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Intervention de Pierre Pezziardi

Réunion du jeudi 6 avril 2023 à 14h30
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Pierre Pezziardi, entrepreneur et ancien responsable de la plateforme Le :

C'est le cheminement habituel des start-up d'État que d'être incubée dans une structure d'innovation pour être ensuite reprises par le ministère compétent et, si elles fonctionnent, devenir un service public national.

La genèse de la start-up est à chercher dans la loi du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur (VTC). Son article 1er a instauré un registre national recensant les informations relatives à l'identification, à la disponibilité et à la géolocalisation des taxis auquel a été donné le nom « Le.taxi ». Grâce à ce registre, auquel l'inscription n'était pas obligatoire, les chauffeurs pouvaient se lancer dans la maraude électronique – la maraude traditionnelle permet au chauffeur de taxi qui affiche son luminaire de pouvoir prendre un client n'importe où –, dans laquelle Uber avait acquis une position dominante sans laisser beaucoup de place aux taxis. La loi visait donc à rééquilibrer le rapport de force entre les VTC, qui avaient conquis l'espace numérique et les taxis, qui en étaient largement absents, à l'exception des grandes centrales qui avaient développé des applications.

La start-up d'État créée à l'époque comptait trois personnes. Dans une telle structure, les ingénieurs représentent l'essentiel des dépenses, une part infime étant dédiée à la machinerie – serveurs et stockage. Une équipe aussi resserrée peut affronter les incertitudes dans la mise en œuvre de la loi : la fragmentation du marché des taxis ; le rôle des centrales ; la réticence au numérique.

Le dispositif de la start-up d'État a également été utilisé pour faire naître le « pass culture », « La bonne boîte » pour Pôle emploi, « démarches-simplifiées.fr », « pix », ou encore « mes-aides.gouv.fr » pour lutter contre le non-recours aux aides publiques.

Dans le cas de Le.taxi, l'innovation devait permettre, en fédérant l'offre de taxis disponibles, de diffuser sur une myriade d'applications mobiles un bouton « Y aller en taxi » – je sors mon téléphone, je commande un taxi, il arrive là où je me trouve. Pour offrir une manne aux taxis, fallait-il développer une application « France Mobilité » capable de conquérir une clientèle et de rivaliser avec les applications grand public ou une plateforme – un registre permettant à d'autres applications qui ont déjà leur clientèle telles que les applications de mobilité Apple maps ou Google maps de le faire ?

La start-up d'État transport.data.gouv a eu recours à la stratégie de plateforme pour redonner de la visibilité aux transports publics. Grâce à elle, Google maps vous propose un itinéraire en bus – ce n'est pas rien. L'effet de levier d'une telle stratégie est considérable.

Le choix de la stratégie était fléché puisque la loi crée un registre sur lequel les taxis s'inscrivent de manière volontaire pour bénéficier d'une visibilité sur les applications de mobilité. Ces dernières ne sont pas le seul fait des Gafam et les collectivités essaient également, non sans mal, d'en développer.

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