Monsieur Le Vigoureux, je sais votre engagement de longue date dans le mentorat, au travers notamment du dispositif « Tandem Pro » que vous avez lancé dans votre circonscription et qui a rencontré un grand succès. Nous souhaitons le déployer dans l'ensemble des lycées professionnels. Le Président de la République avait annoncé en mars 2021 le lancement du plan « 1 jeune, 1 mentor », première initiative gouvernementale en faveur du mentorat en France. En 2022, 150 000 jeunes en ont bénéficié. Notre objectif est d'aller plus loin et d'atteindre les quelque 620 000 lycéens professionnels en 2025. Ce sera un vrai « plus » pour ces jeunes qui sont très ùajoritairement issus d'un environnement social plus fragile. Beaucoup n'ont pas de réseaux et ne bénéficient pas de cet accompagnement par un adulte qui les aide à cheminer et à construire leur parcours.
Il convient donc de mettre en œuvre une mobilisation toute particulière. Ainsi, 20 millions d'euros supplémentaires seront chaque année affectés au mentorat en lycée professionnel. Au-delà, nous construirons une organisation territoriale avec l'engagement de tous – associations, entreprises et fédérations. Nous répondrons de la sorte à l'impérieux enjeu d'égalité des chances : des adultes feront partager à tous la richesse de leur expérience et dispenseront des conseils de vie et d'orientation des carrières.
Cette mobilisation est déjà au rendez-vous. Nous l'espérons plus forte demain. Je m'y emploie.
Madame Pollet, une réorganisation et un allongement de la durée de stage des élèves qui souhaitent s'insérer professionnellement sont prévus en classe de terminale. Demain, ceux qui souhaitent s'insérer dans l'emploi effectueront un stage de douze semaines en fin de parcours de formation, contre deux stages de quatre semaines aujourd'hui. Cette mesure semble assez logique : il s'agit à la fois de donner un temps assez long qui permette au jeune de déployer des compétences dans le cadre d'une mission, de faire ses preuves et, éventuellement, d'être embauché puisque ce stage s'effectuera désormais à la fin de leur parcours. C'est d'ailleurs le même principe qui vaut par exemple pour le master 2. Le lien entre l'école et l'entreprise, intervient au moment où le jeune a bénéficié de l'entièreté de son temps d'enseignement, où il est en mesure de déployer les compétences qu'il a acquises dans l'environnement professionnel et d'y faire ses preuves. En outre, ce stage ne s'opère pas au détriment des enseignements fondamentaux et correspond, en fait, à la reconquête du mois de juin, souvent évoquée mais rarement mise en œuvre. Si le jeune le souhaite, cette période pourra être consacrée à la préparation de la poursuite des études. Nous souhaitons en effet mettre en place tous les moyens pour lui permettre de réussir sa poursuite d'études si tel est son choix.
Madame la députée Piron, votre engagement pour lutter contre l'illettrisme est fort et absolument nécessaire. Je l'ai dit, le niveau de maîtrise des savoirs fondamentaux – lecture, écriture et calcul – est plus faible dans les lycées professionnels que dans les lycées de l'enseignement général et technologiques. Cela tient aux difficultés d'ordre social et parfois liées au handicap qu'ont rencontrées ces élèves dans le cadre de leur parcours scolaire et dans l'acquisition de ces savoirs.
En France, 2,5 millions de personnes âgées de 18 à 65 ans sont en situation d'illettrisme, soit 7 % des personnes ayant été scolarisées. Cet enjeu est majeur. Lors des journées défense et citoyenneté, on identifie 9,6 % de personnes en difficulté de lecture, dont 4,1 % en grande difficulté. Nous ne pouvons évidemment pas nous satisfaire de ce constat : il nous faut agir. Cette réforme prévoit précisément un accompagnement renforcé des élèves par leurs professeurs, des classes à effectif réduit plus nombreuses, et des professeurs plus nombreux à intervenir. Nous doterons également les équipes enseignantes d'outils plus performants pour mieux accompagner ces jeunes. C'est un travail que nous réalisons avec l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme. Il s'agira d'identifier plus tôt et plus systématiquement les situations d'illettrisme des jeunes et de créer un observatoire de l'illettrisme qui permettra de suivre plus précisément les effets de nos politiques publiques dans et hors les établissements scolaires.
