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Intervention de Sébastien Lecornu

Réunion du jeudi 11 mai 2023 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Sébastien Lecornu, ministre :

Un rapport annexé comme celui-ci ne permet pas de montrer le lien entre le tableau des contrats opérationnels, que nous avons examiné hier très rapidement, et le tableau des capacités.

La cible de 200 chars Leclerc est confirmée. La LPM de 2018 prévoyait 200 chars rénovés, soit 100 % du parc. Je vous propose 80 % de rénovation, c'est-à-dire 160 chars, et 20 % de chars non rénovés. Nous avons, je le rappelle, trois régiments de cavalerie blindée – à Verdun, Olivet et Mailly-le-Camp –, ce qui représente globalement trois fois soixante chars, et il y a aussi des chars Leclerc aux Émirats arabes unis.

On ne peut pas détacher le parc global, organique, de ce que nous souhaitons en matière de projection. La vraie transformation de cette LPM, et elle est majeure, c'est d'être capables de projeter seuls une division, de deux brigades, de l'armée de terre au complet, toutes fonctions comprises – soutien, service de santé et stocks de munitions. Jusqu'à présent, on a diminué les moyens des armées en essayant de conserver une cohérence. Nous devons maintenant essayer de gérer leur croissance. Dans cette perspective, soit on travaille sur la cohérence organique, soit on part de la possibilité d'envoyer, si le Président de la République ou le Parlement le décide, un corps expéditionnaire, ce qui représente un niveau de mobilisation important – peu de pays sont capables, en Europe et dans l'Otan, d'envoyer une division –, en raisonnant à coûts complets.

Cet objectif de pouvoir déployer une division, c'est-à-dire deux brigades et deux régiments de chars Leclerc, comprenant chacun soixante chars, a pour horizon 2027. Quand on part de la projection, la question est de savoir pour quelles guerres et pour quelles missions. Il n'y aura pas forcément un accord avec les parlementaires qui sont contre la dissuasion nucléaire – quand on n'en a pas, il faut un parc conventionnel différent. Par ailleurs, si on veut aller au-delà d'une division projetée, ce qui est énorme, il faut expliquer à quoi cela servirait, pour quelle guerre et pour quel emploi. Je précise à ce sujet que les chars Leclerc n'ont été déployés que deux fois : au Kosovo et au Liban – quinze chars, qui n'ont jamais tiré, dans le premier cas, et treize chars dans le second cas.

Il faut également avoir en tête, s'agissant du rythme de rénovation, le tuilage à venir avec le char du futur. Il faudra en établir le portrait-robot d'ici à 2027-2028 – on verra à quelle échéance le Parlement fixe la revoyure.

Ce que je vous propose, c'est de la cohérence et non un renoncement. Il s'agit d'être capable de rénover à l'horizon 2027 l'ensemble des chars Leclerc nécessaires pour armer une division de deux brigades. On ralentit un peu la rénovation, car c'est la capacité de mettre les chars sur le terrain qui compte. En même temps, on réfléchit à ce que sera le char du futur et à la rénovation des 20 % restants. Pour moi, ils seront aussi rénovés, parce que le char du futur arrivera plus tard : la fin de la rénovation devrait avoir lieu au début des années 2030.

L'autre pari que la représentation nationale peut faire, mais ce n'est pas ce que je lui propose, c'est de préférer la cohérence organique, d'une façon peut-être plus scolaire, ce qui n'est pas péjoratif, et donc de se détacher de la cohérence opérationnelle.

Toutes celles et ceux qui ont assisté à Orion récemment ont vu ce que sont une division et un état-major de division projetés. Mon pari, et j'espère que j'arriverai à vous convaincre de me suivre, c'est d'arrêter de partir des tableaux pour se réintéresser plutôt à ce que sont la réalité et la finalité militaires. C'était d'ailleurs un peu le sens de la question de M. Lachaud hier soir au sujet des réservistes.

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