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Intervention de Andy Kerbrat

Réunion du mercredi 14 juin 2023 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndy Kerbrat :

Il y a une semaine, les sénateurs ont intégré dans le projet de loi organique relatif à l'ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire un amendement visant à limiter la liberté syndicale des magistrats. Cet article ajoute en effet une condition à l'ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature et le droit syndical serait de ce fait désormais garanti en ces termes : « Le droit syndical et garanti aux magistrats […] dans le respect du principe d'impartialité qui s'impose aux membres du corps judiciaire. »

On reconnaît dans cet amendement la rengaine habituelle de la droite, qui passe plus de temps devant le parquet national financier (PNF) que sur la tombe du général de Gaulle. Il fut un temps où le leader censé sauver la droite demandait : « Qui imagine […] le général de Gaulle mis en examen ? » Désormais, ils le sont tous ; et pour y échapper ils s'attaquent en bande organisée à Anticor, au Syndicat de la magistrature (SM) et à l'Union syndicale des magistrats (USM).

Cet amendement est purement et simplement liberticide. La liberté syndicale des magistrats est essentielle, comme le rappellent plusieurs arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) condamnant des États autoritaires – telles la Pologne, la Hongrie ou la Turquie – et comme le soulignent aussi le Conseil consultatif des juges européens et le Conseil supérieur de la magistrature (CSM).

L'obligation de réserve ne saurait servir à réduire les magistrats au silence. Elle n'affaiblit en rien leur obligation d'impartialité, à laquelle ils sont tous profondément attachés car elle garantit l'indépendance, la dignité et la loyauté. Cet amendement vise donc, non pas à conforter le principe constitutionnel d'impartialité dont vous êtes le garant, monsieur le ministre, mais à museler les syndicats et associations de magistrats.

Vous avez indiqué avoir sollicité l'avis du CSM pour pouvoir juger d'un amendement adopté par le Sénat – et dont vous aviez demandé le retrait. Je rappelle que, dans sa décision du 15 septembre 2022, le CSM a estimé que « L'obligation de réserve ne saurait servir à réduire un magistrat au silence et au conformisme. » Il a aussi rappelé que la liberté syndicale est reconnue aux magistrats et que les prises de position d'une organisation syndicale ne sauraient servir de fondement à la mise en cause de l'impartialité d'un magistrat au seul motif qu'il serait membre de cette organisation.

Monsieur le ministre, ma question est simple : allez-vous revenir à la raison et respecter l'avis du CSM et l'État de droit ? Ou bien tenterez-vous de museler les magistrats en réprimant leur liberté syndicale ?

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