Monsieur le rapporteur, ma réponse vos questions pourrait être courte : non. Nous finalisons actuellement ce plan, dont la Première ministre elle-même annoncera les contours très rapidement. Je préférerais lui laisser la primeur de ces annonces, avec mon collègue Olivier Becht, mais je vais répondre à un certain nombre de vos préoccupations qui, pour certaines d'entre elles, rejoignent les nôtres.
Le déficit commercial de la France est trop important, en dépit de quelques améliorations début 2023 liées notamment à la baisse des prix de l'énergie. Je tiens à préciser que l'essentiel du déficit de la France est intracommunautaire, à raison de 150 milliards d'euros sur 164 milliards d'euros. Il met en exergue un défi de compétitivité ainsi que le fonctionnement même du commerce extérieur intraeuropéen. Du fait de la circulation des matières premières et des biens intermédiaires au sein de l'Union européenne dans un système industriel extrêmement intégré, les déficits intra-Union européenne ne reflètent pas toujours des exportations et des importations au sens habituel du terme. Pour autant, vous avez raison, c'est un défi majeur. La meilleure façon de régler les enjeux de déficit commercial consiste à réindustrialiser. Plutôt que de fermer les frontières et de protéger, nous devons être forts sur nos bases pour mieux conquérir le monde. Les exportations ont redémarré ces dernières années dans un certain nombre de secteurs. Les excédents historiques dans l'aéronautique, l'agroalimentaire ou l'agriculture se sont améliorés, liés à la hausse des cours mondiaux du prix du blé. Les points forts historiques le restent, mais les points faibles historiques, malheureusement, tendent à s'aggraver, par exemple dans l'automobile, le textile ou la métallurgie. Les grands producteurs automobiles se sont engagés à assembler plus d'un million de véhicules électriques d'ici 2030, lors du dernier Mondial de l'automobile. Nous visons désormais deux millions. Je vous rappelle que dans le cadre du projet de loi industrie verte, nous avons décidé de réserver le bonus automobile aux véhicules produits en Europe. C'est une avancée exceptionnelle, voire révolutionnaire, qui fera en sorte de rendre de la compétitivité à nos véhicules fabriqués en Europe face à d'autres zones où les subventions sont bien plus importantes.
J'ai entendu, monsieur le rapporteur, que vous jugiez utile la chute continue des impôts de production. J'espère que vous voterez le budget 2024 qui vise à parfaire et conclure la suppression de la CVAE. Nous avons beaucoup amélioré la compétitivité de la France ces dernières années par l'ensemble des mesures que vous connaissez : réforme du marché du travail, baisse des impôts de production, amélioration du fonctionnement des allégements de charges, etc. Je pense que la France est plus compétitive qu'elle ne l'a été, mais nous devons parfaire le sujet. Je pense que la suppression définitive de la CVAE y contribuera.
Vous avez mentionné les ressources propres de Business France comme un éventuel handicap. Je suis tout à fait favorable, au contraire, à ce que les opérateurs publics puissent bénéficier de subventions, votées ici, mais qu'ils puissent aussi tarifer un certain nombre de services auprès des entreprises. C'est le cas de Business France ou des chambres de commerce et d'industrie, ce qui explique en grande partie la baisse de la taxe affectée que vous avez mentionnée dans votre introduction.
Le défi majeur est celui de la coordination. Depuis la mise en place d'une Team France Export en 2018, nous avons un véritable guichet unique à l'export, qui met en collaboration les conseillers internationaux des chambres de commerce, les chargés d'affaires de Business France qui sont positionnés chez Bpifrance et peuvent travailler en étroite collaboration avec ces équipes dans l'accompagnement des PME et des ETI à l'export. Tout ceci se fait en lien avec les régions. L'efficacité du plan de relance à l'export, en 2020 et 2021, s'est traduite par la mise en place de 19 300 chèques relance export, de 1 905 chèques relance VIE, d'un abondement exceptionnel au fonds d'études et d'aide au secteur privé, de l'assurance prospection, de l'assurance prospection accompagnement et des dispositifs de réassurance publique Cap Francexport.
En ce qui concerne le recours aux divers dispositifs d'accompagnement, de financement et de garanties publiques à l'export, Bpifrance est impliqué dans la garantie de projets stratégiques, des crédits export octroyés par Bpifrance SA sur son propre bilan, en sollicitant l'assurance-crédit de l'État, le prêt croissance internationale, qui s'est traduit en 2022 par 788 millions d'euros de prêts contexte internationalisation qui ont été engagés et les garanties de projet international, avec 186 dossiers qui ont été traités en 2022, pour un montant de 38 millions d'euros. Nous aurons l'occasion de discuter à l'occasion du PLF d'un soutien budgétaire éventuel supplémentaire. Je considère que nous avons déjà beaucoup de dispositifs de soutien efficaces et que la coordination s'améliore.
Vous avez également évoqué les stratégies de filières. Je suis impliqué, en tant que ministre de l'industrie, dans la quasi-totalité des comités stratégiques de filières, souvent en collaboration avec certains de mes collègues. Les filières qui sont les plus efficaces à l'international, comme l'aéronautique, sont souvent celles qui s'organisent en filières dans lesquelles les grands donneurs d'ordre sont proches de leur tissu de sous-traitants et prêts à travailler avec eux pour développer des stratégies cohérentes à l'international. Certains de nos partenaires, mais aussi concurrents et amis comme l'Italie, le font très bien, par exemple dans l'agroalimentaire. L'aéronautique, le textile et la mode, dans le cadre de leurs contrats stratégiques de filière, intègrent des enjeux de décarbonation, mais aussi des enjeux stratégiques à l'export. L'ensemble des objectifs des contrats de filières qui sont renouvelés ou en cours de renouvellement pour les années 2023-2027 auront une dimension internationale afin d'intégrer ce véritable défi de la conquête du monde qui s'impose à toutes les filières industrielles de France.