Intervention de Nicolas Louvet

Réunion du jeudi 6 avril 2023 à 14h30
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Nicolas Louvet, fondateur et directeur de 6t-bureau de recherche dans le secteur de la mobilité :

Je ne suis ni un économiste ni un spécialiste du droit du travail. Le cabinet 6-t essaie de convaincre les acteurs qu'il approche de l'intérêt, pour eux, de comprendre pourquoi leurs services sont utilisés et d'avoir une idée des changements induits par ces derniers sur les territoires, ce qui n'est pas simple. En effet, les opérateurs de transport se considèrent comme des experts de la mobilité ; à cette aune, ils ne perçoivent parfois pas l'intérêt de l'approche proposée. En pratique, c'est notre cabinet qui a approché Uber, qui connaissait nos précédentes études puisqu'elles avaient été rendues publiques.

À titre d'exemple, les trottinettes électriques en libre-service sont appelées à disparaître à Paris. Plus globalement, les nouveaux opérateurs de transport se positionnent souvent sur le marché qu'ils ciblent avec une offre. Ils essaient rarement de répondre à une demande, essayant plutôt de la créer, voire, au pire, de la « forcer ». En l'occurrence, les Parisiens avaient-ils réellement besoin de trottinettes électriques pour se déplacer ? Non. C'est la mise à disposition de ces dernières qui a suscité le besoin. Lorsque les opérateurs de transport passent par nous, c'est pour comprendre pourquoi leurs services sont utilisés : en effet, ils ne le savent pas toujours, même lorsque le succès est au rendez-vous.

Dans le cas qui nous occupe aujourd'hui, nous nous demandions si l'émergence d'Uber allait dans le sens d'une politique de réduction de la place de la voiture en ville et du financement des transports publics, en cannibalisant ces derniers. Les usagers, au moment de l'étude, saluaient la possibilité de recourir à des chauffeurs de berlines plutôt qu'à des chauffeurs de taxi désagréables.

En France, nombreux sont ceux qui ont découvert les voitures avec chauffeurs par le truchement des plateformes numériques. Aujourd'hui, ils se tournent, pour beaucoup, vers les taxis. En effet, l'offre proposée par les VTC s'est dégradée au fil du temps quand celle des taxis s'est améliorée. En tout état de cause, la qualité du service délivré aux usagers s'est améliorée au fil du temps.

Le vrai sujet est aujourd'hui celui des livreurs de repas. Alors qu'ils sont de plus en plus nombreux, ni leurs profils, ni le nombre de trajets qu'ils réalisent ne sont connus. Or il semble, selon certaines rumeurs, qu'Uber Eats génère désormais, dans le monde, davantage de trajets qu'Uber VTC. Cela constitue donc un véritable enjeu qui doit être encadré. Ainsi, en quatre ans, le poids des livreurs d'Uber Eats, qui ne sont pas nécessairement déclarés, a beaucoup progressé.

Enfin, ces activités posent des questions de mobilité, lesdits livreurs pouvant utiliser des Vélib' ou des Véligo, dont ce n'est pas la vocation, voire des voitures, ce qui alimente le trafic. De fait, votre commission devrait se pencher sur le phénomène des livraisons de repas.

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