La création d'un tribunal des activités économiques (TAE) est l'une des mesures proposées par les États généraux de la justice. On ne peut pas dire que le fonctionnement des tribunaux de commerce et celui des tribunaux judiciaires, qui traitent certaines affaires d'ordre commercial, satisfassent pleinement les parties et les observateurs. Certes, on ne peut pas dire non plus que le système dysfonctionne complètement, mais il est clair qu'il n'emporte pas toutes les garanties que l'on est en droit d'attendre d'une justice satisfaisant aux standards d'une grande démocratie.
Néanmoins, votre proposition suscite plus de questions qu'elle n'en résout. Vous nous direz sans doute qu'il ne s'agit que d'une expérimentation, mais justement : les expérimentations concernant des tribunaux sont toujours délicates, car elles conduisent à juxtaposer deux régimes juridiques différents, ce qui fait que l'on n'est pas jugé de la même façon selon le lieu où l'on habite. Cela peut avoir des conséquences. C'est le cas pour les agriculteurs, qui seront concernés au premier chef par la réforme, car ce sont eux qui subissent la modification juridique la plus importante. Le fait qu'ils puissent être jugés par des commerçants pose question : si les uns sont les clients des autres, cela crée un tout autre type de relations que lorsqu'on est jugé par ses pairs. Il y a des risques de conflits d'intérêts.
Nous ne sommes pas opposés au fait que des pairs élus siègent, comme c'est le cas aux prud'hommes et dans les tribunaux de commerce. Peut-être pourrait-on avancer vers l'échevinage, mais pas avec des juges professionnels siégeant comme assesseurs aux côtés des juges élus : l'inverse serait plus intéressant.