Une section du rapport leur est consacrée. Il est impossible que les Macron Leaks aient donné lieu à une utilisation électorale car la campagne était terminée. J'ai vérifié, il y a eu un tweet du Front national sur les Macron Leaks, émanant de M. Philippot. Il me semble difficile de parler, dans ces conditions, d'une utilisation massive de l'ingérence russe dans les élections de 2017.
Comme l'a dit Mme Loiseau, il n'y a pas de raison que l'ingérence s'arrête à nos frontières. Toutefois, on peut avoir des systèmes de protection plus performants que les autres. Le rôle de l'argent en politique n'est pas du tout le même en France, au Royaume-Uni, aux États-Unis ou même en Allemagne, où les grandes entreprises peuvent financer la politique. Une très grande confusion règne. Vous lancez des accusations sur les ingérences russes en France et en Europe sans jamais caractériser les faits. Vous décrivez des phénomènes généraux qui se déroulent aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Estonie et en Italie, mais, pour la France, vous ne mettez au jour pratiquement aucun phénomène d'ingérence politique ou médiatique. En revanche, le problème se pose avec plus d'acuité en Afrique.
Par ailleurs, les cyber-attaques, le cyber-harcèlement, le cyber-rançonnage, qui viennent sans aucun doute de Russie, sont sources de graves préoccupations. Je n'enlèverais pas un mot à la partie de votre rapport consacrée à la cyber-criminalité, mais ce domaine doit être soigneusement distingué de l'ingérence dans la politique et les médias. Pour moi, l'ingérence en provenance de Russie concerne essentiellement la cyber-criminalité. Cela ne signifie pas qu'il faille baisser la garde face aux risques pesant sur notre démocratie mais, aujourd'hui, les protections fonctionnent. Rien ne prouve l'existence d'une ingérence russe à l'égard du personnel politique français – je ne parle pas d'opinions politiques qui peuvent déplaire.
Le fait de ne pas quantifier entretient le risque d'un fantasme, d'une peur de nos concitoyens face à des menaces pesant sur notre démocratie. On parle de cela en permanence au lieu d'évoquer d'autres problèmes. Si on fournit aux Français les chiffres que j'ai cités, ils seront moins enclins à penser qu'il faut censurer Twitter ou d'autres réseaux sociaux. L'utilisation non pas de la réalité de l'ingérence mais de la peur face à celle-ci soulève un problème démocratique. Comme vous l'avez dit, nos services, nos agences et notre justice luttent avec succès contre ces pratiques. On ne peut donc pas dire que la démocratie française est touchée par des phénomènes d'ingérence venant de Russie ou de Chine – ou, en tout cas, la situation est sous contrôle, et cela ne met pas en cause un parti politique en particulier.
Je ne comprends pas pourquoi vous avez sous-utilisé les informations relatives à la corruption. Le directeur de l'Agence française anticorruption (AFA) est cité une seule fois, comme l'analyste juridique principale à la division anticorruption de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). En revanche, le chef de la division anticorruption de l'OCDE n'a pas été cité. Le directeur de l'AFA avait tenu des propos très intéressants sur les risques encourus par les collectivités locales et les territoires d'outre-mer, qui méritaient, à mes yeux, davantage qu'une citation. Il a également demandé plus de moyens pour lutter contre la corruption. L'une de mes préconisations est d'ailleurs de concentrer tous les moyens nécessaires – aujourd'hui trop dispersés – en faveur de la lutte contre la corruption. Cela n'entre pas en contradiction avec l'esprit de vos propositions, madame la rapporteure.
J'en viens aux accusations portées contre le Rassemblement national.