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Intervention de Laurent Jacobelli

Réunion du mardi 9 mai 2023 à 21h05
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLaurent Jacobelli :

Dans ses vœux aux armées, le président Macron a dressé une série de constats plutôt justes, reconnaissons-le, concernant notamment le retour de la guerre conventionnelle et la nécessité de transformer nos armées. Il a annoncé en regard un budget de 400 milliards d'euros pour la période 2024-2030. Dont acte.

Force est de constater que, si le PLPM contient de bonnes choses, il comporte aussi des effets d'annonce. La plus grande part des marches budgétaires est reportée à après 2027 – comme c'est curieux ! Il n'est pas assez tenu compte de l'inflation. Les recettes extrabudgétaires annoncées nous paraissent largement surestimées. Cela étant, nous venons de recevoir un courrier du ministre que je lirai avec attention.

Soyons honnêtes : tout n'est pas à écarter dans ce texte. Certaines dispositions nous semblent même aller dans le bon sens. Il en est ainsi de la priorité accordée à la dissuasion nucléaire, engagée sous l'impulsion du général de Gaulle et devenue l'un des piliers de notre souveraineté et de notre défense. Le Rassemblement national militant depuis longtemps en faveur de la sanctuarisation du porte-avions de nouvelle génération indispensable pour garder la maîtrise de notre destin par-delà les océans, nous approuvons le maintien de ce programme.

Sur d'autres points, nous attendons de voir comment vont évoluer les débats. Ainsi, alors que le contexte international nécessiterait de revoir à la hausse le format de nos armées, celui-ci demeure globalement inchangé. Une guerre conventionnelle impliquerait d'importantes pertes humaines et matérielles, tout le monde le sait : pourquoi ne pas préparer nos armées en conséquence ?

Pour justifier ces choix capacitaires, la majorité utilise un élément de langage : la « cohérence ». Mais où est la cohérence quand la marine nationale ne disposera en tout et pour tout que de quinze frégates alors que notre souveraineté est menacée dans l'Indo-Pacifique, quand vous vous entêtez à poursuivre, par pure idéologie, des coopérations industrielles européennes telles que le système de combat aérien du futur (Scaf) ou le système principal de combat terrestre (MGCS), alors qu'elles rencontrent de très graves difficultés, quand certains objectifs de l'actuelle LPM sont décalés ou revus à la baisse alors que les tensions géopolitiques ne cessent de croître, ou quand vous n'excluez pas l'achat de Himars américains pour remplacer les lance-roquettes unitaires et que vous refusez de relancer notre filière de munitions de petit calibre alors même que vous soulignez la nécessité d'une souveraineté de notre défense et d'une relocalisation d'un maximum de filières ?

Au-delà du capacitaire, il y a l'humain. Comme nous l'avons indiqué dans notre rapport, c'est là l'une des carences de la précédente LPM. Notre armée souffre d'un cruel manque de fidélisation. Le plan « famille » est utile mais insuffisant. Ce n'est pas un hasard si un tiers des militaires mettent un terme à leur contrat avant la fin et si un autre tiers ne le renouvelle pas. Les soldes sont insuffisantes. Comment pouvons-nous tolérer que des hommes et des femmes prêts à donner leur vie pour la nation doivent compter sur des primes pour vivre décemment ? La part indiciaire représente 70 % de la solde d'un militaire du rang et 55 % de celle d'un officier général. Nos militaires attendent une politique salariale ambitieuse. La fidélisation requiert une revalorisation substantielle des indices.

De surcroît, les militaires sont logés dans des conditions parfois indignes. Un quart seulement du parc immobilier du ministère des armées est en bon état. Si ce PLPM entend poursuivre les travaux de rénovation, il ne résoudra pas le problème des petits travaux, qui touche durement nos soldats dans leur vie quotidienne : vitres cassées, plomberie défaillante… Les chefs de corps doivent bénéficier d'une enveloppe budgétaire discrétionnaire pour réaliser les travaux de rénovation élémentaires.

Enfin, nous devons garantir à nos soldats un bon niveau d'entraînement. Le recours de plus en plus fréquent à la simulation ne doit pas remplacer les entraînements réels indispensables à la préparation opérationnelle des forces.

Vous le voyez, il y a du travail ! Nous espérons que l'examen de ce PLPM se fera avec intelligence, dans l'écoute des oppositions, et que nos idées et nos amendements seront acceptés. Il y va de l'intérêt supérieur de la nation. Nous verrons comment les débats évoluent. Pour notre part, nous sommes ouverts à la discussion ; nous espérons qu'il en est de même pour vous.

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