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Intervention de Rima Abdul-Malak

Réunion du lundi 15 mai 2023 à 15h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Rima Abdul-Malak, ministre de la culture :

Avant de dérouler l'explication de nos chiffres, permettez-moi de vous lire un extrait d'un entretien de Michel Serres au journal Libération en 2009 : « Si vous avez du pain, et si moi j'ai un euro, si je vous achète le pain, j'aurai le pain et vous aurez l'euro et vous voyez dans cet échange un équilibre, c'est-à-dire : A a un euro, B a un pain. Et dans l'autre cas B a le pain et A a l'euro. Donc, c'est un équilibre parfait. Mais, si vous avez un sonnet de Verlaine, ou le théorème de Pythagore, et que moi je n'ai rien, et si vous me les enseignez, à la fin de cet échange-là, j'aurai le sonnet et le théorème, mais vous les aurez gardés. Dans le premier cas, il y a un équilibre, c'est la marchandise, dans le second il y a un accroissement, c'est la culture. »

Il est temps maintenant de vous présenter l'état de la consommation de nos budgets concernant les missions Culture et Médias, livre et industries culturelles et le compte spécial Avances à l'audiovisuel public. En 2022, la consommation des crédits de paiement (CP) du ministère de la culture s'est établie à 99,2 %, soit un montant de 4,2 milliards d'euros. Cette très bonne consommation souligne la pertinence des crédits votés. Mais comme le soulignait Michel Serres, si l'on peut mesurer des niveaux de dépenses, l'impact de ces crédits demeure difficile à quantifier dans sa véritable puissance.

Sur la mission Culture, la consommation s'établit à 99,2 % en autorisation d'engagement (AE) et à 99,6 % en CP, soit un niveau comparable aux très bons niveaux atteints en 2021. Sur la mission Médias, Livre et Industries culturelles, les taux de consommation atteignent de bons niveaux avec 95,4 % en AE et 97,2 % en CP. On note toutefois un léger recul ici, pour deux raisons : d'une part, la création en loi de finances rectificative (LFR) de fin d'exercice d'une aide de 5 millions d'euros aux éditeurs de presse les plus touchés par l'augmentation de leurs coûts de production ; et d'autre part, le report sur 2023 de crédits de compensation du coût de la hausse du point d'indice dans les opérateurs du programme 334.

Au-delà de la pertinence du budget voté, je veux ici saluer l'efficacité des services du ministère dans sa mise en œuvre. Les principales dépenses au sein des 4,2 milliards d'euros exécutés en 2022 sont tout d'abord constituées des dépenses de personnel, pour 503 millions d'euros, soit 12 %, mais également des subventions pour charges de service public aux 78 opérateurs culturels, pour 1,3 milliard (31 %). Il s'agit d'une dépense fortement rigide puisqu'elle finance à hauteur de 59 % des dépenses de personnel. Le reste de la dépense des opérateurs culturels est pour partie contraint. À titre d'exemple, les seules dépenses d'énergie de nos opérateurs culturels se sont élevées à 75 millions d'euros en 2022. Ensuite, les crédits d'investissement s'établissent à 390 millions (11 %), auxquels s'ajoutent les investissements au niveau déconcentré, soit environ 700 millions d'euros (19 %), qu'il s'agisse des investissements réalisés par le ministère et les opérateurs ou du soutien aux dépenses d'investissements dans les territoires.

Les dépenses d'intervention s'élèvent à 1,67 milliard (40 %), dont 199,6 millions pour le pass Culture et 367,7 millions pour les subventions de fonctionnement aux équipes, structures, labels et réseaux du spectacle vivant dans les territoires (scènes nationales, opéras nationaux en régions, centres dramatiques nationaux, compagnies chorégraphiques, ensembles musicaux). La consommation des crédits France Relance pilotés par le ministère à hauteur de 98,9 % en AE et 87,5 % en CP constitue également un motif de satisfaction. Parmi les opérations achevées en 2022 dans le cadre de France Relance, je pense notamment aux suivantes :

– l'opération menée dans le cadre du « plan cathédrales », avec notamment la cathédrale Saint-Pierre de Montpellier (mise hors d'eau des toitures et travaux de stabilité de la tour) ;

– les opérations de restauration portant sur des monuments historiques appartenant à des collectivités territoriales ou à des propriétaires privés, notamment la restauration de la salle des États et des toitures du château de Ravel ou la restauration des menuiseries de l'Hôtel de Beaulaincourt à Béthune ;

– l'opération de rénovation d'équipements patrimoniaux en régions appartenant à des collectivités territoriales (par exemple, la reprise d'étanchéité de toiture du Centre de conservation et d'études de Soissons).

