Intervention de Johnny Hajjar

Réunion du vendredi 24 mars 2023 à 14h00
Commission d'enquête sur le coût de la vie dans les collectivités territoriales régies par les articles 73 et 74 de la constitution

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJohnny Hajjar, rapporteur :

Ce qui se passe est un cas d'école. Vous parlez d'indices : très honnêtement, je pense que tous les indices existent, il suffit d'aller les chercher. La DGCCRF doit avoir des informations et vous avez le pouvoir de les récupérer. Les investigations ont-elles été suffisamment poussées pour que vous puissiez vous faire votre propre idée ?

Selon l'article L. 752-27 du code de commerce, l'Autorité de la concurrence peut, en outre-mer, utiliser l'outil d'injonction structurelle en cas de position dominante, c'est-à-dire même s'il n'y a pas d'abus avéré. Ainsi, vous avez le pouvoir d'aller chercher non pas des indices mais des preuves, sans attendre la caractérisation de l'abus. Pourquoi cela n'a-t-il pas été fait, sachant qu'on est aujourd'hui en 2023 ? Le projet de cession aurait dû vous inciter à enquêter sur ces entreprises et à utiliser votre pouvoir d'injonction.

Par ailleurs, l'article L. 420-2-1 du code de commerce interdit, en outre-mer, « les accords ou pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d'accorder des droits exclusifs d'importation à une entreprise ou à un groupe d'entreprises ». Cela concerne la concentration verticale, dont nous sommes témoins parce que nous vivons sur le terrain. La proximité est importante en la matière, raison pour laquelle j'ai du mal à comprendre pourquoi la DGCCRF semble ne pas voir ce que tout le monde voit. Il faudra du reste auditionner les DGCCRF des territoires concernés.

Il vous manque aussi de la crédibilité en tant qu'Autorité de la concurrence – je parle de la structure, et non des personnes, que je respecte : vous êtes des fonctionnaires, vous avez été nommés, et vous avez une expertise. C'est l'Autorité de la concurrence en tant que telle qui est défaillante. Cela se voit au niveau de la consolidation des concentrations et des monopoles et au niveau de l'absence de coordination entre les instances. Nous avons parlé des billets d'avion : une intervention a été déclenchée dans ce domaine, mais il faut aller beaucoup plus loin, à mon avis. Le problème ne concerne pas que trois opérateurs, il est structurel.

Si vous manquez de moyens humains, parce qu'il y a beaucoup de questions à traiter – le transport aérien, la grande distribution, les matériaux, les télécommunications, l'habitat et le logement, tous les secteurs en fait, car même internet est 30 % plus cher, alors qu'on ne voit pas quelles raisons logistiques pourraient l'expliquer –, dites-le nous. Il faut qu'on le sache clairement.

J'ai évoqué deux outils dont vous disposez pour agir concrètement. Votre inaction, ou peut-être l'absence de résultats de votre action, car celle-ci existe certainement, ou la déperdition d'énergie qui se produit ont pour résultat qu'on a le sentiment que soit vous gardez les yeux fermés, soit vous ne prenez pas les initiatives qui vous sont permises, en tant qu'Autorité de la concurrence, pour aller chercher les faits dans des documents justificatifs qu'il faudrait aller récupérer au sein des entreprises en question.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion