Bien que parfois méconnue, la branche AT-MP mène des actions de prévention et verse des prestations importantes pour les salariés concernés. 2023 est une année cruciale pour la branche : elle sera marquée par l'application des dispositions de la LFRSS 2023 – avec la création du Fipu –, par la négociation en cours de la COG – qui soulève des questions de dépenses de prévention et de renforcement de l'investissement dans la prévention des AT-MP –, et, enfin, par les négociations des partenaires sociaux qui ont débouché, la nuit dernière, sur un projet d'accord national interprofessionnel. Ce dernier alimentera largement les travaux de la COG et fera évoluer la gouvernance de la branche.
Le Fipu sera doté de 1 milliard d'euros d'ici 2027. Son calendrier est particulièrement resserré, car nous souhaiterions que le texte réglementaire soit publié avant l'entrée en vigueur de la réforme en septembre, ce qui suppose que la concertation avec les partenaires sociaux débute au mois de juin.
Par ailleurs, les actions du fonds spécifique pour l'hôpital devront être arrêtées à la rentrée.
S'agissant du bilan du C2P, environ 1 600 000 salariés possèdent des points, et 500 000 salariés en acquièrent chaque année. Les différentes mesures de la réforme augmenteront le nombre de salariés bénéficiaires : je pense notamment à la baisse des seuils pour le travail de nuit et les équipes alternantes de 120 à 100 nuits, qui permettra de toucher ainsi 55 000 salariés supplémentaires chaque année – en particulier dans les secteurs sanitaires, les cliniques privées ou les Ehpad. La réforme induit également une meilleure prise en compte de la polyexposition, qui se traduira par une augmentation du nombre de points cumulés par chacun des 8 000 salariés concernés. La modification de la valeur du point améliorera le recours à la formation et au temps partiel pour 70 000 salariés.
L'ensemble de ces mesures représente environ 80 millions d'euros à l'horizon 2030. Il est important que les textes paraissent dès cette année pour rendre ces droits effectifs au plus vite.
La cinquième branche présente en effet des spécificités. Cependant, nous essayons de construire des outils qui, tout en s'inscrivant dans un droit et une gouvernance différents, permettent de mettre en place un pilotage effectif des acteurs de terrain. Il est toutefois vrai que les progrès de la CNSA en la matière ont été un peu lents. Il s'agit par exemple de systèmes d'information visant à améliorer la remontée des données et le partage de bonnes pratiques. Les COG de la sécurité sociale promeuvent en effet cette habitude, qui garantit un suivi rapproché de ces indicateurs afin d'évaluer toute divergence et de la corriger rapidement. La COG de la CNSA a alloué des moyens supplémentaires à la caisse dans cet objectif.
La création de cette cinquième branche a été l'occasion d'améliorer l'information du Parlement et des Français par une annexe au PLFSS dédiée à l'effort national, précisément chiffrée. En outre, il existe de nombreux autres exemples dans lesquels l'effort national dépasse une simple branche : je pense notamment à la politique familiale.
Le rapport Vachey s'interrogeait sur la définition du périmètre. Pour le Gouvernement, il paraissait naturel que ce dernier puisse évoluer dans la durée. Aujourd'hui, nous évaluons le choix initial et les outils déployés pour piloter la branche : les questions que vous soulevez vont ainsi dans ce sens.
Vous m'avez également interrogé sur le financement. Les 9 à 10 milliards d'euros de dépenses mentionnés par Dominique Libault excédaient en réalité la trajectoire tendancielle : une partie d'entre elles seront couvertes par la dynamique des recettes d'ici 2030, telles qu'elles ont été affectées initialement à la caisse, et auxquelles s'en ajouteront de nouvelles – comme les 2,5 milliards d'euros de CSG dès l'année prochaine. Cela ne veut pas dire que la branche sera équilibrée en 2030, sans recettes nouvelles ; mais la trajectoire pluriannuelle 2026 qui figure dans la LFSS et la LFRSS pour 2023 prévoit une forme d'équilibre dans les années à venir, malgré les mesures nouvelles financées.
Le renforcement du pilotage et l'entrée dans le droit commun de la CNSA s'accompagnent aussi d'un important développement des politiques publiques, pour un total de 5 milliards d'euros de dépenses nouvelles depuis la création de la branche. Au-delà du Ségur, qui en représente une partie importante, des mesures nouvelles seront prochainement déployées sur le renforcement du temps d'encadrement dans les Ehpad, avec les deux heures de convivialité que vous avez mentionnées. S'il n'a pas été chiffré précisément, on peut toutefois estimer qu'à horizon 2030, le montant total de ces mesures nouvelles atteindra près de 10 milliards d'euros. Cette trajectoire reprend donc en bonne partie les préconisations de Dominique Libault.