L'éducation à la vie affective et sexuelle, jusqu'ici, relève de simples fiches pédagogiques ; or les programmes, au sein de l'éducation nationale, sont fondamentaux et autrement substantiels. Ils ont, en quelque sorte, une force exécutoire. J'ai donc saisi le Conseil supérieur des programmes pour qu'il en élabore et qu'ils soient discutés à la fin de l'année, après quoi il serait intéressant d'échanger avec des éditeurs en vue de la publication de manuels correspondant aux différents niveaux scolaires. Nous devons avancer le plus rapidement possible, notamment avec les associations, que nous sollicitons et qui peuvent être également auditionnées par le Conseil supérieur des programmes.
La société est prête, en effet, et nous pouvons aller tranquillement de l'avant en prenant en compte les trois dimensions principales de l'éducation à la sexualité : la dimension classique – aspect biologique, questions de santé publique et de prévention des maladies sexuellement transmissibles ainsi que des grossesses précoces, notamment en Outre-mer et dans le nord de l'Hexagone –, la dimension sociale – prévention des différentes formes de violences sexistes et sexuelles, place des identités sexuées et de genre dans la société – et la dimension émotionnelle et psychologique.
Ces programmes visent à couvrir un ensemble de questions d'une manière adaptée à chaque âge. Croyez en ma détermination pour avancer résolument ! Je suis persuadé que nous aurons l'assentiment des élèves et de leurs familles. La question de l'éducation à la sexualité revient toujours lors de mes déplacements dans les lycées, y compris dans les lycées français à l'étranger. Généralement, c'est une lycéenne qui la pose, approuvée ensuite par l'ensemble de ses camarades. La demande est donc très forte.
En 2022, en terminale, la part des filles dans la spécialité mathématiques s'élevait à 40,6 %, à 46,9 % en physique-chimie et à 62,3 % en sciences de la vie et de la terre (SVT) – où elles sont donc très majoritaires.
Pour ce qui concerne en revanche les deux spécialités les plus problématiques, à savoir sciences de l'ingénieur (SI) et numérique et sciences informatiques (NSI), nous sommes vraiment très éloignés de la parité : elles comptent respectivement 13,6 % et 14,6 % de filles. C'est la raison pour laquelle nous avons fixé des objectifs cibles dans ces spécialités. L'idée n'est pas d'atteindre 50 % dès l'année prochaine, mais, dans chacun des établissements où elles sont proposées, de réussir à convaincre une ou deux filles de les choisir, car il suffit de changements minimes pour faire grimper la proportion à l'échelle de l'ensemble du pays : 17 000 élèves sont inscrits en NSI et 6 900 en SI, contre 150 000 en maths, 114 000 en physique-chimie et 92 000 en SVT – qui sont les trois spécialités rassemblant la plus grande partie des élèves scientifiques.
La proportion de 40,6 % n'est pas satisfaisante, mais elle représente un point de départ autorisant à penser qu'il est possible d'atteindre 50 %, d'autant que le chiffre était un peu plus bas en 2021. En classe de première, les élèves suivent trois spécialités, puis seulement deux en terminale. Or on constate que les jeunes filles laissent tomber plus volontiers, à ce stade, les mathématiques que les SVT. L'un de nos objectifs doit donc être de faire en sorte qu'elles poursuivent dans cette voie, et même qu'elles choisissent la spécialité mathématiques expertes, qui suppose de faire trois heures de mathématiques en plus des six heures de la spécialité mathématiques en terminale.
Je suis bien conscient de la situation dans les spécialités scientifiques. Contrairement à ce qui a été dit, il n'y a pas d'effondrement de la part des filles dans la spécialité mathématiques. Les nouvelles spécialités NSI et SI contribuent à faire diminuer leur part dans l'ensemble des spécialités scientifiques, mais elles représentent 40,6 % des effectifs en mathématiques. Certes, c'est insuffisant, et une érosion du nombre d'étudiantes dans cette spécialité est observée depuis 2015, mais le même phénomène touche les garçons : c'est la spécialité en elle-même qui est concernée.
En ce qui concerne la place des femmes dans les manuels, il serait absurde de prétendre que tout est parfait, mais des progrès ont été enregistrés. C'est particulièrement vrai dans les manuels d'histoire et de géographie par rapport à ceux d'il y a vingt ans. Je suis tout à fait ouvert à l'idée de sensibiliser les professeurs et les équipes choisissant les manuels. Il convient d'inclure des critères concernant le genre et l'équilibre dans la représentation entre les hommes et les femmes. Le label Égalité filles-garçons peut nous y aider.
Les femmes sont majoritaires dans l'éducation nationale : elles représentent aux alentours de 70 % des effectifs. Dans le premier degré, leur part atteint même 84 %. Dans le même temps, on compte seulement 79 % de femmes directrices d'école. Les choses se dégradent dans le second cycle, et même de plus en plus au fur et à mesure que l'on « monte » dans la hiérarchie : elles représentent 65 % des certifiés, 55 % des agrégés et seulement 38 % des professeurs de chaire supérieure.
