En lien avec la question concernant les carburants et le caractère justifié ou non des marges, je vais indiquer plusieurs points. Nous sommes effectivement dans un système semi-administré où les marges sont fixées par le préfet, dans le cadre d'un arrêté réglementaire. De ce point de vue, nous ne pouvons pas dire que les acteurs économiques soient libres de la fixation de leurs marges. Pour analyser la justification de la hauteur de leurs marges, il faudrait pouvoir avoir la capacité d'analyser de manière suffisamment fine la situation pour savoir si ces marges qui sont fixées de manière administrative correspondent effectivement à la réalité des coûts, et si elles ne sont pas trop élevées. En tout état de cause, une première analyse que l'on peut faire est que, vu les chiffres communiqués chaque année sur la profitabilité globale du secteur, manifestement ces marges sont suffisantes.
Une problématique se pose, en revanche, au niveau des gérants de stations-service en location-gérance – 110 sur 160 – appartenant à des pétroliers. Ces gérants sollicitent régulièrement le préfet pour réévaluer leurs marges, parce qu'ils estiment qu'ils ne s'en sortent pas. C'est dans ce sens-là que l'analyse que nous devons réaliser doit être un peu plus poussée, pour savoir comment cela s'organise. Nous avons des éléments par le biais des redevances qui sont perçues par les pétroliers, car nous pouvons connaître les marges qui sont destinées au fonctionnement de l'activité de détail et « ponctionnées » par les pétroliers.
Au niveau du modèle prévu par rapport à ce que nous pouvons trouver dans l'Hexagone, les textes prévoient ces marges parce qu'il y a les emplois des pompistes. Toutefois, nous ne sommes pas en capacité, sur le plan d'une comptabilité analytique, de connaître la réalité du niveau de ces marges par rapport à ces emplois dans ces entreprises.
Sur l'aspect lié à la concurrence, le système fixe un prix plafond. L'ensemble des stations-service s'alignent sur ce prix plafond. On peut comprendre que des stations ont la nécessité d'avoir ce prix plafond. Cependant, d'autres stations bénéficient d'un effet d'aubaine en appliquant ce prix plafond alors qu'elles pourraient avoir un prix moindre.
Au niveau des taxes, nous entendons très souvent dire que les prix à La Réunion sont globalement inférieurs. Notamment, nous avons vu, lors de la crise, ce qui se passe en métropole. Cependant, il faut bien comprendre que, si ces prix sont inférieurs, ce n'est pas à cause des marges qui sont inférieures, mais c'est en raison de la fiscalité, qui, bien qu'étant importante, est moindre dans nos territoires que dans l'Hexagone.
Concernant la grande distribution, le rapport a pu mettre en avant, par rapport au duopole, un pouvoir de marché supplémentaire qui se retrouvait entre les mains du groupe ayant acheté les magasins Vindémia (groupe Casino). Au-delà de l'aspect que ce duopole détenait deux tiers du marché de la grande distribution, cet acteur, tout seul, du fait de sa présence sur d'autres secteurs d'activité, détenait un pouvoir de marché qui allait bien au-delà de la grande distribution. Cet acteur, à savoir le Groupe Bernard Hayot (GBH), est présent dans la production, par exemple, de yaourts et de lait. Il a acquis des portefeuilles de marques.
Sur ce point, la loi interdit les exclusivités mais, de fait, ces exclusivités perdurent, pour des raisons économiques notamment. Or l'acteur en question a acquis Supercash, qui devient le grossiste des petits commerces. Cet acteur intervient aussi sur d'autres secteurs, qui n'ont rien à voir avec la grande distribution ; ainsi, cet acteur détient le portefeuille des marques Renault, Volkswagen, Audi et Mercedes, mais il est aussi présent sur le commerce des pneus et des pièces détachées, des articles de bricolage et de sport (Décathlon).
Ces éléments ont été mis en avant dans le rapport réalisé par le cabinet en question, et ils démontraient que la concentration au niveau des produits alimentaires donnait un pouvoir de marché considérable à cet acteur, avec ce pouvoir sur les fournisseurs et aussi sur la production locale.
Une des propositions contenues dans le rapport était de limiter les parts de marchés dans la grande distribution à 25 %.
Une autre proposition consistait à faire une pause sur l'autorisation de création de grandes surfaces dépassant 1 500 mètres carrés, par exemple.
Une troisième consistait à rendre incompatible la présence d'un même acteur en amont et en aval de cette distribution.