Mais cette opposition du groupe Rassemblement national me permet de réaffirmer les raisons qui guident notre action : d'abord, bien sûr, il s'agit d'un enjeu d'égalité et de lutte contre les discriminations ; il s'agit ensuite d'un enjeu d'exemplarité de la puissance publique car on ne saurait justifier que l'on en demande plus au secteur privé qu'au secteur public ; enfin, et j'insiste sur ce point, c'est un enjeu de qualité de la décision publique, qui a tout à gagner à plus de mixité.
Mes chers collègues, ce travail d'approfondissement, nous allons aujourd'hui le poursuivre avec les objectifs suivants. Premièrement, nous devons maintenir les ambitions fixées en commission, ambitions qui ne sont remises en question par aucun groupe, à l'exception, donc, du groupe Rassemblement national par le biais des amendements qu'il a déposés. Nous devons ensuite continuer l'élargissement du périmètre des employeurs concernés par ces dispositions mais aussi accélérer la mise en place de dispositifs comme l'index de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans le secteur public. Enfin, nous devons garantir l'ambition et l'opérabilité des dispositions grâce auxquelles nous pourrons accélérer rapidement l'accès des femmes aux responsabilités dans la fonction publique.
Avant de conclure mon propos, je dirai quelques mots des actions que nous devons continuer de mener pour garantir l'égalité professionnelle dans la fonction publique et qui ne relèvent pas du périmètre de cette loi ni même du domaine de la loi en général.
Je commencerai par la lutte contre les VSS et l'accompagnement et la protection des victimes : depuis l'accord du 30 novembre 2018 relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique et la loi de transformation de la fonction publique du 6 août 2019, la mise en place par les employeurs publics de dispositifs de signalement et de suivi des violences sexistes et sexuelles, de harcèlement moral et de discrimination a été rendu obligatoire. Le bilan réalisé pour l'année 2021 dans la fonction publique de l'État montre que 755 saisines ont été enregistrées. Dans le secteur hospitalier, le baromètre Donner des elles à la santé révélait, le 11 mai dernier, que 82 % des femmes médecins hospitaliers s'étaient déjà senties discriminées au cours de leur carrière du fait de leur sexe et que 78 % d'entre elles avaient déjà été victimes de comportements sexistes – des chiffres glaçants, mes chers collègues.
Parmi les femmes managers de santé, en 2021, 63 % indiquaient avoir déjà fait l'objet de remarques gênantes sur leur tenue ou leur physique, et 64 % de blagues ou propos à connotation sexiste ou sexuelle. Dans la fonction publique territoriale, enfin, 281 cas d'agissements sexistes contre des femmes ont été recensés en 2019 et 273 cas de harcèlement sexuel. La mobilisation de toutes et de tous doit se poursuivre et s'amplifier pour éradiquer ce fléau dans toute notre société, y compris bien entendu dans le milieu professionnel au sein de la fonction publique.
J'en viens à la situation des secrétaires de mairie. Cet emploi est occupé en quasi-totalité par des femmes. Les secrétaires de mairie assurent des missions diverses et constituent les véritables chevilles ouvrières de la vie communale. Alors qu'un tiers de ces agents pourrait partir à la retraite d'ici à 2030, ce métier connaît d'importantes difficultés de recrutement. Deux propositions de loi sont actuellement discutées par le Sénat dont l'une, si je ne me trompe, monsieur le ministre, vient d'être adoptée à l'unanimité. Nous avons hâte d'en examiner les dispositions, toutes de bon sens.
Je terminerai par le management et les modalités de recrutement. Cet aspect a été évoqué par de très nombreuses personnes auditionnées. Dans la fonction publique territoriale, par exemple, les modalités de recrutement, notamment la rédaction des fiches de poste, doivent faire l'objet de la plus grande attention. Dans la fonction publique hospitalière, l'existence trop souvent constatée d'un esprit « carabin » a été portée à mon attention, esprit contre lequel il convient de lutter de façon volontariste pour assurer à la fois l'accès mais aussi le maintien des femmes aux emplois supérieurs. Je tiens par ailleurs ici à saluer l'importance de la structuration des réseaux féminins de la fonction publique et à les remercier d'avoir partagé avec nous, lors des auditions, leurs réflexions, les fruits de leurs travaux. Je maintiens l'idée que ces réseaux doivent en outre pouvoir se porter candidats aux projets soutenus par le fonds pour l'égalité professionnelle.
J'ajouterai l'importance de l'égal accès des femmes aux formations initiales et à la formation continue pour lutter contre les déséquilibres au sein de certaines filières, importance que vous avez été nombreux à souligner en commission.
Chers collègues, je connais votre mobilisation en faveur de l'égalité professionnelle. Il était important pour moi de partager avec vous ces éléments de réflexion. Je suis certain que le texte qui nous réunit recueillera l'assentiment du plus grand nombre. Les dispositions qu'il contient sont indispensables mais elles ne seront pas suffisantes. Nous devons d'autant plus les défendre dans le contexte de la montée, à travers le monde, des discours empreints de la philosophie du backlash, c'est-à-dire des discours promouvant la stagnation, voire le recul des droits des femmes.
Aussi, à tous ceux et à toutes celles qui nous font part leurs inquiétudes sur le fait que nous irions trop vite en matière d'égalité, que tout cela serait compliqué, voire infaisable, je ne répondrai qu'une seule chose : que notre détermination à agir pour le droit des femmes et l'égalité entre les femmes et les hommes est plus que jamais intacte, que cette action demeure indispensable et urgente. Et la fonction publique se doit d'être exemplaire et motrice des changements que nous impulsons au sein de la société. C'est ce à quoi contribue la présente proposition de loi. C'est pourquoi je tiens de nouveau à remercier les autrices de ce texte pour leur travail et à vous remercier vous, mes chers collègues, pour votre écoute.