Intervention de Philippe Bouquet

Réunion du mercredi 3 mai 2023 à 11h10
Commission de la défense nationale et des forces armées

Philippe Bouquet, secrétaire général du Comité Richelieu :

J'aborderai en premier lieu les sujets de dépendance et de dualité des entreprises. En l'occurrence, cela fait longtemps que les PME/ETI ne sont plus concernées par ce problème de dépendance. Depuis le milieu des années 90, la DGA a très clairement incité les PME à être duales pour assurer leur pérennité. De fait, la plupart de nos entreprises sont toutes duales, avec une proportion d'activités de défense qui varie en fonction des activités et des moments. Le développement d'applications, de produits et de services dans le domaine civil permet aussi de répondre et de proposer des innovations au secteur de la défense, sans avoir à supporter des coûts de développement spécifiques. Le corollaire, c'est le passage à l'échelle, soit la capacité à intégrer ces technologies dans un environnement particulier, le tout dans une volonté de simplification prônée par la DGA. Nous nous inscrivons exactement dans cette optique, et nous ne sommes guère exposés à cette problématique de dépendance, dans la mesure où nos adhérents travaillent tous à la fois pour la défense et le civil.

Pour ce qui est des problèmes de compétences, nous considérons, à notre niveau, que la réserve industrielle – telle que l'on peut la comprendre aujourd'hui – peut être une idée intéressante. Néanmoins, les chefs de petites entreprises que nous restons très pragmatiques. Nous attendons ainsi de connaître les modalités pratiques de cette réserve, avec l'espoir qu'elle sera simple à mettre en œuvre. Nous craignons particulièrement les bonnes idées se traduisant par de la complexité en pratique, qui peut parfois nous faire renoncer à des dispositifs beaucoup trop complexes pour nous.

Concernant le financement, je suis quelque peu gêné, car j'ignore ce que racontent les banques ou les établissements financiers. Si je vous donne l'exemple de ma propre entreprise. les factures que j'envoie à MBDA – qui est mon client direct – sont refusées par certaines de mes banques. C'est aussi simple que cela. Je ne vous raconterai pas ce que l'on m'a dit, mais je vis cette problématique au quotidien. Sous des prétextes de conformité (compliance), le fait que MBDA fabrique des missiles m'interdit de présenter mes factures à certaines banques. Je vis cette réalité tous les jours, mais ce n'est pas une généralité. À cet égard, il serait peut-être intéressant de conduire une étude sur la réalité quotidienne vécue par les uns et les autres. Il ne s'agit pas de mettre tous les établissements bancaires ou financiers dans le même panier, et je ne doute pas qu'il existe des subtilités. Cela dit, d'une manière générale, il est de plus en plus complexe de répondre aux conditions et contraintes de financement, y compris dans les affaires civiles. Dès que vous voulez mettre un financement en place, vous vous retrouvez avec des questionnaires et des engagements à prendre qui, si nous les respections à la lettre, ne nous permettraient plus de faire grand-chose. Il existe donc un vrai sujet en la matière, qui est amplifié si l'on travaille dans le domaine de la défense.

La difficulté à se financer concerne également le haut de bilan, notamment dans le cadre de transmissions d'entreprises stratégiques. Certains fonds d'investissement sont assez réticents à investir dans le domaine de la défense. Nous pouvons toutefois saluer quelques initiatives récentes, comme celle de Weinberg Capital. Je pense aussi à Défense Angels. De son côté, la banque publique d'investissement (Bpifrance) a mis en place le dispositif Definvest. Il s'agit d'initiatives dont nous espérons la multiplication, car nous en avons besoin, le risque étant que d'autres s'intéressent à ces pépites et qu'elles échappent à des actionnaires hexagonaux.

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