Nous discutons aujourd'hui d'un texte qui ne devrait pas exister. Comment expliquer qu'en 2023 les femmes soient à peine un tiers à occuper des postes à responsabilité dans la fonction publique ? Comment accepter qu'elles restent payées 12 % de moins que les hommes ? Dans la magistrature, sujet qui nous occupe en ce moment avec l'examen du projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, le plafond de verre est bien en place et limite l'accès des femmes aux fonctions hiérarchiques les plus élevées, au siège comme au parquet.
Dix ans après la loi Sauvadet, beaucoup reste à faire. Dès lors, ce texte s'impose. Monsieur le rapporteur, je veux saluer votre engagement pour cette cause ; cette proposition de loi vous doit beaucoup. Nous savons que les collectivités rencontrent des difficultés pour recruter, dans un contexte particulièrement compliqué. Il est certain que nous devons travailler pour rendre la fonction publique territoriale, et plus généralement la fonction publique, plus attractive car, de fait, la parité et l'attractivité relèvent du même combat. Toutefois, les femmes ne peuvent servir de variable d'ajustement.
Il y a dix ans, la loi du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral en inquiétait plus d'un, mais aujourd'hui, nous ne pouvons que nous féliciter du renforcement de la place des femmes en politique. Je tiens à saluer les parlementaires, femmes, qui ont contribué à ce texte : Martine Filleul, Annick Billon, Dominique Vérien, Marie-Noëlle Battistel et Fatiha Keloua Hachi, qui a défendu les amendements du groupe Socialistes en séance. Je tiens aussi à remercier Guillaume Gouffier Valente pour le travail constructif que nous avons mené ensemble.
Cette proposition de loi apporte des solutions. Alors que la droite sénatoriale avait revu à la baisse les ambitions du texte, son passage à l'Assemblée nationale a permis de renforcer les dispositions, en partie grâce aux amendements de notre groupe.
Nous nous réjouissons que le taux des primo-nominations soit relevé à 50 % dès 2026 et que les administrations aient l'obligation, à partir de 2027, de respecter un taux minimal de 40 % de personnes d'un même sexe dans les emplois de direction. Nous saluons aussi l'élargissement du périmètre des emplois concernés à d'autres fonctions, comme celles de chef de service et de chef de pôle dans les hôpitaux.
Parce que nous nous devons d'être exemplaires, mon groupe a contribué à l'extension de l'objectif de parité aux assemblées parlementaires. Pour les mêmes raisons, et c'est une bonne chose, le taux minimal de nomination s'appliquera désormais aux cabinets ministériels ainsi qu'au cabinet du Président de la République.
Enfin, grâce aux amendements du groupe Socialistes, l'index de l'égalité professionnelle, qui sera instauré dans la fonction publique sur le modèle de celui qui existe pour le secteur privé, fera l'objet d'une publication sur le site internet des administrations et d'un débat au sein des assemblées délibérantes.
Nous ne pouvons que regretter que le Sénat ait eu le dernier mot en commission mixte paritaire sur deux points qui nous étaient chers. Alors que nous avions adopté en commission des amendements, dont un du rapporteur, visant à abaisser à 20 000 habitants le seuil de population des collectivités concernées, celui-ci a été relevé à 40 000 habitants. Par ailleurs, la publication des salaires les plus hauts, des salaires les plus bas et du salaire moyen, avec une répartition par sexe, adoptée à l'initiative du groupe Socialistes, a été abandonnée. Nous le regrettons car nous voulons que les femmes ne se retrouvent plus systématiquement en bas de l'échelle ; cette publication aurait permis de renforcer la transparence sur les écarts de rémunération et aurait démontré de manière magistrale la situation que vivent les femmes dans un certain nombre de secteurs.
Nous avions formulé des propositions pour les secrétaires de mairies, ces petites mains de nos territoires, dont les rémunérations sont trop souvent faibles et les perspectives d'évolution de carrière limitées. Malheureusement, on nous a opposé que ce n'était pas l'objet de ce texte.
Malgré ces regrets, nous voterons en faveur de ce texte, avec enthousiasme. Il est temps d'opter pour une approche paritaire dans tous les domaines que nous abordons. La parité, parce qu'elle introduit la diversité, aide à une décision mieux équilibrée. Je suis persuadée qu'elle constituera une réponse efficace, parmi d'autres, au déficit d'attractivité de la fonction publique. C'est le chemin que nous devons tracer ensemble.