Mme la secrétaire d'État ayant présenté l'essentiel de la première partie du rapport de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi, je ne vous infligerai pas un discours en partie identique et je n'utiliserai pas l'entièreté de mon temps de parole. Je veux préciser simplement que nous avons souhaité saisir l'occasion de l'examen de ce texte pour entamer un débat sur les réponses à l'inflation – j'y reviendrai – et que j'ai choisi, par conséquent, de séparer mes deux fonctions, celle de rapporteur, que j'occupe à cet instant, et celle de député du groupe LFI – NUPES, que je reprendrai tout à l'heure dans la discussion générale.
En complément des propos de Mme la secrétaire d'État sur les deux accords conclus entre la France et la BRI, je veux, à ce stade, ajouter que leurs conséquences seront limitées. Le nouveau centre ne devrait accueillir qu'une quinzaine de personnes à Paris, dont seulement quatre agents permanents, deux étant issus de la Banque de France et au moins un de la BRI.
On nous dit que ces accords représentent une opportunité pour l'attractivité financière de la France ; encore faut-il s'entendre sur les retombées de cette attractivité pour l'économie productive et donc la création d'emplois. Notre avis diverge radicalement de celui du Gouvernement sur ce point. En refusant la procédure d'examen simplifiée pour ce texte, nous avons permis qu'un débat ait lieu. J'y reviendrai donc dans la discussion générale.
Pour conclure – déjà ! –, j'insiste sur le fait que nous avons besoin d'une réglementation monétaire et financière renforcée au niveau international. Les députés du groupe LFI – NUPES ne sont évidemment pas opposés au principe de l'existence d'une institution comme la BRI, chargée de l'application des accords de Bâle III, qui ont timidement encadré certaines activités bancaires à partir de 2010. Cette réponse minimale était incontournable pour sauver le système bancaire, raison pour laquelle même les plus libéraux s'y sont résolus. Plus récemment, la BRI a rappelé que les cryptomonnaies non adossées à une banque centrale constituaient une impasse – on ne peut qu'être d'accord lorsqu'on observe l'explosion des bulles spéculatives que certaines alimentent. Le pôle d'innovation de Paris permettra sans doute d'approfondir ces sujets cruciaux et nous nous en félicitons.
Toutefois, j'y reviendrai dans la discussion générale, l'innovation doit aller beaucoup plus loin. On pourrait même imaginer que notre dure réalité conduise à remettre en question le dogme néolibéral élaboré à partir des années 1970 selon lequel l'inflation est provoquée par une boucle salaires-prix – la hausse des salaires – alors qu'elle est avant tout, pour nous et pour un grand nombre d'économistes, le fruit d'une boucle pénurie-profits. La BRI relaie auprès des banques centrales l'idée selon laquelle la lutte contre l'inflation ne doit surtout pas entraîner une augmentation des salaires. Ce choix infondé risque de provoquer une grave récession.
Vous l'aurez compris, je ne peux pas oublier, en tant que rapporteur, que mon groupe ne partage pas, sur le fond, les principales préconisations macroéconomiques de la BRI. Nous ne pouvions donc pas accepter que l'adoption du projet de loi intervienne dans le cadre d'une procédure d'examen simplifiée, c'est-à-dire sans débat. Ce texte n'est pas technique. Il faut perdre l'habitude de penser que les traités internationaux le sont forcément et qu'ils peuvent, dès lors, être adoptés sans débat. En l'occurrence, l'accord de siège et de l'accord de sécurité sociale entre la France et la BRI renvoient à des enjeux et donc à des choix politiques, qu'il est de notre devoir de porter à la connaissance du peuple souverain. Nous ne ferons cependant pas obstacle à leur ratification et nous nous abstiendrons : d'une part, parce que, je l'ai dit, leur portée est limitée ; d'autre part, parce que nous opposer aux droits sociaux des travailleurs de la nouvelle antenne parisienne de la BRI n'aurait pas de sens.