Intervention de Christophe Naegelen

Réunion du mardi 9 mai 2023 à 21h05
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Naegelen :

Face au risque du retour des conflits à haute intensité, une grande partie de nos voisins européens et de nos alliés sont entrés dans une course à l'armement. Les budgets de défense augmentent et la constitution de stocks stratégiques s'accélère : plus qu'une compétition entre voisins, nous évoluons dans un espace international grevé par les concurrences économiques et traversé par des rivalités géopolitiques. La question principale est : sommes-nous à la hauteur ? La quatorzième LPM nous offre l'opportunité de répondre par l'affirmative.

Nous l'avons constaté au fil des auditions de notre commission, il est indispensable de donner un souffle nouveau aux armées pour répondre à ces enjeux. Ne nous y trompons pas, il y aura des arbitrages difficiles et nos choix engageront la nation pour des décennies, bien au-delà de 2030. Notre cap doit être de donner aux militaires des moyens à la hauteur de leur engagement. Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires tient à réaffirmer son attachement aux armées et aux soldats, qui assurent notre sécurité au quotidien. L'effort budgétaire de défense est là : 413,3 milliards sur sept ans représentent une somme substantielle, et notre groupe salue cette volonté de transformer nos armées. Cependant, il faut relativiser ces effets d'annonce car ce total reprend une partie des crédits inscrits dans la présente LPM, qui court jusqu'en 2025 et que l'inflation rogne. L'exécution annuelle de cette trajectoire constituera un défi : nous rejoignons pleinement les critiques du Conseil d'État et du HCFP, qui relèvent que les marches annuelles les plus hautes, de l'ordre de 4,3 milliards, sont prévues à la fin du quinquennat, ce qui fait peser de nombreux aléas sur la capacité du Gouvernement à mener à bien une mise en œuvre sincère de cette loi de programmation.

Le cap est ambitieux, mais comment le tenir compte tenu du niveau de la dette et de l'accélération de la hausse des taux, couplés à la dégradation de la note financière de la France par l'agence Fitch ? En outre, notre groupe alerte à nouveau la commission sur le manque d'information sur les 13,3 milliards d'euros de ressources extrabudgétaires. Cette somme est loin d'être négligeable, et nous défendrons des amendements destinés à clarifier la situation et à obtenir une meilleure trajectoire pour les armées.

La mise en œuvre de la LPM devra également être l'occasion pour le Parlement de se réapproprier la défense nationale. Telle est la ligne que notre groupe entend suivre. Nous jugeons insuffisante la clause de revoyure prévue car, en l'état, elle ne se traduirait que par un simple débat. Nous proposerons des amendements visant à imposer une véritable actualisation législative. Dans le même sens, nous soutiendrons des amendements tendant à renforcer le pouvoir de contrôle des commissaires de la défense sur l'action du ministère des armées et sur l'exécution de la LPM.

D'autres mesures appellent des précisions, toujours dans l'intérêt de nos armées et de nos soldats. Je pense en particulier à la clause anti-inflation, censée permettre l'octroi de crédits supplémentaires en cas de hausse du prix des carburants opérationnels ; en l'état, cette clause est obscure et n'apporte pas de réponse efficace. Nous défendrons donc des amendements visant à la renforcer.

Autre sujet qui nous tient à cœur, l'engagement de nos armées dans les territoires ultramarins. Il est nécessaire d'assurer la continuité territoriale de notre défense : ces moyens sont nécessaires pour protéger les citoyens ultramarins et surveiller notre ZEE. Nous invitons le Gouvernement à inclure un angle ultramarin dans la LPM : en dépit des annonces, le rapport annexé est relativement pauvre sur le sujet. Nous saluons le choix de consacrer 13 milliards d'euros sur la période de la LPM à la souveraineté outre-mer, au travers notamment du renforcement capacitaire des forces chargées de cette mission. Nous avons alerté le Gouvernement sur la situation particulière de l'océan Indien : nous appelons à consolider les moyens des forces armées dans la zone sud de cet océan, afin de garantir la protection du territoire et d'assurer la coopération entre La Réunion et Mayotte.

Enfin, les ambitions de la LPM ne pourront être tenues qu'à condition d'offrir un cadre optimal aux armées : notre groupe appelle votre attention sur le déploiement du deuxième plan « famille », qui, présenté en février dernier et doté de 750 millions d'euros, est le grand absent de ce texte ; ce dernier ne le mentionne qu'à une reprise et ne dissipe aucun flou relatif à son enveloppe et à son décaissement annuel. Nous défendrons, là aussi, des amendements visant à combler ce manque.

Cette LPM doit être l'occasion de mettre l'accent sur les droits des militaires : il faut renforcer leurs soutiens mais également mieux communiquer sur ceux-ci. Ces mesures sont loin d'être accessoires car elles permettent de fidéliser les effectifs et de rythmer la vie quotidienne des militaires et de leurs familles. Nous reconnaissons les efforts menés par le ministère sur le sujet, mais nous appelons à les poursuivre et à mieux associer les collectivités locales, afin de répondre plus efficacement aux besoins concrets des familles des militaires.

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