Intervention de Mireille Clapot

Réunion du mercredi 24 mai 2023 à 14h00
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMireille Clapot :

Madame Le Pen, vous êtes une très bonne oratrice et une bonne avocate : vous plaidez votre cause avec beaucoup de talent. Mais il faut être rigoureux et j'aimerais rappeler quelques faits.

L'ingérence est un phénomène assez subtil : les experts que nous avons auditionnés au début de nos travaux nous ont bien expliqué qu'il n'y a pas de contrat dans lequel on formalise qu'en échange de tant de millions, on attend tel service. Il s'agit bien plutôt d'un renvoi d'ascenseur.

Je veux rappeler les étapes qui ont fait du président Poutine un autocrate, n'hésitant pas à violer les droits humains. Il y a eu d'abord la révision constitutionnelle de juillet 2020. Approuvée par référendum, elle a donné tous les pouvoirs, jusqu'en 2036, à Vladimir Poutine. L'année 2020 a aussi été marquée par la tentative d'empoisonnement d'Alexeï Navalny. Rentré en Russie en janvier 2021, il a été emprisonné. Je voudrais rappeler aussi l'affaire Delpal : un citoyen français a été inculpé, à son corps défendant, mis en prison, puis assigné à résidence et condamné par une justice aux ordres. En septembre 2021, au moment des élections, la Russie a cherché des experts pour les légitimer. Elle a notamment fait appel à des personnalités d'extrême droite, parmi lesquelles on comptait plusieurs députés européens de votre parti : Thierry Mariani, Jean-Lin Lacapelle, Nicolas Bay, Hervé Juvin, Frédéric Boccaletti, ou encore Stéphane Ravier. Ces observateurs n'étaient pas envoyés par Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), mais accrédités par la Russie.

Quelques mois plus tard, lorsque la Russie a envahi l'Ukraine, l'Union européenne a fait preuve de courage et a fait voter plusieurs résolutions. Or on a pu constater que les députés du Rassemblement national n'étaient pas toujours en phase avec la position française. Ils ont quand même condamné l'agression et voté pour la collecte de preuves sur les crimes de guerre, mais ils se sont abstenus sur un certain nombre de résolutions – sur le soutien financier ou la condamnation de certaines pratiques. Je vous renvoie aux explications de vote de M. Mariani.

À partir de 2020, quand on sent que la Russie est en train de basculer, la plupart des politiques français prennent du recul vis-à-vis d'elle. Or ce n'est pas le cas de votre parti. On en vient donc à soupçonner un renvoi d'ascenseur, en contrepartie, par exemple, d'espèces sonnantes et trébuchantes. On soupçonne que votre parti se sent redevable vis-à-vis de la Russie et du régime de Poutine.

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