Monsieur le député Corbière, cette réforme du lycée professionnel a été engagée dans le dialogue avec l'ensemble des parties prenantes : plus de trois mois de concertation avec les 160 participants des groupes de travail. Elle se fera par la voie réglementaire, toujours dans le cadre de la concertation – c'est la troisième fois que je viens en discuter avec vous –, et se construira également avec les DDFPT, l'objectif étant d'organiser un réseau. Les DDFPT animeront un réseau des chargés de relations avec les entreprises au sein des établissements sur lesquels ils s'appuieront pour remplir leurs missions, nombreuses et ambitieuses. Il s'agit de valoriser le lien avec les entreprises et de mieux organiser la réponse des établissements aux enjeux de partenariat, d'actualisation des compétences, de mise en lien des élèves avec les entreprises pour les aider à trouver des stages et être le bureau des élèves qui n'en ont pas.
Madame la député Anthoine, la lutte contre le décrochage est une des priorités de cette réforme. Malgré le travail de qualité accompli par le service public de l'éducation, sur 100 élèves entrant en seconde professionnelle, un tiers seulement décrochera un bac ou un diplôme équivalent. Il est essentiel de viser ce zéro décrochage identifié par le Président de la République. Cela se fera avant tout en améliorant l'orientation car, pour faire de la voie professionnelle une voie choisie, il faut susciter des vocations. La décision de M. Pap Ndiaye d'intensifier, dès la rentrée prochaine, la découverte des métiers pour les collégiens à partir de la cinquième, vise à les aide à mieux identifier les formations de la voie professionnelle. Cela passera également par l'amélioration de l'accompagnement des élèves lycéens pendant leur scolarité et leur valorisation. Cela se fera enfin en mettant en place des filets de sécurité anti-décrochage à toutes les étapes du parcours, pendant et après le lycée professionnel, au travers des dispositifs que j'évoquais, « Tous droits ouverts », « Ambition Emploi » et « Parcours de consolidation ». Lutter contre le décrochage des jeunes est clairement un objectif à toutes les étapes du parcours d'enseignement pour ces lycéens professionnels.
Madame la députée Colboc, « Tous droits ouverts » sera mis en place dans tous les lycées professionnels dès la rentrée 2023. Ce dispositif permettra aux équipes éducatives de présenter rapidement une palette de propositions aux élèves en fort risque de décrochage. Il repose sur une mobilisation des acteurs susceptibles de les aider tant au sein du lycée qu'en dehors. Le principe est simple : pendant une période de quelques semaines pouvant aller jusqu'à un trimestre, tous les droits sont ouverts afin de trouver la solution la plus adaptée. Les jeunes conservent ainsi la possibilité de retourner dans leur lycée, leur statut scolaire et les droits qui y sont associés. Ils peuvent cumuler avec ces droits associés des solutions externes qu'ils testent, y compris en termes de rémunération si la solution testée y ouvre droit.
Pour les lycéens de moins de 16 ans, « Tous droits ouverts » s'appuient sur le Parcours aménagé de formation initiale, le Pafi, qui existe depuis 2015 au sein de l'Éducation nationale et qui est ouvert aux jeunes dès 15 ans.
Madame la députée Ranc, le caractère national des diplômes est pleinement respecté par la réforme. Pour répondre aux besoins des entreprises et permettre une meilleure insertion des élèves, 10 000 places de spécialisation-formation après un bac pro seront créées dès 2024, et 20 000 en 2025, car les chances d'insertion dans l'emploi de ceux ayant suivi une spécialisation à bac + 1 sont accrues de 20 points. Cette spécialisation est une demande forte des élèves comme des entreprises. Aujourd'hui, une trentaine de formations complémentaires permettant une spécialisation des élèves après leur baccalauréat professionnel bénéficient à plus de 4 500 élèves ; en 2025, plus de 20 000 places seront créées.
Monsieur le député Croizier, les stages sont effectivement appréciés des élèves qui sont parfois « peu scolaires » et qui ont envie de donner du sens à leur parcours de scolarisation. Je partage avec vous l'idée que l'on ne peut se satisfaire de la situation actuelle. L'offre de formation doit être repensée pour mieux accompagner ces jeunes en profondeur, dans un parcours de réussite. Ils devront pouvoir valoriser leur expérience lorsqu'ils seront en recherche d'insertions professionnelle. Telle est notre conception du stage, notamment en terminale, lorsque le projet et l'insertion professionnelle post bac ou post CAP se mettent en place.
