Le problème, c'est qu'il ne suffit pas de répéter inlassablement que les chômeurs sont volontairement responsables des emplois non pourvus.
Il suffit d'ouvrir n'importe quel rapport de votre ministère pour y lire, au contraire, que si les chômeurs restent au chômage, ce n'est pas parce que tel est leur bon plaisir ou parce qu'ils veulent profiter des indemnités – lesquelles sont, rappelons-le, bien inférieures au salaire qu'ils percevaient –, mais parce qu'il existe des freins essentiels, principaux facteurs du non-retour à l'emploi : la mobilité, la garde d'enfants et, surtout, la qualité de l'emploi, le manque d'attractivité de certains métiers et la faiblesse des rémunérations. Voilà, monsieur le ministre, la réalité de la situation du marché du travail, sur laquelle vous fermez les yeux.
Plutôt que de les ouvrir, vous préférez créer une nouvelle usine à gaz.
Après la réforme de 2019, qui a transformé de manière incompréhensible pour le commun des mortels les règles de l'assurance chômage en faisant 2 milliards d'économies sur le dos de plus de 1 million d'assurés qui y ont perdu, après l'usine à gaz du bonus-malus, qui ne concerne qu'un nombre réduit d'entreprises, vous inventez désormais l'usine à gaz de la contracyclicité – comprenne qui pourra, et gare à l'explosion !
Un droit complexe est un droit illisible ; il se traduira par du non-recours. C'est peut-être votre objectif, ce n'est pas le nôtre.
Vous l'aurez compris, notre opposition n'est pas une opposition de principe, mais bien une opposition de fond à la philosophie libérale et destructrice qui irrigue votre projet de réforme à défaut d'éclairer totalement le texte dont nous débattons, un texte qui vise à vous donner carte blanche en vous permettant de faire ce que bon vous semblera par décret. Mais à quel prix ?
Ironie de l'histoire, c'est aujourd'hui même qu'a été communiqué au Parlement, qui l'attendait depuis 2018, le rapport sur le non-recours à l'assurance chômage, lequel montre qu'un peu plus d'un tiers seulement des demandeurs d'emploi sont indemnisés… Ainsi, 400 000 à 700 000 personnes ne recourent pas à l'allocation à laquelle elles ont le droit ! Voilà le véritable fléau, et pourtant vous n'en parlez pas.