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Intervention de Sébastien Lecornu

Réunion du mercredi 15 mars 2023 à 17h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Sébastien Lecornu, ministre :

À mon tour, je remercie M. Cubertafon d'avoir soutenu ce projet. Que les élus locaux de Dordogne et les acteurs industriels soient également remerciés car la relocalisation suppose un territoire volontaire et résilient pour accueillir, en l'espèce, des activités dangereuses. J'ai une pensée particulière pour la victime de l'explosion dans une usine Nexter à Bourges.

Dans le domaine de la santé, le soutien à l'Ukraine prend plusieurs formes : la prise en charge de blessés – une dizaine sont soignés dans les hôpitaux militaires français pour des pathologies lourdes – ; la formation. Monsieur Rancoule, l'opération Barkhane nous a malheureusement fourni des retours d'expérience dont nous pouvons faire profiter les Ukrainiens.

Je suis préoccupé par les difficultés auxquelles pourrait être confronté le service de santé des armées (SSA) en cas de concomitance de plusieurs crises – un engagement militaire majeur, une pandémie et un attentat de masse. Mais sur chacune d'elles, je salue l'engagement remarquable du SSA.

Enfin, nous avons cédé pour un demi-million d'euros de matériel médical aux Ukrainiens.

En ce qui concerne la défense sol-air, la future loi de programmation militaire devrait y consacrer près de 5 milliards d'euros. Le recomplètement pour les missiles Crotale et VL Mica a été acté ; des réunions du comité ministériel d'investissement doivent encore se tenir et la programmation budgétaire correspondante sera évidemment soumise au Parlement.

Monsieur Naegelen, je suis à votre disposition, tout comme les services du ministère, pour répondre aux questions de la mission. Certaines ont trait à l'économie de guerre. Quelle visibilité donne-t-on aux entreprises pour relever le défi ? Depuis les années soixante, le modèle français repose sur le lien étroit entre la BITD et l'armée. La BITD n'a donc pas d'autre choix que de suivre.

Après vingt ans de lutte contre le terrorisme au cours desquels les mêmes armes ont été utilisées, et à la lumière de guerre en Ukraine, une réflexion s'impose sur l'attrition, sur le ratio entre la rusticité et la technologie ainsi que sur la soutenabilité économique. Il ne faut pas négliger le risque pour l'entreprise, raison pour laquelle l'État lui doit de la visibilité ainsi de l'accompagnement à l'export, lequel assure l'équilibre de notre modèle d'armement.

Nous devons tous faire de la pédagogie sur les conditions de l'autonomie stratégique dont l'Ukraine mais aussi le covid ont révélé la nécessité. Ce sont les difficultés rencontrées pendant la pandémie dans la gestion les stocks stratégiques et dans les chaînes logistiques qui justifient aujourd'hui les efforts de relocalisation que je mène. La sécurisation des chaînes logistiques est un enjeu majeur.

S'agissant des canons Caesar, il faudra bientôt dix-huit mois au lieu de plus de trois ans pour les construire. Hommage doit être rendu aux équipes de Nexter pour cet effort spectaculaire grâce auquel entre novembre 2023 et mars 2024, trente nouveaux Caesar seront livrés à l'armée française. Ce qui est vrai pour un canon Caesar ne le sera pas forcément pour les munitions. Il faut considérer les différentes typologies d'armement et adapter les stratégies pour accélérer la production.

L'agilité et la vitesse sont aussi la clé de notre réussite à l'export. Les clients étrangers feront de plus en plus de la réactivité et de la maîtrise du calendrier ainsi que du prix une des conditions d'achat. Pourquoi les Polonais achètent-ils aux Coréens et non aux Américains ? Parce que l'industrie américaine livre trop lentement. Il faut prendre conscience de cet élément décisif pour la compétitivité de notre pays.

Il n'y aura pas de loi de programmation militaire réussie si l'industrie n'accompagne pas le mouvement des armées. J'aurais besoin de vous pour gagner ce qui est aussi un combat culturel. La culture n'est pas la même dans les grandes entreprises ou les PME, dans les anciens arsenaux ou les entreprises qui ont toujours été à capitaux privés. J'appelle aussi la finance à faire preuve de patriotisme. La plupart des PME peinent aujourd'hui à lever des fonds parce que l'armement, c'est « sale ». Pourtant l'autonomie stratégique pour défendre nos valeurs est tout aussi fondamentale que la transition écologique.

La professionnalisation et l'évolution de la doctrine d'emploi des réserves sont des enjeux clé pas seulement en cas de conflit de haute intensité mais aussi en cas de pandémie ou de crises climatiques, en particulier dans les territoires d'outre-mer où les militaires sont souvent les premiers à intervenir, mais on l'a vu aussi lors des incendies de l'été dernier en métropole. Elles ne sont pas sans lien avec le SNU à terme puisque plus on éveille à l'engagement, plus on a envie d'être utile à son pays.

Monsieur Blanchet, le Parlement doit s'emparer du sujet de l'information. Une démocratie ne l'abordera évidemment pas de la même manière qu'un pays autoritaire. J'enfonce là une porte ouverte mais je suis étonné que l'on n'en parle pas davantage sous cet angle. Dans une démocratie, il existe un droit de la presse et on ne met pas sur le même plan communication et information. Une démocratie peut-elle faire la même chose qu'un pays autoritaire en matière de désinformation ? La réponse est non. Se protéger d'une campagne de désinformation, ce n'est pas la même chose que de la mener soi-même. Autant de questions – certaines d'entre elles se heurteront au secret – qui mériteraient d'être traitées par le Parlement d'autant qu'elles ne le sont guère au niveau européen ou au sein de l'Otan.

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