J'aborderai tout d'abord la première question de Mme Iborra concernant la relation entre la loi sur la fin de vie et les soins palliatifs. Dans quelques maisons médicales, notamment Jeanne Garnier, les rapporteurs ont constaté qu'en cas d'offre de soins palliatifs de qualité et en quantité suffisante, la demande de suicide assisté diminuait. Nous ne nous prononçons pas sur le suicide assisté. Je réaffirme ce qui a été indiqué aux rapporteurs : plus les soins palliatifs sont développés, sont de qualité et sont quantitativement suffisants pour répondre aux besoins, plus la demande de suicide assisté diminue, et dans une proportion de 80/20. Ainsi, pour cent personnes qui souffrent, qui sont en fin de vie et qui ne sont pas encore en soins palliatifs demandant un suicide assisté, en réalité, à partir du moment où elles sont correctement prises en charge en soins palliatifs, seules vingt demandent un suicide assisté. Nous ignorons dans quelle mesure ces chiffres sont généralisables à toute la France. Nous avons constaté ce phénomène dans quelques établissements et vous le livrons à votre réflexion éclairée. Je communique simplement ces chiffres et n'irai pas plus loin sur ce terrain.
La seconde partie de la question de Mme Iborra portait sur la gouvernance. Nous demandons et proposons dans le rapport que cette gouvernance soit confiée à la seule DGOS, qu'elle soit cheffe de file de l'ensemble des politiques de soins palliatifs menées en France, avec un plan structuré, des objectifs stratégiques quantifiés et des ARS elles-mêmes dotées de PRS intégrant la question des soins palliatifs. Il est vrai que la gouvernance tricéphale, voire quadricéphale, d'aujourd'hui n'est pas satisfaisante. Il nous paraît donc pertinent de confier cette gouvernance à la DGOS.
J'ai relevé un certain nombre de questions sur l'insuffisance de formation des médecins posées par M. Le Gac, M. Rousset et Mme Valentin. Nous avons interrogé les médecins ainsi que le conseil de l'Ordre. Le conseil national de l'Ordre des médecins n'a pas donné de réponse, si ce n'est qu'il a confirmé les besoins, sans toutefois communiquer de pistes particulières, d'où l'intérêt de valoriser et de développer les filières universitaires, en particulier avec la nomination de professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU-PH) eux-mêmes formés en soins palliatifs. Cette culture de soins palliatifs qui manque aujourd'hui passe également par cette voie. En créant ces filières, au-delà des différents mois de formation que nous pouvons souhaiter obligatoires pour l'ensemble des médecins, nous pensons qu'il faut raisonner filières et développement de ces filières avec une nomination de PU-PH spécifiquement formés. Par le fait, l'attractivité pourra être renforcée pour les soins palliatifs.
Ces éléments répondent également à la question précédemment posée par M. Valletoux et à laquelle je n'avais pas répondu. M. Isaac-Sibille et M. Valletoux posent en effet la question des soins palliatifs en pédiatrie. Le problème porte effectivement sur une insuffisance de moyens et l'actuelle incapacité à suffisamment développer des équipes de soins palliatifs pédiatriques à l'échelon régional. Nous constatons que les moyens sont insuffisants, notamment pour se déplacer jusqu'au domicile. Dans le prochain plan soins palliatifs, nous recommandons d'ailleurs de chiffrer le nombre de nouvelles équipes régionales nécessaires en soins palliatifs pédiatriques pour permettre la couverture de l'ensemble du territoire. Nous n'allons pas plus loin dans le rapport et il est vrai que nous n'avons pas développé spécifiquement cette question, mais nous invitons les pouvoirs publics à la prendre en compte dans le prochain plan soins palliatifs.
Une question de Mme Cristol portant sur l'éducation thérapeutique. L'éducation thérapeutique ne peut pas aujourd'hui être déployée en tant que telle auprès des aidants, dans la mesure où ce ne sont pas des patients et où les textes prévoient que l'éducation thérapeutique ne s'adresse qu'aux patients. Nous rencontrons aujourd'hui un problème d'encadrement par les textes. C'est la raison pour laquelle nous proposons de lever ce frein et de permettre aux aidants d'avoir accès à l'éducation thérapeutique. C'est là une de nos recommandations : formation et sensibilisation des proches aidants aux soins palliatifs et à l'accompagnement en soins palliatifs de leurs proches.
M. Rousset s'est interrogé sur la formation des médecins généralistes et sur les visites à domicile des médecins généralistes. Je rappelle que dans le rapport, dans la nomenclature des soins infirmiers, nous avons recommandé la création d'un acte spécifique soins palliatifs pour les soins palliatifs, notamment pour les libéraux en soins palliatifs à domicile.