À périmètre constant, la hausse de budget entre la loi de finance initiale (LFI) 2021 et la LFI 2022 est de 264 millions d'euros (+7,3 %). Elle a permis notamment une montée en puissance du pass Culture à hauteur de 140 millions, puisque nous avons généralisé le pass Culture pour tous les jeunes de 18 ans et mis en place le pass dans sa version collective dès la quatrième. Cela se réalise à partir d'un travail avec les enseignants et les directeurs d'établissement pour multiplier les sorties scolaires, mais aussi inviter des auteurs et des artistes à venir dans les établissements.

Il convient en outre de citer une augmentation des crédits déconcentrés dans les territoires de 4 % et un effort important pour l'enseignement supérieur culture (les bourses, l'amélioration de la vie étudiante, les budgets de fonctionnement et d'investissement des écoles, notamment les écoles d'architecture) de 26 millions d'euros, soit une hausse des moyens de 11 %, à périmètre constant. Il s'agit là d'un premier effort de rattrapage sur cet enseignement supérieur.

Au cours de l'année 2022, le dégel de la quasi-totalité de la réserve de précaution (108 millions d'euros sur un total de 116 millions), ainsi qu'une ouverture nette en LFR de fin de gestion de 60,2 millions ont notamment permis de mener à bien les actions suivantes :

– répondre aux besoins urgents apparus en gestion dans les institutions du spectacle vivant les plus fragilisées, ainsi que la montée en charge des dispositifs de soutien à l'emploi (notamment le Fonpeps) ;

– permettre la montée en charge du pass Culture ;

– assurer le financement à hauteur de 17 millions de l'été culturel 2022 (qui avait été développé en 2020 lorsque les festivals avaient été annulés en raison de la crise de la Covid), notamment pour proposer une offre culturelle aux publics des quartiers prioritaires de la politique de la ville et des zones rurales ;

– offrir une compensation aux établissements publics au titre de la revalorisation du point d'indice (30 millions d'euros).

Dans cette dynamique, le budget voté pour l'année 2023 a permis d'intégrer au sein du budget du ministère certains objets qui faisaient l'objet d'impasses récurrentes auparavant. Je pense ici aux bourses sur critères sociaux ou encore aux caisses de retraites de l'Opéra national de Paris et de la Comédie française, des régimes spéciaux concernant peu de personnes et qui ont été préservés dans le cadre de la réforme des retraites.

Concernant l'audiovisuel public, la dotation 2022 s'est élevée à 3,62 milliards d'euros, en baisse de 17,3 millions par rapport à la LFI 2021, soit une diminution de 0,5 %, hors crédits du plan de relance. L'année 2022 correspondait à la dernière année de la trajectoire fixée pour les années 2018 à 2022 vis-à-vis de l'audiovisuel public, soit une baisse de 190 millions d'euros. Cette diminution n'a pas empêché des records d'audience significatifs pour Radio France ou France Télévisions.

La loi de finances rectificative 2022 adoptée en août dernier n'a pas remis en cause cette trajectoire. Elle a acté la suppression de la contribution à l'audiovisuel public (CAP), conformément à l'engagement du Président de la République destiné à rendre du pouvoir d'achat aux Français. Elle a également défini de nouvelles modalités de financement de l'audiovisuel public, à titre transitoire jusqu'à la fin 2024, à travers l'affectation d'une fraction de la TVA à l'audiovisuel public. Elle a enfin prévu la compensation des effets fiscaux induits par ces nouvelles modalités de financement.

Cette année 2022 a en outre marqué la fin de la mise en œuvre du plan de transformation de l'audiovisuel public engagé en 2018, qui a permis des avancées notables, et en particulier le renforcement de l'offre de proximité entre France 3 et France Bleu.

Pour 2023, le budget que j'ai porté devant le Parlement avec l'ensemble des équipes du ministère de la culture a permis de continuer dans cette dynamique et de porter mes priorités pour la culture. Ces dernières visent à atteindre les objectifs suivants :

– favoriser l'accès à la culture pour tous (pass Culture, politique d'éducation artistique, renforcement de l'action en faveur de l'inclusion et de l'accessibilité) ;

– favoriser notre souveraineté culturelle en soutenant la création française dans les mondes physique et numérique ;

– protéger et réinventer le patrimoine ;

– garantir le pluralisme des médias et l'accès à une information libre et indépendante, tout en confortant les moyens pour développer les compétences et l'emploi culturel ;

– renforcer l'ancrage territorial et international du ministère.

Les crédits obtenus et votés pour le budget 2023 ont augmenté de 7 % par rapport à 2022. Pour mémoire, les crédits du ministère de la culture sont passés de 3,4 milliards d'euros en LFI 2017 à 4,2 milliards en LFI 2023 (hors audiovisuel public et hors charges de pensions civiles). Les crédits de l'audiovisuel public 2023 s'élèvent à 3,8 milliards d'euros, soit une hausse de 3 % par rapport à 2022.

Le gouvernement a entamé les discussions avec les entreprises audiovisuelles publiques sur la prochaine génération de contrats d'objectifs et de moyens (COM) pour la période 2024-2028, qui ont vocation à être conclus cette année.

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