Nous examinons un texte important, rendu nécessaire par une décision prise par le Conseil constitutionnel dans son rôle de garant de l'État de droit et de défenseur des libertés fondamentales susceptibles d'être mises à mal, notamment par les fouilles menées par les douanes. Il concerne 18 000 agents – un chiffre dont M. Léaument a certes relativisé l'importance en le comparant aux effectifs d'autres pays européens –, qui travaillent pour une administration au rôle considérable, puisqu'elle est compétente en matière de lutte contre les trafics illicites, le blanchiment d'argent, le terrorisme, et qu'elle contrôle le respect des réglementations sanitaires et phytosanitaires. Elle concourt à notre sécurité en protégeant le territoire national. Elle assure non seulement un contrôle des flux commerciaux, mais également des missions fiscales en collectant des taxes pour l'Union européenne, l'État et les collectivités territoriales. Preuve de l'importance de l'administration des douanes, la DNRED fait partie du premier cercle des services de renseignement assurant la défense des intérêts fondamentaux de la nation.
Bien que ce texte comporte un certain nombre de points positifs, nous veillerons à ce qu'il n'accorde pas à la douane un trop grand pouvoir discrétionnaire, avec le risque juridique de décisions arbitraires – c'est d'ailleurs ce qui a justifié la censure, par le Conseil constitutionnel, de l'article 60 du code des douanes.
M. Léaument l'a dit tout à l'heure : texte après texte – je pense notamment à la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi) et à la loi relative aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 –, nous adoptons toute une série de dispositions qui mériteraient d'être davantage encadrées et sécurisées juridiquement. Cette remarque s'applique aussi au présent projet de loi. Lorsque les avocats ont été autorisés à assister les personnes placées en garde à vue, de nombreux policiers ont craint que cette nouvelle disposition vienne entraver leur travail ; or cette présence est aujourd'hui considérée comme un contre-pouvoir utile, qui permet aux forces de police de mieux exercer leur travail au quotidien. Je pense qu'il en sera de même pour les douanes si la loi comporte des garanties permettant d'éviter d'éventuels excès de pouvoir.
On observe un rapprochement entre la qualité d'agent des douanes et celle d'officier de police judiciaire. La criminalité se transforme, se joue des frontières, se saisit des outils numériques et menace jusqu'à des autorités politiques. En tant qu'élu lillois, je suis sensible aux menaces d'enlèvement adressées par les narcotrafiquants au ministre de la justice belge et à sa famille, alors que ce dernier avait annoncé un coup de pied dans la fourmilière. Nous veillerons à l'équilibre entre les différents agents de police judiciaire, celle-ci étant déjà affaiblie par la départementalisation.
Nous reviendrons sur tous ces éléments dans les amendements que nous défendrons. Il ne s'agit évidemment pas de nier l'ampleur de la menace à laquelle font face les services de douane – en tant qu'élu de Lille, territoire frontalier, je suis bien placé pour évaluer l'incroyable puissance financière des narcotrafiquants –, mais de sécuriser davantage et de mieux encadrer leurs pouvoirs, dont nous craignons qu'ils puissent devenir discrétionnaires.