Je tiens tout d'abord à saluer la qualité du travail d'évaluation que vous avez mené sur ce thème important, madame le rapporteur spécial. Il a constitué un temps fort de l'agenda européen pour notre pays. Dans mes fonctions précédentes en tant que ministre délégué en charge du commerce extérieur et de l'attractivité, j'ai pu constater à quel point cet agenda était dense et les résultats obtenus étaient à la hauteur de nos espérances.
La France a eu l'honneur d'assurer la présidence du Conseil de l'Union européenne au premier semestre de l'année 2022, dans le cadre du mécanisme de présidence tournante entre les États membres. Compte tenu de la complexité et de la sensibilité d'un tel événement, il était nécessaire d'avoir une organisation spécifique en termes de pilotage et de gestion budgétaire. Il a ainsi été décidé de reproduire l'expérience concluante de la PFUE de 2008, en confiant cette responsabilité à un secrétariat général spécifique, le SGPFUE, placé sous l'autorité du Premier ministre compte tenu de la nature interministérielle de l'événement.
Créé par un décret du 8 septembre 2020, le SGPFUE avait pour principales missions de coordonner la programmation des événements, d'évaluer leur coût, de fixer les grands principes de leur organisation et de suivre leur mise en œuvre par les différents ministères. Cette structure resserrée a compté au plus fort de son activité une quarantaine d'agents mis à disposition par les différents ministères. Je salue l'implication et le travail considérable du SGPFE ainsi que de l'ensemble des services et personnels mobilisés dans les ministères tout au long de la préparation et du déroulement de la PFUE.
Concernant votre remarque sur la création tardive du SGPFUE, je tiens à rappeler qu'il a été créé le 8 septembre 2020, soit un peu moins de 16 mois avant le début de la présidence française. Cela représente toutefois une amélioration par rapport à la présidence de 2008, où le secrétariat général avait été créé seulement douze mois avant le début de la présidence. Je prends toutefois note de votre observation et constate que le secrétaire général, M. Lapeyre de Cabanes, partageait cet avis dans son rapport de fin de mission. Il suggérait ainsi d'anticiper davantage la création du secrétariat général lors des futures présidences.
À la décharge du Gouvernement, je rappelle que la première réunion interministérielle sur la préparation de la PFUE date de novembre 2019 avec. En raison de la crise sanitaire, la préparation a connu un ralentissement au printemps 2020 et l'installation du SGPFUE a été reportée à la rentrée de la même année. Quant à l'annonce tardive des priorités politiques, je rappelle qu'il s'agit d'une pratique courante afin de ne pas empiéter sur les priorités de la présidence tournante précédente. Nous avons respecté cette tradition en présentant notre programme le 9 décembre 2021.
En ce qui concerne les moyens budgétaires, un programme budgétaire dédié a été créé au sein de la mission Direction de l'action du Gouvernement pour donner plus de transparence et de prévisibilité au Parlement concernant les autorisations budgétaires accordées en 2021 et 2022, tout en limitant les cofinancements par d'autres programmes. L'exécution budgétaire a fait l'objet d'une gestion déléguée aux ministères au niveau des unités opérationnelles. Le Parlement a accordé des moyens significatifs, mais proportionnés aux enjeux, pour assurer le succès de la PFUE, avec un budget de 150 millions d'euros voté en loi de finances. À titre de comparaison, 180 millions d'euros avaient été prévus lors de la présidence française de 2008. Il est intéressant de noter que le montant voté en 2022 est proche de celui retenu par d'autres pays européens de taille comparable lors de leurs présidences respectives, comme l'Allemagne en 2020 ou l'Espagne en 2023. L'exécution finale du budget s'est élevée à 105 millions d'euros, soit près d'un tiers de moins que le montant initialement prévu, en raison de différents facteurs : la tenue à Bruxelles de certaines manifestations prévues en France ; l'organisation en visioconférence d'événements en raison de la situation sanitaire ou de la crise en Ukraine ; la non-utilisation de la réserve pour aléas et enfin une gestion budgétaire rigoureuse des événements.
Si le constat du montant de l'exécution budgétaire est partagé entre nous, madame la rapporteure spéciale, nous n'en avons pas la même appréciation. Je considère qu'il faut au contraire se féliciter que la PFUE ait eu un coût moindre que prévu, tout en atteignant ses objectifs pour la bonne gestion des deniers publics. Quant à la réserve supplémentaire de 10 %, il s'agissait d'une précaution que j'estime bienvenue pour couvrir d'éventuels aléas ou répondre à un possible changement de Président de la République à l'issue des élections, puisque les élections présidentielles françaises ont eu lieu au cours de cette PFUE.
S'agissant des dépenses de communication que vous avez souhaité examiner plus spécifiquement, celles-ci s'élèvent à 3,5 millions d'euros. Parmi les principales opérations, on peut citer l'illumination de la tour Eiffel en début et fin de PFUE, des prestations audiovisuelles pour certains événements, ainsi que des prestations d'accompagnement pour la gestion du site internet de la PFUE.
