Intervention de Danielle Simonnet

Réunion du mercredi 17 mai 2023 à 17h30
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Simonnet, rapporteure :

La question démocratique est au cœur du débat sur le lobbying. Notre enquête parlementaire porte sur les révélations des Uber files sur la période concernée, à savoir de 2014 à 2016, mais aussi sur l'évolution de l'ubérisation et donc l'évolution du lobbying.

Il y a actuellement un débat autour d'une directive européenne sur la présomption de salariat. Le Parlement européen a adopté une préconisation en la matière et le Conseil de l'Union européenne sera amené prochainement à se prononcer. Or nous n'avons toujours pas eu de débat transparent en France, ni à l'Assemblée nationale ni au Sénat, sur la position de la France. Il me semble pourtant que c'est une question cruciale.

Par ailleurs, dans le cadre de cette commission d'enquête parlementaire, nous avons appris par le SGAE (Secrétariat général aux affaires européennes) que parmi les arguments de la France, il y avait l'idée qu'il fallait permettre aux pays où il existe un dialogue social avec les travailleurs des plateformes de déroger à l'application de cette directive. En outre, il existe également une volonté d'ajouter des critères supplémentaires qui risquent de torpiller cette directive.

Les plateformes ont instauré un lobbying pour défendre l'idée d'un tiers statut car le détournement du statut de travailleur indépendant conduisait à des procès qu'elles perdaient. Comme ce lobbying ne donnait pas les résultats escomptés, elles ont commencé à défendre l'existence d'un dialogue social et l'octroi de nouveaux droits sociaux.

La politique française a suivi ce cheminement. L'Arpe (Autorité des relations sociales des plateformes d'emploi) a ainsi été créée à la suite du rapport Frouin, dont la commande écartait explicitement la question de la présomption de salariat. Malgré tout, comme les conclusions de ce rapport n'étaient pas satisfaisantes, la task force Mettling a permis la création de l'Arpe. Je rappellerai quand même que Bruno Mettling a œuvré en faveur d'Uber.

La France est maintenant le pays qui torpille le plus – apparemment – la directive sur la présomption de salariat, tout en vantant son dialogue social au niveau de l'Arpe alors que la participation aux élections professionnelles est inférieure à 2 %.

Je pense qu'il y a un enjeu clair dans notre commission d'enquête parlementaire.

En plus de modifications réglementaires ou de la réécriture du décret, n'y a-t-il pas aussi des débats constitutionnels pour renforcer la démocratie, y compris dans l'articulation entre la position de l'exécutif d'un État membre et le Conseil de l'Union européenne ?

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