l'enquête à l'issue de mon rapport. Les industriels sont très attentifs aux mètres linéaires utilisés dans les grandes surfaces pour exposer leurs produits. Il existe une totale proportionnalité entre la profondeur de l'offre, l'exposition et le chiffre d'affaires. Si un industriel perd 50 centimètres d'exposition sur les rayonnages, son chiffre d'affaires peut s'écrouler de 20 %.
Le groupe Hayot possède Sorelait, l'usine de yaourts et de produits frais sous enseigne Danone. De son côté, le groupe agricole local Urcoopa possède la Compagnie laitière des Mascareignes (Cilam), qui produisent les yaourts Yoplait. Des usines de yaourts et de produits frais sont ainsi implantées localement dans la mesure où le yaourt ne s'exporte pas. J'ai embauché un étudiant réunionnais et lui ai demandé de mesurer l'exposition de l'assortiment des produits Danone par rapport à celui des produits Yoplait, sur les rayonnages des différents magasins de La Réunion.
Chez tous les distributeurs, le linéaire des produits frais accordés à Yoplait était de deux tiers contre un tiers pour Danone, à l'exception d'Hayot où la proportion était inverse. Cilam propose en effet un assortiment beaucoup plus riche que celui de Danone, quasiment du simple au double. Vous vous rendez compte du manque à gagner pour les producteurs, qui s'appuie sur 38 % à 40 % de part de marché. Cilam sait très bien ce qui lui arriverait s'il osait dénoncer cette situation. En tant que modeste consultant, j'ai pointé ce phénomène dans mon rapport et l'ai exposé aux yeux de tous. Mais rien n'a changé.
Telle est une traduction concrète de ce que j'appelle une atteinte à la concurrence ou un verrouillage de marché.