Intervention de Catherine Colonna

Réunion du mercredi 10 mai 2023 à 17h15
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Catherine Colonna, ministre :

Monsieur Ben Cheikh, au sujet du vote électronique, je maintiens que, dans l'ensemble, le dispositif a bien fonctionné et a permis une augmentation de la participation. Les quelques absences d'envoi de SMS relevés par le Conseil constitutionnel ne sont pas imputables au ministère de l'Europe et des affaires étrangères, mais aux opérateurs télécoms. Aucun électeur n'a heureusement été empêché de voter et, lors des récentes élections partielles, le processus a bien fonctionné. Nous espérons que cette difficulté est derrière nous, mais là aussi, l'essentiel du suffrage exprimé est venu du vote électronique. Je pense que nous pouvons considérer qu'il s'agit d'une bonne chose pour la démocratie.

Le budget Action extérieure de l'État et les bonnes nouvelles qui ont accompagné les États généraux sont en cours d'examen. Certaines transformations sont déjà engagées par mon administration et nous avons réussi cette année à anticiper considérablement les nominations d'ambassadeurs. Ce matin encore, un nouveau mouvement a été validé par le conseil des ministres. C'est à la fois une bonne chose pour les agents et pour l'État.

En outre, la déconcentration budgétaire s'est accrue cette année au profit des chefs de poste, avec une possibilité pour eux, avec des seuils d'intervention raisonnables et en rendant compte à l'administration centrale, de prendre des décisions pour aider des projets. Le réseau a également vu son animation interne augmenter grâce aux États généraux de la diplomatie et au suivi que j'ai pu en faire. J'ai en effet tenu des réunions plénières avec nos ambassadeurs, notamment sur l'Afrique. Nous avons également renforcé les pilotages transversaux avec un rôle accru pour la secrétaire générale et moi-même. À la fin mars, j'ai par exemple dirigé une réunion associant tous les cadres du Quai d'Orsay, ce qui n'avait jamais été fait.

Nous essayons de mobiliser davantage notre réseau dans les régions, avec les conseils diplomatiques auprès des préfets de région. Il faut en effet rapprocher la diplomatie des territoires. Nous poursuivons cela par le lancement d'une campagne de marque employeur pour faire mieux savoir que le ministère de l'Europe et des affaires étrangères recrute. Nous obtenons de bons résultats et nous avons pu développer un appel vers les jeunes via le volontariat, que nous allons renouveler et augmenter dans le cadre des décisions prises par le conseil présidentiel du développement.

D'autres décisions seront prises dans le cadre du prochain budget. Nous continuerons le fort investissement sur l'immobilier du ministère, sujet qui avait beaucoup souffert avec les restrictions budgétaires lors des dernières années. Nous en ferons aussi beaucoup plus sur le numérique et la protection contre les cyberattaques. Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères est en effet la deuxième cible en France des cyberattaques, derrière l'Élysée. Cette situation nécessite donc des dispositifs accrus.

S'agissant des ETP, il faut éviter le saupoudrage et nous sommes en train de travailler à la mise en œuvre des quatre grands chantiers avec une méthode nouvelle. J'ai en effet demandé que l'on me présente, chantier par chantier, en coûts complets, c'est-à-dire ETP et crédits, ce que représentera la poursuite de ce chantier de façon pluriannuelle. Je procéderai ensuite aux arbitrages budgétaires nécessaires, même s'ils ne sont jamais faciles et agréables.

L'enseignement des Français à l'étranger est un sujet qui nous réunit souvent, car la pandémie avait conduit à ne plus se situer sur la trajectoire théorique. Depuis, la reprise est désormais bonne et je crois possible d'atteindre la cible. La question des financements et des accès à l'enseignement français à l'étranger induit celle du nombre des bourses. Le dispositif des aides à la scolarité a permis de soutenir près de 25 000 élèves français dans le réseau scolaire de l'AEFE. Il y a pour autant des difficultés avec la forte inflation mondiale de 2022, entraînant une hausse des frais d'écolage. Tout cela pose évidemment la question de la capacité d'emprunt de l'AEFE. Nous étudierons cette question dans le cadre des politiques prioritaires du Gouvernement et des discussions vont débuter à Bercy à ce sujet.

