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Intervention de Éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du mercredi 5 juillet 2023 à 21h30
Orientation et programmation du ministère de la justice 2023-2027 — Après l'article 3

Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

En tout cas, le rétablissement du secret professionnel de la défense, je ne dirai pas que c'est moi : c'est nous. Je pense aussi à l'ouverture de l'enquête au contradictoire. Comme je l'ai dit hier, nous avons mis un pied dans la porte et si ce n'est pas encore totalement satisfaisant, nous progressons. Bien que n'étant pas insensible à l'éventualité de la présence de l'avocat lors de la perquisition, j'estime que nous ne sommes pas encore mûrs.

En effet, plusieurs questions se posent : une telle disposition doit-elle s'appliquer à toutes les infractions, aux crimes de droit commun comme à la criminalité organisée et au terrorisme ? Comment assurer la présence de l'avocat lorsque trois perquisitions sont diligentées simultanément ? Ce sera une source de contentieux, puisque l'avocat présent à l'une d'entre elles pourra se plaindre de ne pas avoir pu assister aux deux autres. Comment garantir la sécurité de l'avocat ? La présence d'une personne supplémentaire ne risque-t-elle pas d'entraîner une pollution de la scène de crime ? Il faut manifestement encore travailler sur ce sujet.

Vous le savez, nous avons déjà eu un long débat sur cette question soulevée par des amendements au projet de loi « confiance ». Votre assemblée avait introduit en première lecture un nouvel article dans le code de procédure pénale afin de permettre la présence de l'avocat lors des perquisitions, et j'aimerais vous rappeler les trois raisons pour lesquelles la commission des lois du Sénat a jugé préférable de supprimer cette disposition. Les rapporteurs ont considéré que « le droit actuel offrait déjà des garanties » : lorsqu'il y a audition au cours de la perquisition, ont-ils relevé, la personne a la possibilité d'être assistée de son avocat à peine de nullité du procès-verbal. Ils ont en outre estimé que cette disposition constituerait pour les enquêteurs « une complexification nouvelle de la procédure pénale, particulièrement dans le domaine économique et financier ». C'est tout à fait juste. Faut-il rappeler que l'un des objets du présent texte est la simplification ? Enfin, les sénateurs ont indiqué qu'une telle évolution « accentuerait l'inégalité du citoyen dans le cadre de la défense pénale ». C'est un argument auquel je ne suis pas insensible.

Je ne suis pas hostile par principe à une telle disposition – il ferait beau voir que je m'oppose à toute présence de l'avocat dans la procédure et je suis évidemment très sensible aux droits de la défense, sujet sur lequel il reste des choses à faire – mais j'estime qu'elle est prématurée et qu'elle présenterait, si elle devait être adoptée aujourd'hui, plus d'inconvénients que d'avantages. Aujourd'hui, en l'état, ma position rejoint plutôt celle de la commission des lois du Sénat : je suis défavorable à l'ensemble des amendements.

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