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Intervention de Max Dubois

Réunion du jeudi 13 avril 2023 à 15h30
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Max Dubois, ancien conseiller spécial du ministre délégué chargé des outre-mer :

Ils ont droit, comme toutes les entreprises, à tous les subsides relevant des premier et deuxième piliers de la politique agricole commune : le Fonds européen de développement régional, le Fonds européen agricole pour le développement rural ou le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, c'est-à-dire l'ensemble des fonds disponibles en matière de dynamisation. Quand on crée une usine de yaourts par exemple, on peut aller chercher dans tous les fonds disponibles ainsi que dans le Posei, selon qu'il s'agit d'investissements dans les machines ou dans les bâtiments.

Personne ne compile les montants. Bercy sait, bien sûr, mais c'est couvert par le secret. Le secret des affaires, il en faut : n'étant pas l'affreux gauchiste qu'on vilipende souvent, je considère qu'il est nécessaire. Je veux juste limiter la voracité.

Il y a des choses qui se remarquent. J'ai été beaucoup troublé par un fait qui révèle, sinon une entente, du moins une complicité extraordinaire : la marraine du magnifique bateau qui a été fabriqué pour CMA CGM, il y a quelques années, celle qui a cassé la bouteille de champagne, était Mme Hayot. Cela me choque de voir qu'un transporteur puissant dans les outre-mer a autant de proximité avec le groupe Hayot. Je ne sais pas combien celui-ci paie ses conteneurs : il a peut-être des accords. Je n'en sais rien, mais on peut le supposer, puisque ces acteurs s'entendent si bien que Mme Hayot, dont je n'ai pas le souvenir qu'elle ait des fonctions dans le groupe, joue ce rôle publiquement – des photos ont été publiées. Je m'interroge tout autant quand je vois mon ex-ministre passer autant de moments de convivialité avec MM. Hayot et Saadé. Y a-t-il une entente ? Je n'en sais rien, mais tout cela existe. C'est à eux qu'il faudrait poser la question.

Au moment où j'ai été viré, j'ai dit qu'il faudrait créer une commission pour mieux connaître les monopoles et oligopoles et établir la part économique de chacun des gros opérateurs. Je pense que la clef est là. Je crois que vous avez la capacité, en tant que députés, à descendre dans les comptes de ces très grandes entreprises et aller voir leurs marges. Sauf pour CMA CGM, qui est obligée de publier ses comptes, on ne sait rien ! Or le groupe Hayot doit compter 130 ou 140 filiales : il faut s'amuser à compiler… Nous l'avons fait à l'époque où je présidais R&DOM, en recoupant les administrateurs et en essayant de comprendre qui est qui. C'est très compliqué. Je pense que la représentation nationale aurait là un motif pour créer une deuxième commission d'enquête, chargée de déterminer qui sont les grands bénéficiaires de l'économie dans les territoires ultramarins et qui sont les amis dans les ministères qui les aident.

Je ne crois pas qu'il y ait de corruption, je le dis avec beaucoup de sincérité. Je crois qu'il s'agit simplement de copinage, et d'une doxa : il faut des champions, et il n'y a qu'eux qui savent ; sans eux, ce sera le bazar et comme on n'a pas très envie qu'il y ait une rupture dans l'approvisionnement en alimentation, des magasins fermés, des avions cloués au sol et je ne sais quoi d'autre, on ne prend pas de risque.

Tout le monde sait que le système est un peu bancal, mais on le garde, pour la simple raison que le pouvoir central ne fait pas confiance aux ultramarins. Être ultramarin, aujourd'hui, c'est susciter de la défiance. Cela aussi est inacceptable. Quand vous arrivez, vous êtes pris d'un peu haut. Dans mes amis ultramarins, il y a des docteurs, des comptables, des écrivains ou de grands chefs d'entreprise – mais ils sont d'abord ultramarins. Je ne vais pas plus loin car j'ai promis que je n'entrerais pas dans l'identitaire.

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