Intervention de Clément Beaune

Réunion du mercredi 31 mai 2023 à 17h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports :

Il est parfois compliqué de s'y retrouver dans l'effort global de l'État en matière de transports, entre les différents supports budgétaires et extrabudgétaires. Au cœur de cet effort budgétaire public figure le programme 203, qui relève de ma responsabilité directe en tant que ministre chargé des transports. Ses crédits atteignent 4,1 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 4,4 milliards d'euros en crédits de paiement dans la loi de finances pour 2023, en hausse de 13 % par rapport à l'année 2022.

Il s'agit donc d'un budget important, mais qui ne retrace qu'une partie de l'effort d'ensemble. Il faut y ajouter les crédits de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), qui atteignent 3,8 milliards d'euros en crédits de paiement cette année, le soutien aux voies navigables de France, à la Société du Grand Paris (1 milliard d'euros), le soutien au CDG Express par le biais d'avances qui représentent 400 millions d'euros par an et le budget annexe Contrôle et exploitation aériens, qui représente un peu plus de 800 millions d'euros en crédits de paiement. En dehors du budget de mon ministère, des crédits budgétaires sont accordés au verdissement des véhicules, notamment les véhicules électriques (1,3 milliard d'euros). Il faut aussi citer le soutien à la recherche aéronautique, pour près de 400 millions d'euros. Cela représente un total de 12 milliards d'euros de crédits de paiement, hors frais de personnel, consacrés cette année au budget de l'État pour les transports sous ces différents supports. Il s'agit d'un budget en forte hausse et d'un marqueur fort de cette majorité depuis 2017. Le quinquennat précédent a été notamment marqué par deux supports législatifs ou budgétaires majeurs : la loi d'orientation des mobilités et le plan de relance.

Sur le programme 203, qui dépend le plus directement de mon action, 88 % des moyens sont consacrés aux transports hors routier et aérien, et donc au ferroviaire et aux transports collectifs. Il s'agit du premier poste de dépenses de ce programme 203, contribuant à la transition écologique et à l'effort collectif de décarbonation. Ces moyens consacrés au ferroviaire sont en hausse cette année de près de 100 millions d'euros par rapport à l'année 2022. Pour les crédits de l'AFITF, par exemple, ce sont plus de 2 milliards d'euros qui sont en soutien du transport ferroviaire et des transports collectifs.

S'agissant de l'aérien, notre politique ne prévoit pas de soutien public au secteur, hors deux missions : les lignes d'aménagement du territoire, liées au désenclavement de certains territoires qui n'ont pas accès au ferroviaire et le contrôle aérien, pour la sécurité de ce mode de transport.

Pour revenir aux points que vous avez soulevés, Mesdames les rapporteures, il faut en effet porter une grande ambition à nos transports et à leur décarbonation, le ferroviaire en étant la priorité absolue. Il s'agit de l'objectif du plan d'avenir pour les transports qu'a présenté Madame la Première ministre. Celle-ci a évoqué à cette occasion un investissement total de 100 milliards d'euros pour le seul transport ferroviaire de 2023 à 2040.

Je souhaite que, devant cette assemblée et devant le Sénat, nous puissions tenir, dans les semaines ou les mois qui viennent, un débat sur un projet de loi de programmation. Pour cela, il faut une forme de consensus ou de convergence. C'est la raison pour laquelle je consulterai l'ensemble des groupes politiques qui composent l'Assemblée nationale et le Sénat, pour savoir si nous pouvons construire une loi qui pourrait recueillir une majorité parlementaire dans les mois qui viennent. Si cela n'était pas possible, je le regretterais, mais nous n'abandonnerions pas les crédits budgétaires que nous devons renforcer, pour la priorité ferroviaire en particulier.

C'est d'ailleurs dans cette optique que nous lancerons dans les prochains jours les négociations des contrats de plan État région avec l'ensemble des régions, avec là aussi une priorité assumée relative à la décarbonation des transports, une part du ferroviaire bien supérieure à la génération précédente et des crédits réservés aux services express régionaux métropolitains. L'ordre de grandeur dépendra de la négociation entre l'État et les régions, mais la part de l'État sera voisine de 1 milliard d'euros pour le démarrage des études et les premiers projets, soit un effort évidemment très significatif, qui permettra de lancer véritablement les projets de services express régionaux métropolitains.

