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Intervention de Laurent Bach

Réunion du mercredi 21 juin 2023 à 11h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Laurent Bach, professeur associé de finances à l'Essec Business School, responsable du programme « Entreprise » à l'Institut des politiques publiques (IPP) :

Ce travail universitaire a effectivement été réalisé à quatre, mais nous avons conscience que cette question intéresse la représentation nationale. Dans son article 13, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen indique que « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. » La question de la répartition du paiement des impôts en raison des facultés des citoyens est ainsi fondamentale pour le législateur, depuis plusieurs siècles.

Cependant, cet article ne résout pas cette question de manière précise. En particulier, il n'indique pas quel est le niveau de progressivité idéal dans la société, ni comment le mesurer. Or la mesure de la progressivité effective du système fiscal constitue bien un enjeu des débats récurrents de l'équité devant l'impôt. Ces interrogations sur la contribution des grandes fortunes au financement public existent aussi à l'étranger, notamment aux États-Unis.

Notre étude est un projet de recherche pour éclairer les débats : l'IPP ne défend pas de parti pris normatif sur le bon niveau de progressivité du système fiscal. L'objectif de l'IPP est ainsi d'apporter une mesure précise et fiable de la progressivité, d'identifier les mécanismes sous-jacents permettant d'expliquer pourquoi le taux d'imposition augmente avant de baisser à partir d'un certain seuil et d'aider les législateurs et les citoyens à choisir les pistes de réforme qui permettent d'atteindre au mieux les objectifs normatifs qu'ils se sont fixés.

Le projet de recherche a été particulièrement long. Il a débuté dans le cadre d'une commande du comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital en 2019, dont l'objectif était de mesurer l'impact des réformes votées en 2017 sur le tissu productif français. En matière de données, un apport essentiel consistait à pouvoir relier les niveaux d'imposition personnels, notamment des actionnaires, aux entreprises qu'ils contrôlent.

Il a donc fallu construire un appariement entre les données d'impositions personnelles des ménages et les feuilles d'impôts des entreprises qu'ils contrôlent pour pouvoir répondre à cette question. En 2021, un premier rapport a été réalisé pour le comité d'évaluation des réformes de la fiscalité du capital pour mesurer l'impact de la suppression de l'ISF sur l'investissement des entreprises.

La deuxième phase a débuté par la rédaction d'un article scientifique. En juin 2022 ont eu lieu les premières présentations scientifiques des travaux liminaires sur la progressivité fiscale dans des cadres très restreints. Désormais, les travaux sont les résultats de plus amples discussions et extensions, menant à une communication publique à partir du mois de juin 2023.

Les données à partir desquelles nous avons travaillé sont exceptionnelles, car traditionnellement, il n'y a pas de lien automatique établi entre les actionnaires des entreprises qui déposent des déclarations d'impôt sur les bénéfices des sociétés (IS) et les ménages qui déposent des déclarations personnelles d'impôt sur le revenu (IR). Nous nous sommes concentrés sur les actionnaires de référence, que nous avons reliés aux feuilles d'impôts personnelles.

Cet appariement s'est déroulé selon une procédure très cadrée, qui respecte la protection des données personnelles au plus haut point. À aucun moment, nous n'avons vu la moindre feuille d'impôts nominative. Peu de pays au monde disposent de telles données : la France rejoint ici la Norvège et la Suède, les deux seuls pays ayant également effectué cet exercice. Nous avons commencé nos travaux à une période où les données les plus récentes dataient de 2016 et nous n'avons pas pu les étendre au-delà de cette date pour le moment, compte tenu de la charge que représente le traitement juridique et technique des données.

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