Le constat vaut également pour les postes d'encadrement supérieur. Toutefois, là encore, les progrès sont très nets : les femmes occupent 40,2 % de ces postes, contre moins de 25 % il y a une vingtaine d'années. Autrement dit nous sommes allés au-delà des prescriptions de la loi Sauvadet, qui impose une proportion de 40 % de femmes dans les emplois supérieurs et de direction. L'égalité a été atteinte en ce qui concerne les recteurs et les rectrices. Toutefois, pour l'ensemble des postes d'encadrement, nous devons nous fixer pour objectif de parvenir à l'égalité, voire de la dépasser, dans la mesure où les femmes constituent la plus grande partie des enseignants.
Une part de l'augmentation des rémunérations concernera tous les enseignants et toutes les enseignantes, jusqu'au septième échelon, sans conditions, à compter du 1er septembre. Elle sera comprise entre 7,8 % et 11,2 % net. Cette hausse sera la plus importante intervenue dans l'éducation nationale depuis 1991. Lionel Jospin était alors ministre de l'éducation nationale.
Une autre part sera liée à l'accomplissement de nouvelles missions. Certaines d'entre elles, d'ailleurs, correspondent à des tâches dont les enseignants s'acquittaient déjà, mais pour lesquelles ils étaient moins bien rémunérés, voire ne l'étaient pas du tout. Ainsi, dans le premier degré, chaque heure supplémentaire est payée 26 euros ; nous proposons de porter ce montant à 69 euros pour les missions incluses dans le pacte. À Marseille, j'ai eu l'occasion d'échanger avec des enseignantes qui accomplissaient depuis plusieurs années certaines tâches de manière bénévole ; à partir du 1er septembre, elles seront rémunérées pour ce travail.
Les enseignants sont également en train de souscrire à des missions vraiment nouvelles. Le mouvement se poursuivra à la rentrée : les néotitulaires et les enseignants ayant bénéficié d'une mutation pourront adhérer à une ou plusieurs missions. Nous ferons un point d'étape le 7 juillet, et les données définitives ne seront disponibles qu'à partir de la mi-septembre, mais nous sommes d'ores et déjà très satisfaits du nombre de réponses positives des enseignants, en dépit de la position des syndicats – parmi les personnes souscrivant à de nouvelles missions, on trouve d'ailleurs des syndicalistes. Cela tend à montrer que ces nouvelles missions ne sont pas aussi injustes que d'aucuns le pensent. Nous devrons néanmoins nous assurer, durant l'année à venir, qui sera marquée par l'entrée en vigueur du dispositif, que ces missions n'entraînent pas un accroissement des inégalités entre les femmes et les hommes. À ce stade, il serait prématuré de tirer quelque conclusion que ce soit en la matière.
La transformation des cours de récréation est un enjeu très important. Si le ministère n'est pas directement responsable du bâti scolaire, il s'est doté d'une cellule dédiée lui permettant de soutenir activement les collectivités. Notre politique consiste à végétaliser ces espaces, opération qui facilite l'absorption de l'eau par la terre et évite la formation de puits de chaleur, lesquels se multiplient, notamment au mois de juin – ce qui perturbe aussi bien la continuité pédagogique que le déroulement des examens –, et s'accentueront à l'avenir. Enfin, la végétalisation permet de diversifier les occupations et les jeux des élèves, favorisant ainsi l'égalité filles-garçons. Les terrains de football, par exemple, souvent dominants dans ces espaces, se trouvent réduits à portion congrue. Nous sommes donc très favorables à la végétalisation et encourageons cette évolution.
Les toilettes des établissements scolaires sont souvent dans un état de dégradation inacceptable, et même problématique sur le plan sanitaire. Même si la question ne relève pas non plus directement du ministère de l'éducation nationale, nous y sommes très sensibles et poussons dans le sens de la rénovation. Il y a là, par ailleurs, un enjeu en matière d'égalité filles-garçons.
Une étude portant sur les toilettes des aires d'autoroute a livré des résultats très intéressants. Dans ces lieux, où il y a autant d'espaces pour les femmes que pour les hommes, il s'avère que les femmes doivent attendre beaucoup plus longtemps. Mettre à la disposition des femmes et des hommes des toilettes en nombre égal, c'est en réalité une injustice flagrante : les femmes devraient en avoir beaucoup plus. À titre personnel, je suis choqué chaque fois que je vois des femmes attendre, certaines ayant même leurs enfants avec elles. De telles situations sont inacceptables. C'est un motif de rébellion qui justifierait de convoquer les sociétés d'autoroutes ! Or il en va de même dans les écoles : il faut y prévoir plus de toilettes pour les filles que pour les garçons.
Selon un bilan réalisé en avril, un tiers des établissements scolaires a installé des distributeurs de protections gratuites. Cela n'est pas suffisant, même si, par ailleurs, les infirmeries scolaires en proposent également. Nous souhaitons accroître le nombre de ces distributeurs, en liaison avec les collectivités.
