Bien qu'il s'agisse d'une audition de la commission des finances, je souhaite vous interroger sur des sujets essentiels à mes yeux. Le premier concerne le traitement de l'information. Le mois de juin a été marqué par le naufrage d'une embarcation avec à son bord plusieurs centaines de personnes, qui tentaient de rallier l'Italie, et de l'autre côté un sous-marin, le « Titan » avec à son bord cinq personnes, qui aurait implosé à proximité du Titanic.
Le traitement de ces deux informations dans le journal de 20 heures de France 2 est, je le crois, éloquent : dix minutes consacrées au naufrage du bateau au large de la Grèce, lors de quatre journaux télévisés (JT). Or il s'agit ici de plusieurs centaines de morts potentiels et de la plus grande catastrophe survenue de ces dix dernières années en mer Méditerranée.
En revanche, plus de quatorze minutes, étalées sur quatre JT, ont été consacrées au naufrage d'un submersible, avec à son bord cinq personnes qui ont déboursé des sommes exorbitantes pour réaliser du tourisme sous-marin. Ne pensez-vous pas qu'il y a un problème dans le traitement accordé à ces deux évènements ?
Deuxièmement, l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) a rendu un rapport au Parlement l'année dernière dans lequel elle pointe du doigt « une représentation marginale du handicap » ; une représentation des personnes perçues comme non-blanches « plus importante dans les rôles à connotations négatives ».
La télévision renvoie également une image biaisée de la population, les catégories socioprofessionnelles supérieures (CSP+) sont très largement surreprésentées : 75 % parmi les personnes apparaissant à la télévision, alors qu'elles ne représentent que 28 % de la population. La situation est encore plus dégradée dans les programmes d'informations, où elles représentent neuf personnes sur dix. Moi qui suis moi-même employé, je dois avouer que je ne vois pas souvent à la télévision des gens qui me ressemblent. Cela me semble tout sauf anodin.
Ces éléments font écho à la manière dont sont traités les sujets : on préfère interroger des « pseudos-experts » plutôt que de donner la parole aux personnes concernées. Je pense ici aux débats récurrents sur le port du voile ou encore sur les jeunes de banlieue, comme on l'a encore vu très récemment à la suite de la mort de Nahel. Tout le monde peut donner son avis, sauf les personnes directement concernées. En tant que présidente de France Télévisions êtes-vous sensibles à ces sujets et quelles mesures entendez-vous prendre pour remédier à la situation ?