Si l'on veut être rigoureux, on ne peut pas comparer notre situation à celle de l'Ukraine. La France est une puissance dotée, membre de l'Otan. La sensibilité politique que vous représentez conteste cette alliance militaire. C'est votre droit le plus strict.
En tout cas, il est clair que l'appartenance à l'Otan change les choses, de même que le fait d'être situé à l'ouest de l'Europe. Si l'on devait comparer notre modèle d'armée avec celui d'autre pays, ce ne serait ni avec l'Espagne ou même l'Allemagne, mais bien avec la Grande-Bretagne – qui est une puissance dotée, maritime et qui fait partie d'une alliance politique, le Commonwealth. Nous avons encore des territoires outre-mer – vous avez cité la Nouvelle-Calédonie.
Notre modèle est bien français, et il ne faut pas chercher à faire des comparaisons internationales. En revanche, on peut se pencher sur son évolution. Ce modèle d'armée nous permet-il de remporter toutes les batailles ? La réponse est non.
C'est la raison pour laquelle la prochaine LPM vise à s'adapter aux nouveaux champs de conflictualité : l'espace – dont la militarisation progresse à grande vitesse –, les fonds marins, le cyberespace et les objets civils détournés à des fins militaires.
Il faut s'interroger sur les véritables menaces qui pèsent sur la nation et déterminer en fonction de celles-ci le modèle d'armée, les financements, les ressources humaines et la préparation du corps social pour s'assurer d'une résilience globale.
Je peste souvent contre les comparaisons avec la situation de l'Ukraine, car elles reviennent à estimer que tous les efforts consentis par le gaullisme dans les années 1960 pour se doter de la dissuasion nucléaire n'ont servi à rien. Il est nécessaire que les parlementaires, les ministres, les think tanks et les élites expliquent de nouveau ce que représente le fait d'être une puissance nucléaire, par exemple pour défendre ses intérêts vitaux.