Intervention de Eva Sas

Séance en hémicycle du mercredi 28 juin 2023 à 21h30
Partage de la valeur au sein de l'entreprise — Après l'article 9

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEva Sas :

Nous abordons un sujet essentiel pour des salariés qui se voient privés de participation parce que leur employeur pratique l'optimisation fiscale. Ce problème n'a pas vraiment été abordé dans le cadre de l'ANI, mais en tant que parlementaires il nous revient de le soulever, car on ne peut parler de juste partage de la valeur si l'on n'évoque pas les conséquences de l'optimisation fiscale sur la participation des salariés.

Cet amendement vise à abroger l'article L. 3326-1 du code du travail, lequel dispose que « le montant du bénéfice net et celui des capitaux propres de l'entreprise », donc le résultat à partir duquel est calculée la participation des salariés, « sont établis par une attestation de l'inspecteur des impôts ou du commissaire aux comptes » et qu'« ils ne peuvent être remis en cause à l'occasion des litiges nés de l'application du présent titre ».

Cet article n'a qu'un seul effet : empêcher les salariés de faire valoir leur droit à participation lorsqu'ils estiment que le résultat est artificiellement minoré, par exemple lorsqu'il est transféré dans une holding au moyen de prix de transfert ou de management fees, les frais de gestion. Des procédures en faveur des salariés, engagées contre McDonald's, Procter & Gamble ou Wolters Kluwer, n'ont pu aboutir à cause de cet article – dans le cas de Wolters Kluwer ou de Xerox, les salariés ont gagné en première instance et en appel, mais perdu en cassation.

Vous me direz que lorsqu'une décision de redressement fiscal est prise, on recalcule la participation. Le problème, c'est que, s'agissant des deux derniers exemples que je viens de citer, aucun contrôle fiscal n'a été effectué. Ce n'est donc pas l'action de l'administration fiscale qui aura un effet sur le montant de la participation.

Il y a pire. Après que les salariés de McDonald's ont poursuivi leur employeur pour fraude fiscale, un contrôle fiscal a bien été effectué, donnant lieu à un redressement et à une amende record – elle s'élève à 1,25 milliard d'euros – mais les salariés, eux, n'ont rien touché, d'une part parce que seule la holding a subi un redressement et d'autre part parce que le préjudice des salariés n'a pas été reconnu par la convention judiciaire d'intérêt public (CJIP) qui a été signée.

On ne peut faire dépendre de l'administration fiscale le droit des salariés à obtenir une juste participation. Il faut leur laisser la possibilité de mener des actions en justice pour obtenir réparation. Or cet article inique, injuste et obsolète les en empêche et protège les employeurs malhonnêtes.

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