Je parlerai aussi des trains d'équilibre du territoire, qui sont très importants. Je souhaite que, le 12 juin prochain, dans l'hémicycle, une majorité permette d'adopter la proposition de loi de M. Zulesi, très utile pour déployer les services express régionaux métropolitains dans les grandes métropoles. Il faut de l'argent dans les contrats de plan entre l'État et les régions et un outil juridique pour que ces projets voient le jour. Il s'agit là de transports du quotidien, de la France périphérique. C'est dans ces zones qu'à plus de 85 %, on utilise encore la voiture, non par choix, mais par dépendance ou par absence d'alternatives. Les services express régionaux métropolitains sont une réponse très politique et écologique. Je crois profondément à ce besoin de transport public supplémentaire. C'est l'ambition d'une décennie, mais nous nous donnons les moyens juridiques et budgétaires d'avancer rapidement sur ces projets partout en France.

Cela veut dire aussi que nous renforçons les trains d'équilibre du territoire qui ont été trop souvent négligés dans nos investissements ferroviaires. Nous avons déjà inversé la tendance ces dernières années, mais nous devons aller plus loin. Les financements ne sont pas absents. En 2022, l'État a en effet consacré 850 millions d'euros aux trains d'équilibre du territoire, soit 12 lignes et plus de 10 millions de passagers chaque année. Or la ponctualité de ces lignes est en moyenne beaucoup moins bonne que sur nos lignes à grande vitesse. Au-delà de ces 850 millions d'euros annuels mobilisés par l'État, plus de 2 milliards d'euros sont investis par l'État et SNCF Réseau pour le renouvellement entier des rames, la régénération et la modernisation du réseau. Cet effort était nécessaire et suscite de l'impatience. Ces travaux sont en cours. Je ne peux donc pas laisser dire que l'État ne s'intéresse pas à ces trains d'équilibre du territoire. Au contraire, nous avons inversé une tendance qui était très préoccupante.

Pour revenir sur les péages, la trajectoire de péage ferroviaire est coûteuse et elle est en forte augmentation. Elle a néanmoins été validée par l'Autorité de régulation des transports et communiquée de manière pluriannuelle aux régions. Elle est aussi liée à un contexte d'inflation et de nécessité de financer notre réseau. Il n'est pas exact de dire que ce seraient uniquement les usagers qui paieraient le réseau ferroviaire. Au total, tous les concours publics fournis au service public ferroviaire chaque année sont proches de 20 milliards d'euros. En France, le reste à charge moyen des usagers du train est le plus faible d'Europe après le Luxembourg. Notre priorité doit donc concerner l'offre, l'investissement et le financement de notre réseau. Néanmoins, je pense qu'il faut rediscuter de la trajectoire d'augmentation des péages, même si l'État en prend déjà à sa charge une large partie, y compris pour les TER, puisque ce sont plus de 2 milliards d'euros qui seront pris en charge par l'État cette année et en 2024 au bénéfice des régions et des TER.

L'Île-de-France est la région qui compte le plus de transports publics et d'usagers. Le programme d'investissement d'Île-de-France Mobilités est sous l'autorité de la présidente de région. Pour autant, des pistes de financement complémentaires peuvent être discutées. D'un commun accord avec Valérie Pécresse, le 23 janvier dernier, nous avons lancé des Assises du financement des transports franciliens. De nombreuses pistes issues de tous les groupes politiques ont été envisagées à cette occasion. Un rapport d'inspection a été commandité par l'État, proposant un certain nombre de pistes de financement. Il m'a été remis il y a quelques jours. Je le tiendrai à votre disposition.

Vous avez mentionné « une situation déplorable des transports publics franciliens ». Oui, il faut investir et oui, c'est la région qui porte ces investissements. Il faut se féliciter que l'Île-de-France investisse pour les transports des Franciliens et de tous les Français. L'État finance aussi l'investissement dans le Grand Paris Express. Nous serons la seule métropole d'Europe à ouvrir quatre lignes de métro et à en prolonger massivement une autre, pour les Jeux olympiques et paralympiques. C'est un investissement inédit depuis les années 1970 et porté en partie par l'État dans les transports franciliens, qui en ont besoin.

Nous avons connu un automne et un hiver extrêmement difficiles dans les transports parisiens et franciliens, pour des raisons de recrutement, principalement. Je rappelle que l'État n'était pas obligé d'apporter une aide exceptionnelle de 200 millions d'euros à la région Île-de-France pour l'année 2023, complétée de 100 millions d'euros pour les autres métropoles de France, qui avaient aussi des besoins liés à l'inflation. Je souhaite que nous trouvions une solution de financement commune, pérenne et de haut niveau pour les transports franciliens dans les années qui viennent. Je discuterai de ce sujet dans les prochains jours avec la présidente du conseil régional Valérie Pécresse, afin de définir un consensus au bénéfice des Franciliens et de tous les Français qui utilisent ce réseau, sans tabou sur le financement.

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