Depuis mon élection en juin 2022, je suis sollicitée chaque semaine par des habitants de ma circonscription de Seine-Saint-Denis au sujet du logement social et de l'hébergement d'urgence. Mes équipes et moi-même avons traité près de cent demandes : nous nous activons, nous écrivons courrier sur courrier aux offices publics de l'habitat (OPH), aux bailleurs sociaux et à la préfecture. En vain.
Tenez-vous bien : à ce jour, la seule situation qui a été débloquée concernait une dame qui avait reçu une balle perdue dans son appartement. Une balle perdue… Il faut donc en arriver là, à ce terrible niveau de traumatisme, pour espérer voir sa demande aboutir ! Mais alors, qu'en est-il des familles nombreuses qui s'entassent dans une seule pièce, des personnes reconnues prioritaires au regard du droit au logement opposable (Dalo) qui ne se voient proposer aucune solution et des sans-abri, qui appellent tous les jours le 115 ? Que faites-vous ?
Monsieur le ministre délégué, je souhaite vous alerter sur un autre problème : celui des maires qui ont tendance à octroyer des appartements selon des critères politiques. Lorsque les demandeurs les soutiennent, leur dossier se retrouve en haut de la pile ; à l'inverse, ceux qui ne les soutiennent pas sont exclus du service public du logement. Je rencontre ce problème dans la ville de Drancy, dans ma circonscription.
Les chiffres sont alarmants : en Seine-Saint-Denis, 118 000 demandes de logement social ne peuvent être satisfaites. Selon la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (Drihl) d'Île-de-France, en 2021, le délai médian pour accéder à un logement social en Seine-Saint-Denis était de deux ans et neuf mois ; mais 21 % des ménages demandeurs attendent entre trois et cinq ans et 26 % attendent plus de cinq ans.
La situation de l'hébergement d'urgence est catastrophique. Interlogement 93, qui gère le service intégré d'accueil et d'orientation (SIAO) du département, vous alertait déjà fin 2022 : sur les 739 demandes de mise à l'abri reçues le lundi 28 novembre, aucune n'avait pu être satisfaite – zéro sur 739 ! Plus récemment, le 27 avril 2023, l'association se disait très inquiète de la progression des demandes non pourvues dans le département et annonçait une augmentation de 138 % de ces demandes par rapport à la même date en 2022. Parallèlement, selon la base de données Lovac (logements vacants), près de 45 000 logements du parc privé sont vacants en Seine-Saint-Denis, dont 3 700 dans ma circonscription.
Le 10 mai, nous avons tous lu dans Challenges l'interview du Président de la République, qui a parlé d'un double choc en réponse à la crise du logement. Il n'a en revanche eu aucun mot sur le logement social. Arrêtez avec votre communication du choc et agissez ! Derrière tous les chiffres cités, il y a des familles, des enfants, de vraies personnes, qui sont logées dans des conditions indignes ou qui n'ont même pas de toit sur la tête. Ces personnes n'ont pas le temps d'attendre un choc de communication : il faut réquisitionner les logements vacants et ouvrir des places d'hébergement en urgence !