Il est exact que le recours au mécénat était moindre en 2022 qu'en 2008. Je rappelle toutefois que les règles ont changé entre-temps, avec l'adoption, en 2021, par le secrétariat général du Conseil de l'Union européenne, de lignes directrices appelant à la vigilance des États membres en la matière, après le recours très important au mécénat par la Roumanie en 2019. Par ailleurs, il me semble que les Parlementaires, de même que nos concitoyens, sont désormais très attentifs à toute prestation gracieuse de la part d'acteurs privés au bénéfice des pouvoirs publics.
Concernant les dépenses que vous avez mentionnées comme somptuaires, c'est-à-dire les commandes d'objets promotionnels, celles-ci ont été centralisées par le SGPFUE pour tous les ministères. Sept bons de commande ont été passés pour un montant total de 998 069 euros, contre 4,9 millions d'euros pour la PFUE en 2008. Quant au programme « Étoffe de l'Europe », il s'agit d'une tradition pour chaque présidence tournante : 1 million d'euros ont ainsi été mobilisés en 2022, soit 25 % de moins qu'en 2008.
En ce qui concerne les prestations de conseil, celles-ci ont représenté un coût de 1,9 million d'euros, correspondant, comme vous l'avez rappelé, pour l'essentiel aux prestations du cabinet Roland Berger pour l'organisation du volet français de la Conférence sur l'avenir de l'Europe.
Vous vous êtes également interrogée, madame le rapporteur, sur la labellisation au titre de la PFUE de ces événements qui se sont tenus à l'automne 2021. La conférence était en réalité intimement liée à la PFUE, puisque les consultations menées ont alimenté le programme de la présidence française.
D'autres réunions préparatoires qui se sont tenues fin 2021 ont également été labellisées PFUE. De plus, il était prévu dès le départ que la clôture de la conférence se tienne pendant la présidence française et soit coprésidée avec la Commission et le Parlement européen. Cette cérémonie a également été labellisée PFUE. Un financement par la présidence tournante était donc, selon nous, pleinement justifié.
Au total, la PFUE a permis l'organisation de 416 événements officiels, dont 15 en présence du Président de la République, 30 réunions ministérielles informelles et 80 conférences ministérielles. J'ai moi-même organisé une réunion ministérielle à Marseille concernant le commerce.
Ces événements ont été organisés dans 48 villes réparties sur l'ensemble du territoire national, dans un souci d'équilibre et de valorisation des territoires. De plus, 511 événements organisés par des tiers ont été labellisés PFUE à l'initiative de collectivités territoriales, d'établissements d'enseignement supérieur, d'associations et d'entreprises. Il faut saluer leur implication et souligner qu'ils ont contribué à associer la société civile à la réussite de la PFUE.
Concernant le dispositif de mesure de la performance prévu en loi de finances, la satisfaction globale des participants, mesurée par une enquête d'opinion, était de 4,2 sur 5. Quant au coût moyen par participant, il s'est élevé à 1 900 euros, sous la cible de 2 000 euros.
Madame la rapporteure spéciale, vous avez proposé d'enrichir le dispositif de performance sur l'impact politique de la PFUE. Je rappelle que le dispositif de performance prévu pour la PFUE 2022 est le plus détaillé qui ait été mis en place jusqu'à présent pour un événement de cette nature. Votre suggestion d'aller encore plus loin pour la prochaine présidence est très intéressante, et en tant que ministre chargé des relations avec le Parlement, je suis favorable à ce que les parlementaires se saisissent de la révision organique de 2021, qui permet aux parlementaires d'amender les indicateurs d'un programme.
Le Gouvernement a également souhaité exercer une présidence durable de l'Union européenne en limitant son bilan carbone et en compensant les émissions résiduelles, qui ont totalisé 41 000 tonnes équivalent CO2.
En conclusion, la PFUE de 2022 a été menée à un coût particulièrement maîtrisé, tout en assurant une organisation de qualité pour les participants et en permettant à la France d'assumer pleinement cette responsabilité importante.
Je souhaite enfin répondre à la question de M. Jolivet sur l'impact des élections présidentielles et législatives. Le calendrier de la présidence tournante de l'Union européenne est fixé plusieurs années à l'avance pour donner de la prévisibilité à l'ensemble des États membres et des institutions européennes. Les États membres travaillent en étroite collaboration par groupe de trois pour assurer successivement la présidence de l'Union.
Il est déjà arrivé par le passé que la période de la PFUE coïncide avec des élections nationales, comme ce fut le cas en 1995. Le calendrier des événements organisés dans le cadre de la PFUE a strictement respecté la période de réserve, qui s'étend du 18 mars au 24 avril 2022 pour les élections présidentielles et du 23 mai au 19 juin 2022 pour les élections législatives. Une réserve de précaution de 10 % des crédits avait été mise en place, notamment pour couvrir l'éventualité d'un changement de Président de la République. Je dois souligner que le calendrier n'a pas entravé le bon déroulement de la PFUE, car les services et les réunions à Bruxelles ont continué pendant la campagne présidentielle et législative.
Comme vous l'avez constaté, le calendrier n'a pas empêché l'implication du Parlement européen qui, sous la présidence de tel ou tel pays, joue un rôle considérable, notamment pour faire avancer les trilogues.