La mission Action extérieure de l'État correspond environ à la moitié des crédits du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et a représenté 0,52 % du budget général de l'État en 2022. L'exécution des crédits de la mission s'est effectivement élevée à 3,04 milliards d'euros, soit un montant de dépenses assez proche de la prévision de la loi de finances initiale.
Le vote électronique offre une meilleure participation de nos compatriotes, mais vous me permettrez d'être plus nuancé quant au succès de son organisation en 2022. Tout d'abord, l'année 2022 a été marquée, le 2 juin, par une grève inédite depuis une vingtaine d'années. Elle a eu lieu en réaction à la décision de mettre en extinction les deux corps de diplomates. J'estime que ce mouvement social d'ampleur a aussi été un révélateur du mal-être important qui règne chez les agents du ministère, très éprouvés par des années de réduction d'effectifs. Je rappelle que 2 850 emplois ont été supprimés entre 2007 et 2021 et que, sur une trentaine d'années, les effectifs ont été réduits de moitié. C'est aussi en 2022 qu'ont été lancés les États généraux de la diplomatie, dont les conclusions ont été remises en mars dernier et considèrent qu'après des décennies d'attrition le statu quo n'est plus possible.
Vous avez parlé, madame la ministre, des annonces du Président. Pourriez-vous indiquer devant notre commission comment se traduira, d'un point de vue budgétaire, cette augmentation pour la mission budgétaire Action extérieure de l'État et quelle serait la clé de répartition des 700 ETP annoncés ?
Je souhaite également que nous puissions porter une attention toute particulière à nos Instituts français. La question de leur financement se pose aujourd'hui. Si le fonctionnement est généralement assuré grâce aux moyens alloués par l'État, la programmation culturelle qui en est leur cœur de métier dépend essentiellement de leur capacité à générer des recettes localement. Comment déployer, dès lors, une politique culturelle autonome répondant à des objectifs d'influence, si celle-ci dépend pour son financement de facteurs externes locaux ? À un moment où nous avons besoin de vecteurs d'influence pour lutter contre les tentatives de désinformation d'États étrangers, le financement de nos Instituts, et notamment de leur programmation, me paraît être un impératif.
Concernant l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), je m'interroge sur la soutenabilité de ce vecteur indispensable à notre influence. En mars 2020, le Président de la République a présenté un plan pour la francophonie qui ambitionne de doubler le nombre d'élèves accueillis d'ici 2030. Madame la ministre, pensez-vous que cet objectif est encore envisageable ? La subvention de l'AEFE s'est élevée à 424 millions d'euros en 2021 et à 420 millions d'euros en 2022 ; elle s'élèvera à 417 millions d'euros en 2023 si on retraite les 30 millions d'euros supplémentaires ponctuellement alloués. Au vu de l'absence d'augmentation du budget, vous comprendrez que je demeure sceptique.
Je rappelle également que notre réseau d'enseignement à l'étranger souffre d'une impasse face à la difficulté d'investir dans l'immobilier en raison de ses limitations d'emprunt. In fine les charges d'investissement, le coût de l'inflation – 8 % sur les EGD en 2022 et 6 % sur les établissements partenaires – et l'effet de change reposeront sur les droits de scolarité acquittés par les familles. Je rappelle que ces derniers ont déjà augmenté de 42 % en dix ans : jusqu'où irons-nous ?
À ce propos, j'attire votre attention, madame la ministre, sur la situation des élèves boursiers au sein du réseau de l'AEFE. J'observe une légère baisse du nombre de ces élèves en 2022, soit moins 54, alors que le nombre d'enfants scolarisés a augmenté entre 2021 et 2022. Comme les années précédentes, la soulte a été mise à contribution pour compléter la dotation aux bourses. Il nous faut urgemment rassurer les familles pour les ramener vers le système de bourse. Aujourd'hui, des élèves sont sortis du réseau, car les familles ne peuvent payer le reste à charge. En outre, le développement du réseau sans augmentation du plafond d'emploi mènera nécessairement à une explosion des frais de scolarité dans les années à venir. Ce n'est ni souhaitable ni tenable. Madame la ministre, que comptez-vous faire pour les familles qui n'ont plus les moyens de payer les restes à charge des frais de scolarité et qui sont donc contraintes de retirer leurs enfants du système scolaire français à l'étranger ?
Enfin, dans un contexte de forte augmentation des budgets des ministères régaliens – justice, défense, intérieur – et en plein examen d'une nouvelle LPM 2024-2030 à 413 milliards d'euros, n'est-il pas le moment pour le MEAE d'obtenir de Bercy une augmentation sensible de son budget afin de pouvoir réellement parler de réarmement de notre diplomatie et de mettre en place une loi de programmation de la diplomatie au niveau de notre ambition ?