Voici une proposition de loi qui n'a aucun sens, si ce n'est de servir des calculs de basse politique. On nous propose un texte pour gêner, pour mettre dans l'embarras, pour dénoncer les choix d'untel ou untel, mais sûrement pas pour faire avancer quoi que ce soit ou pour servir une cause, si ce n'est la vôtre.
Votre texte n'est même pas une babiole, un accessoire ou une bricole, mais un simple prétexte. Il est d'un pénible opportunisme, qui ne répond à aucune nécessité. Cela pourrait être risible si l'époque n'était à l'urgence, urgence qui, manifestement, ne vous empêche pas de tremper dans de petits jeux politiciens qui ne trouveront aucun écho chez nos concitoyens mais régaleront vos partis, vos états-majors, vos clientèles, vos ego, vos petites stratégies.
Quelle urgence y a-t-il à rendre obligatoire l'accrochage du drapeau européen au fronton des mairies ? Pourquoi présenter ce nouveau texte et avoir ces nouveaux débats, alors même que vous reconnaissez, monsieur le rapporteur, qu'il ne répond pas aux défis politiques et sociaux du moment ?
Alors qu'il a été rejeté en commission, vous avez tout de même tenu à l'examiner en séance, en vous targuant de sa « portée éminemment symbolique ». N'avez-vous donc pas compris que les Français ne veulent plus de vos textes éminemment symboliques, mais qu'ils réclament simplement des réformes de fond et d'envergure ? Décidément, vous êtes sourds et aveugles !
Jeudi dernier, on apprenait que la France était le pays européen à faire payer à ses automobilistes le prix à la pompe – hors taxes diverses et variées – le plus élevé, alors que le cours du pétrole est revenu au même niveau qu'avant la guerre en Ukraine. En outre, la Commission européenne a observé qu'à la fin du mois d'avril, le prix moyen hors taxes était de 84 centimes dans la zone européenne, soit identique à celui observé avant le mois de février 2022. Or la France se démarque par un prix moyen hors taxes de 93 centimes, soit une hausse de 16 % par rapport aux prix d'avant-guerre. Cherchez l'erreur !
Cherchez l'erreur lorsque les Français, confrontés à la hausse des prix, sont obligés de jongler, de faire des choix, de se priver. Préoccupation quotidienne des Français, cette hausse des prix se traduit par un net tour de vis sur les achats alimentaires – en baisse de 9 % – et des ruses incessantes pour limiter les frais de carburant à la pompe : certains roulent moins vite, d'autres évitent l'autoroute, d'autres encore recourent au covoiturage. Mais personne ne prend cela à la légère ni ne s'en amuse.
Toutefois, pour vous, l'urgence impérieuse et absolue est de rendre obligatoire la présence du drapeau européen sur les frontons des mairies, faisant fi, une nouvelle fois, de votre énième promesse de mieux et davantage travailler avec les élus locaux. Ce texte n'est qu'une mesurette idéologique, un bavardage inutile. Pis, il est contreproductif. Sous prétexte de vouloir unifier les pratiques, vous imposez de nouvelles contraintes qui, pour la plupart, sont déjà inscrites dans l'usage et la tradition républicaine. Vous le savez très bien, la plupart des communes, comme chez moi, à Béziers, ou dans ma circonscription, pavoisent déjà le fronton de leur hôtel de ville avec le drapeau européen.