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Intervention de Raphaël Glucksmann

Réunion du mardi 4 avril 2023 à 18h00
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Raphaël Glucksmann, président de la commission spéciale INGE 2 :

Comme toujours dans de tels cas, les chiffres sont très difficiles à vérifier. En l'occurrence, ils nous ont été donnés par des enquêteurs journalistiques et des think tanks, qui avaient tenté une estimation et publié quelques articles dans le New York Times.

Le dernier considérant que vous avez cité fait référence à un phénomène que nous avons rencontré à de multiples reprises au cours de nos travaux. Avant même la chute de l'URSS, la Russie a connu une fuite massive de capitaux, d'ailleurs orchestrée par le KGB lui-même. Le directeur de la banque centrale russe a estimé que, lors de la seule année 2012, plusieurs dizaines de milliards de dollars avaient fui le pays – je vous cite ce chiffre de tête, mais je pourrai le vérifier et vous envoyer la traduction de l'interview à laquelle je me réfère – et que c'étaient les mêmes structures, contrôlées par un nombre très limité de personnes, qui avaient la main sur l'utilisation de ces fonds obscurs. Il s'est bien gardé d'aller plus loin dans les révélations, puisque l'un des vice-directeurs de la banque centrale avait été abattu en pleine rue, quelques années plus tôt, pour avoir dénoncé le même phénomène. On estime donc que, pendant toutes ces années, des centaines de milliards de dollars ont fui la Russie. C'est ainsi que de l'argent très difficilement traçable peut être consacré à des opérations d'ingérence.

Le régime russe n'est pas le seul à se livrer à de telles pratiques. Tous ceux qui agissent ainsi profitent des structures opaques du capitalisme et de la finance internationale : on retrouve très souvent leur trace lorsque des révélations sont faites sur les paradis fiscaux. C'est ce qui explique toute la difficulté à déterminer la provenance des fonds et des donations que j'évoquais à propos du Brexit. Aussi la lutte contre les paradis fiscaux n'est-elle pas qu'une question de justice fiscale ou sociale ; elle vise aussi à réduire les menaces contre notre souveraineté. Si nous n'arrivons plus à tracer l'origine des fonds, comment pourrons-nous nous protéger contre l'investissement de cet argent – malin ou bénin, c'est ensuite qu'il sera possible de le déterminer – dans nos structures ? Les institutions européennes s'interrogent donc sur la manière de lutter contre l'utilisation des capitaux sortis de ces pays, dont on ne parvient pas à déterminer la destination.

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