Je comprends votre question, à laquelle j'ai déjà répondu dans d'autres instances. Pourquoi avons-nous fait ce site ? En 2016, la photo du jeune Aylan, cet enfant syrien de trois ans retrouvé sans vie sur une plage turque, avait bouleversé le monde. À cette époque, de nombreuses femmes et des enfants se noyaient dans la Méditerranée, qui devenait une forme de cimetière. Nous savions que ces gens étaient manipulés par des passeurs sans scrupule, qui les saignaient à blanc en termes de financement. Nous savions également que l'esclavage sexuel existait en Libye.
J'en ai parlé avec mes collègues de la Deutsche Welle et de l'Agenzia nationale Stampa Assiociata (ANSA) en Italie, qui constataient avec moi que les infox étaient monnaie courante. Nous nous sommes dit que nous devions délivrer une information professionnelle digne de ce nom pour évoquer les risques et les difficultés de l'arrivée et les différences de repères civilisationnels. Nous voulions également souligner le principe de l'égalité entre hommes et femmes dans nos sociétés occidentales.
Nous nous sommes donc demandé s'il ne fallait pas dédier une information professionnelle à ces migrants, pour éviter un certain nombre de manipulations. Nous avons abordé cette question avec la Commission européenne, qui a trouvé l'idée excellente et nous a financé l'intégralité du projet, via sa direction générale de la migration et des affaires intérieures (DG Home). Le financement s'élève à 2,7 millions d'euros par an désormais. Le site, initialement rédigé en français, anglais et arabe, s'est ensuite élargi au pachtoune, au dari et au bengali.
Nous avons construit cet outil pour essayer d'effectuer proprement notre travail d'information. Lorsque nous avons lancé le site, le pape François a d'ailleurs salué cette initiative, qu'il a qualifiée d'humaniste et qui permettait d'épargner des vies. En revanche, nous ne dissuadons ni ne promouvons l'immigration. Nous empêchons que des gens déjà en situation de fragilité ne soient manipulés par des fake news.