Il est important d'accompagner le projet de l'élève et de répondre à ses aspirations, il est important aussi de valoriser ce temps en entreprise. Dès la rentrée prochaine, cela passera par une gratification de 50 à 100 euros par semaine de stage, soit jusqu'à 2 100 euros pour un élève de baccalauréat professionnel qui aura effectué tous les stages et vise une insertion professionnelle. C'est une reconnaissance, c'est aussi une responsabilité que de considérer ces temps en entreprise comme des temps d'appropriation des enseignements fondamentaux qui leur sont dispensés.
Monsieur le député Olive, le message aux acteurs économiques est clair : nous voulons faire le lien entre enjeu économique, réalité et besoins des territoires. De nombreux défis sont à relever, dont l'urgence écologique, le vieillissement de la société, les transitions du numérique et l'indispensable réindustrialisation de notre pays. Le lycée professionnel doit être au cœur de ces enjeux, et apporter à la nation les compétences dont elle a besoin.
C'est tout le travail qui sera engagé autour de la transformation de la carte des formations initiales de manière cohérente entre l'État, les préfectures, les académies, les collectivités, les régions, et les établissements. Chacun à son niveau doit être acteur de façon à proposer des formations qui mènent à l'emploi au sein des territoires. Ce travail est conduit selon une stratégie d'évolution dessinée à l'échelle académique en concertation avec les régions mais en tenant compte également de la réalité territoriale à l'échelle des bassins d'emploi et en lien avec les acteurs économiques et les entreprises.
Monsieur le député Walter, les fermetures toucheront 146 formations, les ouvertures 212, dont plus de 80 via France 2030, et 2 600 places seront créées. C'est dire si le lycée professionnel verra, demain, sa place renforcée ! Nous considérons qu'il a toute sa place pour préparer les compétences de la nation, mais qu'il n'y parviendra que s'il forme les jeunes en leur ouvrant des perspectives. Ce serait mentir à ces jeunes que de les laisser entrer dans des formations dont on sait pertinemment qu'elles ne débouchent ni sur des perspectives de poursuite d'études ni sur une insertion professionnelle réussie.
Monsieur le député Minot, je le répète, les ouvertures – 212 – seront plus nombreuses que les fermetures –146 sur les 17 000 existantes. Le dialogue engagé entre les régions et les rectorats vise à objectiver le besoin en évolution des formations. Le but est d'accompagner les transitions professionnelles, écologique, numérique et démographique. Préparés à ces enjeux, les jeunes des lycées professionnels auront toute leur place dans la société de demain.
Nous serons, bien évidemment, aux côtés des professeurs des lycées professionnels qui connaissent déjà des ouvertures et des fermetures de filières. Chaque année, un certain nombre d'entre eux sont accompagnés lors des créations de nouvelles filières. Nous améliorerons encore les moyens en formation. Par le biais notamment du plan France 2030, nous travaillerons à un vaste plan de formation continue.
Madame la députée Taillé-Polian, c'est bien la valorisation de la voie professionnelle que nous visons grâce au renforcement des moyens au travers du pacte, de la gratification des stages, du lien avec France Travail, de l'engagement sur le mentorat, mais également du nombre d'enseignants de la voie professionnelle et des personnels qui les accompagnent. Je pense aux CPE, infirmiers et assistants sociaux. Cela se traduit aussi par un investissement sur le choix de l'orientation. Pour que les jeunes s'engagent et donnent du sens à leur parcours, il était essentiel en effet de se pencher sur cette question. La découverte des métiers dès le collège leur permettra d'opérer un choix d'orientation éclairé le moment venu. C'est tout le sens du projet porté par Pap Ndiaye sur la découverte des métiers dès la cinquième, qui se poursuit en quatrième et troisième.
Monsieur le député Pellerin, les DDFPT sont les conseillers du chef d'établissement sur l'ensemble des sujets liés aux enseignements technologiques et professionnel. Leurs missions sont vastes : organisation des enseignements professionnels, coordination et animation des équipes enseignantes, conseil aux chefs des établissements en matière d'offres de formation de l'établissement aux évolutions techniques et technologiques mais également budgétaires, formation des personnels, relation avec les partenaires. Demain, le DDFPT jouera un rôle pivot encore plus important puisqu'il viendra soutenir des chargés de relation entreprises et organisera l'animation de ce réseau.
