Je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole sur ce sujet, qui nous interroge sur la manière de traiter les acteurs du numérique dans la vie quotidienne de nos concitoyens et sur la place que nous devrions ou non leur accorder. Je reviendrai sur ce sujet présenté, malheureusement, de manière très binaire alors que l'enjeu est plutôt celui de la régulation.
Mes deux domaines d'expertise en arrivant à l'Assemblée, et sur lesquels j'ai exclusivement travaillé durant cinq ans, étaient l'éducation et le numérique, dont j'ai notamment traité au sein de la commission des lois que j'ai rejointe en 2014.
J'ai été rapporteur de la loi sur la dématérialisation du Journal officiel, de la loi pour une République numérique et de la transposition de la directive sur la réutilisation des informations du secteur public (PSI). Je suis également auteur d'un rapport sur les smart cities et j'ai dirigé un groupe d'études sur les drones.
Durant trois ans, j'ai quotidiennement vécu avec l'ensemble des acteurs du numérique, tous confondus – non seulement les « Gafam », mais également des associations. La loi sur l' open data et la transposition de la directive PSI a notamment été l'objet de débats importants sur la transparence.
Le Parlement ne comptait à cette époque que peu d'experts sur ce sujet, la plupart s'intéressant d'ailleurs au secteur des télécoms, compte tenu d'enjeux importants à l'époque sur le développement de la fibre, etc.
Je n'ai plus aucune activité politique et ne souhaite plus tenir de commentaire sur la vie politique locale ou nationale, bien que je suive avec intérêt le travail de l'Assemblée nationale. J'ai conservé quelques activités pro bono sur des sujets numériques, en réponse aux sollicitations de la Direction générale des entreprises (DGE), de la Caisse des dépôts et de l'ONU Habitat, sur des enjeux liés à la transparence, aux données personnelles ou à l'accessibilité.
À l'époque, ne traitant que de sujets numériques, mes relations avec le ministère de l'Économie et le secrétariat d'État au Numérique étaient constantes. J'ai mené un très grand nombre d'auditions publiques dans le cadre des projets de loi dont j'ai été rapporteur ou de mon rapport sur les smart cities, avec des acteurs comme Heetch, Google, Uber, Blablacar, Amazon ou encore Facebook. J'ai aussi participé à un club parlementaire numérique avec des députés et des sénateurs qui se réunissait toutes les trois semaines, dont les trois quarts des membres étaient des acteurs du numérique, nationaux et internationaux, au sens large. La plupart d'entre eux étaient accompagnés de lobbyistes – ou d'influenceurs, selon le terme qui prévalait à cette époque.
Ce travail s'est déroulé en toute transparence : je communiquais, y compris sur les réseaux sociaux, l'ensemble de mes auditions. L'essentiel de mes rendez-vous étaient indiqués sur mon agenda mais toutes ces rencontres autour du numérique étaient publiques. Chaque semaine, je recevais plusieurs acteurs, toutes natures confondues : associations, associations d'élus, acteurs privés français et internationaux du secteur. Je revendiquais la transparence de ces relations. En effet, il me semblait que pour bien légiférer, il convenait d'entendre tous les avis, aussi partagés, voire, opposés soient-ils.
J'étais favorable à une régulation des acteurs du numérique plutôt qu'à leur simple interdiction. À cette époque, le niveau de service des taxis était bien éloigné de celui que nous connaissons désormais : les taxis n'acceptaient presque jamais la carte bancaire et n'avaient pas de monnaie. En région, il était très difficile de trouver un taxi. C'est alors qu'un acteur disruptif est arrivé sur le marché, avec un niveau de service bien supérieur. Aujourd'hui, la situation s'est inversée : les Uber rendent un service médiocre tandis que les taxis se sont largement améliorés.
Concernant le sujet des amendements, les parlementaires recevaient chaque jour des dizaines d'amendements sur leur boîte mail de l'Assemblée : ils se sont comptés en milliers lors de la loi sur le mariage pour tous. La loi sur la croissance et l'activité a aussi fait l'objet de propositions massives, d'ailleurs émises en majorité par des notaires.
J'ai toujours adopté une pratique très transparente : quand je déposais un amendement, qu'il ait été travaillé avec mon équipe, un acteur du numérique, un collaborateur du groupe ou un administrateur, c'était le mien, et il reflétait mon avis. C'était bien le cas sur les VTC, car j'avais toujours assumé vouloir plus de libertés pour ce secteur.