La prolongation de la Ciivise a été réclamée par ses responsables eux-mêmes. Je laisserai à ma collègue Charlotte Caubel le soin de vous répondre sur ce point. Pour notre part, nous formons le personnel, notamment ceux des services de vie scolaire et des infirmeries, à la détection des violences intrafamiliales, en partenariat avec la Ciivise, car les établissements scolaires sont au premier rang dans ce domaine. Les Inspe dispensent désormais dix-huit heures de formation à la détection de ces violences durant les deux années qu'y passent les candidats aux concours d'enseignement aux niveaux M1 et M2. Nous avons aussi publié un vade-mecum relatif aux violences sexuelles intrafamiliales, destiné à l'ensemble du personnel de l'éducation nationale. Enfin, nous faisons la promotion du 119, le numéro de téléphone dédié à la prévention et à la protection de l'enfance en danger.
Le problème des postes éloignés du département dont on est originaire se pose surtout dans le second degré, où les enseignants sont soumis à un mouvement national. Être nommé à 500 kilomètres de chez soi représente une difficulté, je le reconnais volontiers. Les enseignants originaires des outre-mer sont même appelés à exercer à 5 000 kilomètres de chez eux : compte tenu de la baisse des effectifs scolaires locaux – en particulier à la Guadeloupe, à la Martinique et à La Réunion – et des besoins existant par ailleurs, ils restent très rarement dans l'académie dont ils sont issus. S'il existait, au sein de l'éducation nationale, une adéquation parfaite entre les demandes et les besoins, ce serait formidable. Ce n'est pas par cruauté que nous affectons des professeurs loin de chez eux. Lorsque l'on est breton et que l'on passe un concours national, on a assez peu de chances, dans de nombreuses disciplines, de rester chez soi : on est plutôt affecté en région parisienne, en particulier dans l'académie de Créteil ou dans celle de Versailles, les deux plus grosses, où les besoins sont importants.
Le phénomène est moindre dans le premier degré, car le mouvement y est limité à l'échelle de l'académie, mais il est vrai que certaines académies sont étendues et que l'on peut donc être nommé loin de chez soi. Cela conduit même certains professeurs des écoles à perdre le bénéfice de leur concours.
Les problèmes liés aux mutations sont amplifiés par le développement des secondes carrières : il est des professeurs qui débutent dans le métier après avoir atteint la quarantaine. Or, à cet âge-là, on est encore moins mobile que quand on a 25 ans : on possède déjà un logement et on a fondé une famille. Certains démissionnent et d'autres préfèrent rester contractuels pour ne pas être mutés loin de chez eux.
Si nous nommions en Bretagne tous les néotitulaires issus de cette académie, les professeurs qui exercent dans l'académie de Créteil et attendent de retourner en Bretagne depuis de nombreuses années protesteraient. Les néotitulaires n'ont pas la priorité par rapport à des collègues qui ont accumulé les points nécessaires. Les enseignants originaires d'outre-mer se voient quand même attribuer 1 000 points supplémentaires grâce à la notion de centre des intérêts matériels et moraux (CIMM), dont nous avons renforcé le poids. Il n'en reste pas moins que c'est dans les régions qui attirent le moins les enseignants que les besoins sont les plus criants. Or la priorité est de mettre un professeur devant tous les élèves.
Malheureusement, il n'y a pas de solution magique. Nous essayons quand même, chaque année, au cas par cas, de remédier aux situations les plus critiques, notamment du point de vue familial.
Nous attendons avec beaucoup d'intérêt, madame Carel, le rapport de la mission d'information chargée de dresser un panorama et un bilan de l'éducation prioritaire, dont la remise est prévue le 11 juillet.
Je suis toujours frappé par la capacité qu'a le Rassemblement national, quel que soit le sujet, à revenir à ses obsessions souvent nauséabondes, xénophobes, et en tout état de cause très éloignées des droits des femmes. Il suffit d'ailleurs de consulter son programme pour être édifié quant à la manière dont cette formation politique se représente les droits des femmes.
Nous ne faisons pas la promotion de l'homosexualité, pas davantage que d'une autre forme de sexualité. De ce point de vue, nous observons une neutralité principielle et axiologique. En revanche, il est essentiel de lutter contre toute forme de discrimination que des élèves pourraient subir – et subissent, malheureusement – en raison de leur orientation sexuelle réelle ou supposée.
Lutter contre l'homophobie et la LGBTphobie suppose d'abord de promouvoir une école accueillante à l'égard de toutes les formes de sexualité, qu'il ne nous revient pas de juger, de qualifier ou de hiérarchiser. D'où notre engagement en faveur de la journée du 17 mai et la fiche que nous avons publiée. Il faut, ensuite, développer l'éducation à la sexualité : la connaissance des différentes formes de sexualité – sans qu'il soit question de les promouvoir – est aussi un moyen de favoriser la tolérance. Il faut, enfin, s'opposer à toute forme de discrimination. Pour cela, nous nous appuierons sur les programmes et sur le travail d'associations agréées.