Une enquête Ipsos réalisée en 2013 à la demande de la direction interministérielle de la transformation publique auprès d'un échantillon significatif d'élèves de la voie professionnelle a révélé que 72 % des périodes de formation en milieu professionnel sont trouvées par le propre réseau de l'élève ou de ses parents. Quand on sait les fragilités sociales et les difficultés de réseau que ces jeunes connaissent souvent, on comprend à quel point disposer d'un bureau des entreprises et d'une personne pour les accompagner dans cette recherche de périodes de formation en milieu professionnel est essentiel pour eux. Cette réforme organise donc un véritable pôle d'appui auprès du DDFPT pour suivre ces jeunes, l'évolution des formations au sein de l'établissement et les relations avec les entreprises.
Monsieur le député Belkhir Belhaddad, ce bureau des entreprises a donc pour missions le développement de la relation de partenariat avec le tissu économique, l'organisation des enseignements professionnels, la coordination et l'animation des équipes enseignantes ainsi que le conseil au chef d'établissement en matière d'offre de formation de l'établissement. Une campagne de recrutement est lancée, qui permettra à des personnes en interne de l'Éducation nationale comme en externe, de se porter candidates à ces fonctions. Il s'agit de fonctions administratives de trente-cinq heures par semaine qui assureront, dans chaque établissement, un contact avec les entreprises partenaires tout au long de la semaine, améliorant ainsi le lien entre les entreprises et l'établissement.
Madame la députée Mette, s'agissant de la capacité à apporter une réponse territoriale aux besoins de formation et aux familles issues de la ruralité, je rappelle que l'offre de formation doit se déployer sur tous les territoires. Pour les jeunes qui feraient toutefois le choix de suivre un parcours de formation qui n'existerait pas à proximité de leur domicile, l'internat peut être une solution sécurisée pour y accéder. Le régime de l'internat est en effet relativement fréquent en lycée professionnel, puisque près de 15 % des lycéens professionnels sont internes, et les capacités d'accueil sont importantes, 56 % des lycées professionnels disposant d'un internat, dont le taux d'occupation est en moyenne de 77 %.
Madame la députée Bannier, s'agissant de l'échec en apprentissage, je rappelle qu'un jeune sur quatre rompt son contrat d'apprentissage avant son terme. Ce chiffre n'est pas acceptable et nous ne savons pas ce que devient le jeune par la suite, s'il retrouve une autre entreprise ou pas. Nous avons besoin de mieux identifier le phénomène ; c'est un véritable sujet sur lequel il nous faut travailler. C'est pourquoi j'ai fait de la prévention du décrochage une priorité.
Trop de collégiens confrontés à des difficultés scolaires se retrouvent orientés vers la voie professionnelle et trop de jeunes décrochent du lycée professionnel pour ces raisons. Nous souhaitons sécuriser leurs parcours : la rupture du contrat d'apprentissage, qu'elle soit du fait de l'employeur ou du jeune, ne doit plus être synonyme d'arrêt du parcours de formation. Nous souhaitons également encourager la mixité des publics dans les lycées professionnels, qui permet d'accueillir dans les mêmes classes des élèves et des apprentis et, par conséquent, de rapprocher les deux voies de formation, scolaire et par l'apprentissage. Les jeunes pourront ainsi évoluer dans leurs projets : en cas de rupture du contrat d'apprentissage, ils pourront revenir dans la voie scolaire ; à l'inverse, des jeunes scolaires pourront se diriger vers l'apprentissage s'ils le désirent.
Plus largement, cette dynamique est poursuivie dans une volonté de travailler sur la qualité de l'apprentissage. Ce sujet fera l'objet d'une concertation que j'engagerai avec les différents acteurs afin de travailler à un meilleur accompagnement des apprentis et à une très nette diminution du taux de rupture des contrats d'apprentissage.
Enfin, monsieur le député Esquenet-Goxes, votre témoignage me conforte dans l'idée que le fait de travailler en filière est essentiel pour l'attractivité des lycées professionnels. Être pris dans un consortium d'acteurs de la formation dans des filières qui permettent d'évoluer de bac – 3 à bac + 5, mais également avec des partenaires économiques qui reconnaissent la qualité de la préparation est un facteur essentiel d'attractivité. Le lycée professionnel doit être perçu comme un acteur à part entière et de qualité pour préparer les compétences de la nation.