Par ailleurs, je précise que la négociation conventionnelle des médecins a créé un acte spécifique soins palliatifs visites longues à domicile, ce qui ne suffit certes pas. Nous entendons les arguments de la difficulté pour les médecins généralistes à consacrer du temps d'une part aux visites à domicile, qui sont de plus en plus rares, et d'autre part aux visites à domicile en soins palliatifs, qui demandent effectivement du temps. C'est également la raison pour laquelle nous recommandons l'adoption d'un forfait non pas médical, mais d'un forfait d'accompagnement en soins palliatifs pour les autres professions que les professions médicales autour du patient à domicile, j'ai pu l'évoquer précédemment. La question des médecins et la disponibilité des médecins est un aspect, et une première réponse se dessine avec le dernier avenant à la convention. Les soins palliatifs sont aussi et avant tout de l'accompagnement et pas seulement du soin, d'où l'intérêt de la recommandation que nous formulons sur le forfait d'accompagnement soins palliatifs.
J'en viens à la question de M. Neuder sur les Ehpad. Nous faisons le même constat d'une insuffisance de prise en charge de soins palliatifs en Ehpad et c'est la raison pour laquelle nous recommandons de créer 200 équipes mobiles de soins palliatifs supplémentaires. Le chiffrage que j'ai donné tout à l'heure de presque 74 millions d'euros par an est bien relatif à ce point : 200 équipes mobiles supplémentaires ayant vocation à intervenir au domicile, mais aussi en Ehpad. C'est une première réponse.
Une deuxième réponse consiste en la formation des auxiliaires médicaux, notamment des aides-soignants, et en la sensibilisation et la formation de ces auxiliaires médicaux à la culture et aux soins palliatifs. À notre sens, il est nécessaire de mieux contrôler les conventions entre les ARS et les Ehpad. Ces conventions sont souvent un peu formelles et un peu vides. Nous avons eu l'occasion de le constater dans une grande enquête que nous avons menée il y a deux ans ou trois ans sur les Ehpad. Les conventions doivent être complétées, plus concrètes, beaucoup plus ancrées dans la réalité de ce que connaissent les Ehpad, et être contrôlées par les ARS.
Je viens d'évoquer la question du temps disponible des médecins. Par ailleurs, pour contrebalancer ou compléter l'intervention des médecins ou le manque d'intervention des médecins à domicile en soins palliatifs, il est nécessaire de développer les interventions des soins infirmiers. J'ai évoqué la recommandation que nous faisons de créer un acte infirmier spécifique soins palliatifs ; nous recommandons également de prendre en compte les soins palliatifs dans le financement des Ssiad. Ces deux recommandations s'adressent vraiment aux soins palliatifs à domicile et permettent de contourner un certain nombre de difficultés que nous avons pointées, comme vous-mêmes, sur les difficultés à mobiliser les médecins, notamment par manque de temps.
Dans le rapport, nous avons donné un exemple qui nous paraît intéressant : l'exemple de Pallidom, qui permet de développer l'HAD en fin de vie et qui mérite d'être attentivement suivi et d'être peut-être généralisé si cette expérimentation donnait des résultats. Je rappelle que même si l'HAD est insuffisante, même si nous appelons à développer des moyens supplémentaires, même si nous invitons à créer des actes dans les nomenclatures infirmiers et de soins infirmiers, ainsi que vous avez pu le rappeler d'ailleurs, la HAD a augmenté dans des proportions importantes, plus de 30 % depuis le dernier plan. Ce résultat reste certes très insuffisant, mais nous tenons à souligner l'augmentation importante de ces soins palliatifs en HAD.
Par ailleurs, je confirme que dans le rapport, nous appelons un nouveau plan pluriannuel 2023-2028 prenant en compte ce développement du domicile avec un certain nombre d'objectifs et un calendrier. S'agissant de surcroît de l'une des questions posées sur la cohérence des plans entre eux, nous appelons vigoureusement les pouvoirs publics d'une part à intégrer dans la stratégie nationale de santé les plans de soins palliatifs et la question des soins palliatifs, et d'autre part, nous appelons également vigoureusement à ce que le plan cancer et le plan soins palliatifs soient cohérents et fassent référence l'un à l'autre. Nous ne pouvons qu'être d'accord avec ce qui a été soulevé à ce propos, notamment par Mme Dubré-Chirat.
Mme Erodi nous demandait s'il était possible de nous inspirer des politiques menées en Autriche. Il faut effectivement nous inspirer de l'organisation autrichienne, avec des plans cohérents, assortis d'objectifs chiffrés, un calendrier, également déclinés à l'échelon régional de manière aussi rigoureuse, précise et chiffrée. C'est bien ce que nous mettons en avant. Nous inspirer des bonnes pratiques à l'étranger, et notamment de l'Autriche, est bien pertinent.
Mme Etienne a évoqué La Barque Silencieuse et le frein budgétaire rencontré. Il semble que ce projet relève aujourd'hui d'un statut d'unité de soins palliatifs. L'ARS a été rencontrée par l'équipe ; les échanges se poursuivent entre l'ARS et les porteurs du projet. Nous avons effectivement vu ce point mais je ne suis pas en mesure de vous en dire davantage.