Vous vous interrogiez sur la possibilité d'avoir une loi de programmation pluriannuelle. Le dispositif retenu par le Président de la République et la Première ministre n'est pas celui d'une programmation, mais d'une trajectoire pluriannuelle, tant pour le budget que pour les emplois, après des années d'attrition, ce qui rendait la charge de travail insupportable au sens propre pour beaucoup d'agents de ce ministère.

Monsieur Le Fur, vous avez relevé la hausse des crédits d'aide humanitaire : la France a désormais pu entrer dans les dix premiers pays en matière d'aide humanitaire dans le monde. Nous étions en retard vis-à-vis de nos aspirations et du rôle qui doit être celui de notre pays. Il est positif que nous ayons pu progresser et nous continuons bien sûr à accompagner les grandes organisations humanitaires. Je ne manque d'ailleurs jamais de rendre visite, lorsque je me déplace, aux responsables de l'Unicef, du CICR, du PAM, etc.

Concernant le Mali, si la décision avait été prise par le gouvernement français de suspendre l'aide au développement de ce pays qui a connu un double coup d'État et qui n'a plus souhaité notre présence – nous sommes partis et nous en avons tiré les conséquences –, l'aide humanitaire était poursuivie par la France et ce sont les autorités de transition – je suis diplomate – qui ont malheureusement pris la décision de l'entraver. La situation est un peu différente au Burkina Faso et nous espérons ne pas en arriver à un tel stade, même si les derniers évènements nous préoccupent et sont une source d'inquiétude au vu de l'insécurité croissante et des tueries concernant des civils.

Le conseil présidentiel du développement, qui s'est réuni il y a quelques jours, a relevé que la politique extrêmement volontariste qui avait suivi l'élection du Président de la République en 2017 avait été couronnée de succès. Nous avions pu en effet fortement augmenter l'aide publique au développement, à hauteur de 50 % entre 2017 et 2022. La France est devenue le quatrième bailleur d'aide publique au développement du monde. Ce bon résultat contribue aux intérêts de notre pays.

La principale nouveauté porte sur le fait qu'on opère une bascule entre des indicateurs géographiques – avec les 19 pays prioritaires qui, selon la loi d'orientation d'août 2021, devaient rassembler à peu près la moitié de l'aide publique au développement et les deux tiers de l'aide passant via l'AFD – et dix objectifs, tels que la lutte contre le changement climatique ou la progression espérée de l'égalité entre les femmes et les hommes. Tous ces objectifs sont publics et tout ceci est destiné à préparer les décisions qui seront prises sous l'égide de la Première ministre dans le CICID qui devrait se réunir en juin.

La politique de l'AFD, qui n'est pas le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, a fait l'objet de beaucoup de questionnements dans le passé concernant la Chine. J'ai bien entendu vos interrogations et, dans le contexte actuel, je les partage.

Monsieur le président, je ne reviens pas sur la grève du 2 juin 2022, dont je pense qu'elle était décidée avant ma nomination au Gouvernement. Je préfère me concentrer sur ce qui a pu suivre, c'est-à-dire peut-être un travail de fond nécessaire pour ajuster les moyens et missions du ministère et de bons résultats à la suite des États généraux de la diplomatie.

La réforme de la haute fonction publique a été effectuée et elle n'affecte pas la nécessité d'avoir des professionnels compétents ni le pouvoir de nomination qui demeure celui du ministre.

Monsieur le rapporteur général, beaucoup de choses ont été faites relativement à France Consulaire. Nous avons mis en place une plateforme de réponse aux appels des Français de l'étranger, car il y avait des difficultés pour répondre aux besoins de nos compatriotes. Elle est accessible depuis 24 pays de l'Union européenne et nous ambitionnons que tous les pays de l'Union européenne puissent y avoir accès à la fin de l'année, ce qui permettrait d'atteindre une couverture de 47 % des Français de l'étranger. Le plan de déploiement se poursuivra en 2024 avec les pays situés sur le même fuseau horaire. Le taux de satisfaction s'élève d'ailleurs à plus de 90 % pour les réponses apportées.

La question des Américains « accidentels » est technique et bien documentée : je vous propose donc de vous faire une réponse manuscrite, car le sujet n'est pas assez connu de moi.

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