Cet accord de siège entre la France et la Banque des règlements internationaux a pour vocation de permettre à la BRI d'accéder à de nouveaux locaux et pose un cadre légal à l'emploi des personnels qui y seront affectés ; ce faisant, il révèle le caractère unique de cette institution et les privilèges qui sont les siens, en dehors du droit commun qui s'applique habituellement aux personnes morales et plus particulièrement aux établissements financiers.
Rappelons que cette institution, matriarche du système bancaire international, relève de la banque privée par sa structure, tout en bénéficiant de privilèges juridiques et diplomatiques absolument exorbitants. Le projet de loi que nous examinons, au-delà de ses dispositions purement techniques, permet de mettre en lumière le caractère souverain de la BRI au sein même de l'État : elle n'est soumise à aucune réglementation, à aucun tribunal et à aucune autre décision que celles établies par ses propres institutions ad hoc.
Il est nécessaire de le rappeler : nous faisons face à une institution dont l'importance dans le système économique et financier n'a d'égale que sa discrétion médiatique. Interrogez les Français dans la rue : ils seront très peu à connaître les prérogatives et les fonctions de cette banque, dont l'existence même demeure un secret. Pourtant, elle n'est pas neutre : ses positions ne sont certes pas médiatisées, mais elles ne se limitent pas à des interventions techniques destinées à stabiliser et à pérenniser le système financier. Elles ont un caractère éminemment politique et s'inscrivent dans le cadre des orientations décidées par les hauts responsables de la finance internationale et par les responsables politiques des grandes organisations européennes et mondiales.
La BRI accompagne – entre autres projets – celui de l'euro numérique, annoncé par la présidente du FMI, Christine Lagarde, à l'horizon 2026. C'est dans ce cadre que M. Benoît Cœuré, ancien président du comité d'évaluation de France relance, a été nommé à la tête du pôle d'innovation de la BRI, afin de travailler sur le phénomène des cryptomonnaies et de faire avancer le projet d'euro numérique, tout en combattant les alternatives au système financier actuel. Je cite les propos tenus il y a deux ans par le président de la Bundesbank, M. Jens Weidmann, à l'occasion de la création du hub d'innovation de Francfort : « En tant que gérant du site de Francfort, nous nous réjouissons de faire progresser, conjointement avec d'autres banques centrales du monde entier, la digitalisation dans le système financier ». Ces hubs d'innovation sont « un investissement dans le futur des banques centrales et du système financier », selon le président de la BRI Agustín Carstens, qui ajoute que « les nouveaux pôles contribueront à faire progresser la coopération mondiale dans le domaine des technologies financières innovantes ».
Il existe donc une réelle interrogation quant aux ambitions de ce futur hub parisien. Qu'une grande institution financière vienne s'installer dans des locaux parisiens ne nous pose en soi pas de problème particulier, mais il serait intéressant de savoir quels sont les projets d'avenir qui y seront développés. Les projets développés au sein de la Banque des règlements internationaux, et plus généralement au sein des grandes institutions financières, sont rarement neutres : ils visent bien souvent – et malheureusement – à accroître la spéculation financière et la mondialisation de l'économie, qui nuisent à la stabilité et à la prospérité de l'économie française. Dans un tel contexte, le groupe Rassemblement nationale émet de fortes réserves s'agissant de l'installation de ce centre d'innovation. Nous nous abstiendrons sur ce texte.