Nous sommes le 23 mai, journée nationale en hommage aux victimes de l'esclavage, aux 4 millions de personnes qui, dans les colonies françaises, pendant plus de deux siècles, ont subi la traite négrière. Ce même 23 mai, en 1998, plus de 40 000 personnes ont défilé dans les rues de Paris pour honorer la mémoire des victimes de l'esclavage, immense mobilisation populaire qui contribua dans une large mesure à l'adoption de la loi du 21 mai 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de l'esclavage en tant que crime contre l'humanité, dite loi Taubira.
Avant de participer aux cérémonies d'hommage, je profite de l'occasion offerte par cette séance de questions orales pour rappeler dans cet hémicycle l'engagement qu'a pris le Président de la République, le 27 avril 2018, de faire procéder à l'érection d'un mémorial national en hommage aux victimes de l'esclavage colonial, implanté dans le jardin des Tuileries et portant le nom des 200 000 esclaves affranchis. Ce projet fut accueilli avec ferveur par les familles de descendants, les 120 associations mémorielles et les 10 000 signataires de la pétition dénonçant l'esclavage comme crime contre l'humanité. Toutefois, cinq années ont passé et ce monument n'existe toujours pas.
Soutien indéfectible du combat mené par les descendants d'esclaves, la ville de Saint-Denis, située dans ma circonscription, est la première à avoir accueilli un mémorial aux victimes de l'esclavage, œuvre réalisée par l'artiste dionysien Nicolas Cesbron, inaugurée il y a dix ans, jour pour jour, le 23 mai 2013. Depuis, chaque année, c'est devant cette stèle que nous rendons hommage aux victimes.
Préoccupé par les délais de mise en œuvre de l'engagement présidentiel, j'ai déposé régulièrement ces dernières années des questions écrites à ce sujet. Pour la dernière, rédigée en octobre 2022 à votre intention, monsieur le ministre délégué chargé des outre-mer, j'ai reçu une réponse de la part de Mme la ministre de la culture qui m'a laissé pantois. Mme Abdul-Malak justifie ce retard en avançant plusieurs raisons. La parcelle prévue pour l'implantation aux Tuileries serait trop petite, alors même que le choix de cet emplacement avait reçu l'aval de l'architecte du Louvre. Elle souligne aussi que les projets présentés par les artistes dans le cadre de l'appel à candidatures lancé en 2020 par le ministère de la culture n'ont pas été validés par les personnalités concernées et les associations. Mais comment aurait-il pu en être autrement ? La condition sine qua non de faire figurer les noms des 200 000 esclaves affranchis par le décret d'abolition n'a pas été respectée ! En avril dernier, j'ai donc adressé au Président de la République une lettre pour exprimer mon inquiétude.
Cela fait maintenant six ans que les familles et les associations attendent de pouvoir se recueillir devant ce monument. Pouvez-vous me rassurer sur les intentions de votre ministère et me faire part du calendrier fixé pour que ce mémorial soit enfin érigé à l'emplacement convenu avec les familles ?