Plutôt que de parler de dépendance, je parlerais plutôt de partenariat avec l'armée française, avec qui nous travaillons depuis cent vingt ans. Ce partenariat est fondamental pour développer ces notions de souveraineté, de résilience, etc. Il s'agit bien d'un socle en matière de visibilité, de programmation, etc. Comme chez Nexter et Naval Group, notre activité se répartit en moyenne de cycle à 60 % pour la France et à 40 % pour l'export. L'export est bien entendu stratégique, puisqu'il est absolument indispensable pour maintenir ce niveau global d'activité. Notre activité à l'export est plus cyclique et aléatoire, avec des hauts et des bas, mais l'accès d'Arquus au marché export n'est pas considéré comme problématique, même s'il constitue un challenge. Nous sommes en effet présents dans soixante pays utilisant quotidiennement nos matériels. La dépendance est donc un non-sujet, contrairement à la surinterprétation de certains journalistes.
Concernant les conséquences des lissages Scorpion, il va sans dire que lisser induit de produire sur une plus longue période de temps. Nous devons donc adapter nos chaînes pour qu'elles durent plus longtemps et produisent sur une durée plus longue, avec des incidences réelles mais qui ne sont pas nécessairement calculées en détail. Cela suppose également de prolonger le MCO des matériels existants, ce qui est tout à fait possible et envisageable, notamment par le biais de contrats de long terme. Néanmoins, plus les matériels anciens sont prolongés, plus les risques d'obsolescence de certaines pièces s'accroissent. À très long terme, il devient plus compliqué d'entretenir des camions âgés de 50 ans. Cela dit, il est dans la logique de nos métiers de nous adapter à ces très longs cycles. Nous sommes habitués à le faire, notamment au titre de l'entretien des véhicules de l'avant blindé (VAB) 4x4 de l'armée de Terre. Lancés en 1976, ils seront probablement encore en service, pour certains, jusqu'en 2030/2035. C'est bien notre métier – et c'est d'ailleurs un savoir-faire unique que nous souhaitons vraiment préserver – que de pouvoir gérer ces matériels dans la très longue durée.
La question des lissages Scorpion a été abordée sous l'angle de la sauvegarde du tissu industriel. Je ne peux qu'aller dans ce sens. Il est très important de parvenir à préserver ces compétences tout à fait uniques, à la fois pour produire du neuf, mais aussi pour entretenir les matériels en service dans la très longue durée. Sur cet exemple des plateformes terrestres, il sera peut-être de plus en plus difficile – c'est déjà le cas – de trouver des mécaniciens, des personnes réparant des moteurs thermiques. D'ici 2040/2050, cette denrée sera encore plus rare qu'elle ne l'est déjà aujourd'hui. Nous tâchons néanmoins de nous y préparer. C'est notre métier.