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Intervention de Sabrina Sebaihi

Réunion du mercredi 12 juillet 2023 à 11h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabrina Sebaihi, rapporteure :

Je vais rapidement présenter le contenu du COP, avant de revenir sur les points qui nous paraissent les plus problématiques. Le contrat d'objectifs et de performance 2023-2025 comporte quatre grands axes. Le premier concerne l'adaptation des stratégies de promotion de l'enseignement supérieur français, dans un contexte concurrentiel. La priorité est accordée à l'attractivité auprès des étudiants et chercheurs excellents et des publics provenant de trois zones stratégiques : l'Indopacifique, dans une volonté de diversification des flux et d'élargissement de notre influence, l'Afrique et l'Europe.

Le COP porte également une attention particulière sur l'Europe, avec un renforcement des synergies entre Campus France et l'Agence Erasmus+, agence nationale liée au programme européen de référence pour la jeunesse et responsable des mobilités sortantes. Enfin, il soutient la projection de nos établissements d'enseignement supérieur à l'étranger, notamment sous la forme des « campus franco-X », qui se sont développés dans le monde, le dernier en date étant le campus franco-indien, qui doit se consacrer aux enjeux liés à la santé.

Le deuxième axe du COP met l'accent sur l'enjeu majeur de l'accueil des étudiants étrangers, où nous connaissons nos plus importantes marges de progression. Les difficultés rencontrées commencent en pratique avant l'arrivée en France, avec des délais parfois très longs pour l'obtention d'un visa, qui peuvent se traduire par des arrivées en France en décalage vis-à-vis de la rentrée universitaire. Les consulats ne peuvent pas toujours faire face à l'afflux de dossiers. De leur côté, certaines universités répondent par ailleurs très tardivement. Un problème similaire est constaté pour le renouvellement des titres de séjour, dont les délais d'attente sont parfois tels que des étudiants se retrouvent en situation d'irrégularité.

Sur le territoire national, c'est le logement qui constitue le principal problème des étudiants étrangers, qui n'échappent pas en cela à une problématique nationale que nous peinons à régler. Pour rappel, selon les données de l'Observatoire de la vie étudiante, pour un nombre total de 2,9 millions d'inscriptions étudiantes dans l'enseignement supérieur en France métropolitaine et dans les outre-mer – Français et étrangers confondus –, la France dispose d'environ 380 000 logements dédiés aux étudiants (résidences CROUS, résidences d'habitation à loyer modéré ou résidences privées), dont seuls 12 % des étudiants peuvent bénéficier. Pour les étudiants internationaux, la quête d'un logement peut être particulièrement difficile lorsque tout doit être opéré à distance, sans maîtrise de l'environnement local. Enfin, de nombreux étudiants internationaux sont confrontés à une situation de précarité, à laquelle peut s'ajouter un isolement social et psychologique. Cela s'est particulièrement vérifié pendant le confinement.

En complément, le deuxième axe du COP porte également sur la visibilité et la lisibilité de notre offre d'enseignement supérieur, en identifiant des vecteurs de progression comme la mobilisation des anciens élèves, les alumni, qui doivent faire l'objet d'une stratégie dédiée qui sera présentée prochainement. La communication ciblée auprès des étudiantes constitue aussi un enjeu, notamment dans une zone comme l'Afrique subsaharienne, qui représente un contingent majeur d'étudiants étrangers en France mais dont seuls 43 % sont des étudiantes.

Le troisième axe porte sur un outil majeur d'attractivité et d'influence : les bourses, et notamment les bourses du gouvernement français, qui vont être rebaptisées « France Excellence » afin d'être plus lisibles à l'étranger. Les bourses, qui dépendent de l'attribution des postes diplomatiques ou de programmes centraux, sont aujourd'hui massivement utilisées par certains pays qui montent en puissance sur la scène universitaire internationale, tels que la Turquie ou l'Arabie saoudite, ainsi que par des pays comme l'Allemagne ou l'Australie qui sont également des partenaires.

La diminution du nombre de bourses attribuées par la France ces dernières années a été la conséquence de la stagnation des crédits disponibles, à laquelle la loi de finances initiale pour 2022 a mis un terme avec une enveloppe totale de 64 millions d'euros, en hausse de 6 millions d'euros par rapport à 2021, avec plus de 55 millions d'euros gérés par Campus France, somme reconduite dans la loi de finances pour 2023. À titre de comparaison, le programme britannique Turing consacre 72 millions d'euros annuels aux bourses et l'Allemagne 120 millions d'euros.

Enfin, le quatrième et dernier axe porte sur la gestion et l'exemplarité de l'opérateur et décline différents objectifs allant de la mise en place d'une comptabilité analytique à l'instauration d'une démarche de responsabilité sociétale, autour notamment de l'égalité entre les femmes et les hommes et du handicap, en passant par l'adoption d'un plan de développement durable prévu pour 2024. Cet axe porte également sur la consolidation et la modernisation des systèmes informatiques, l'opérateur ayant déjà initié, sous l'impulsion de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI), la mise en place d'une démarche cybersécurité. Cela nécessite des dépenses d'investissement importantes, sur lesquelles il serait dangereux de transiger.

En résumé, le COP de Campus France s'inscrit dans un contexte qui voit notre pays disposer d'atouts mais aussi de marges de progression importantes en matière d'attractivité universitaire. Parmi les atouts, il faut mentionner la qualité des formations, un bon positionnement dans les classements scientifiques internationaux, des relations historiques avec des pays pourvoyeurs d'étudiants en mobilité, ainsi que la francophonie, qui ne doit pas empêcher le développement des formations en anglais pour les personnels et les étudiants mais doit rester un atout majeur, que nous devons valoriser, notamment dans nos relations avec l'Afrique.

Concernant les marges de progression, qui portent en priorité sur l'accueil, nous avons identifié des pistes d'amélioration : ouverture des aides financières d'urgence aux étudiants étrangers, délivrance de titres de séjour pluriannuels indexés sur la durée prévue des études ou encore systématisation des guichets uniques et du mentorat. Cela dépasse le strict champ de ce COP et mériterait une réflexion approfondie de notre commission ainsi qu'un prolongement législatif, qui trouvera un terrain lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2024 à l'automne mais aussi lorsque nous serons saisis pour avis du projet de loi portant sur l'immigration, qui doit intégrer une réflexion sur les mobilités que nous souhaitons promouvoir et favoriser.

Enfin, l'élaboration d'une loi de programmation de l'influence, sur le modèle de la loi de programmation de l'aide publique au développement, pourrait accompagner la mise en œuvre de la feuille de route de l'influence présentée en décembre 2021 et donner une visibilité accrue au ministère de l'Europe et des affaires étrangères, ainsi qu'aux opérateurs que sont l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), l'Institut français et Campus France, notamment sur la gestion pluriannuelle des bourses pour ce dernier. Il s'agit d'une réflexion à laquelle notre commission doit être associée.

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