Je suis Kevin. Je suis un jeune Réunionnais, né dans une famille modeste des hauteurs de Saint-Paul. J'ai suivi un parcours d'excellence afin de devenir ingénieur en aéronautique sur le territoire métropolitain mais, animé par une volonté de contribuer à l'émancipation des miens, je suis retourné à La Réunion pour devenir maître de conférences. J'aurais pu être un produit exemplaire de la réussite à la française, mais sur la route de l'égalité des chances et de la méritocratie, je me suis heurté au copinage et à la cooptation qui règnent au sein des jurys de sélection des universités. De ce fait, mon espoir de devenir maître de conférences à l'université de La Réunion est avorté.
Je suis Kevin, mais je ne suis pas un cas isolé puisque dans un article du 9 juin 2022, le journal Le Monde mettait déjà en lumière cette pratique de recrutement inacceptable : celle des « postes à moustache ». Derrière cette appellation un brin humoristique se cache une réalité bien moins drôle, celle des fiches de poste taillées sur mesure pour correspondre à des profils choisis d'avance, au détriment de l'égalité des chances. Le tribunal administratif de Lille a déjà annulé en 2020 le recrutement d'un professeur de Sciences Po Lille qui a bénéficié de cette pratique. Dans un territoire comme le mien, à La Réunion, où les laboratoires de recherche sont plus rares, la collusion est plus grande. De fait, nos chercheurs deviennent des chercheurs d'emploi et sont contraints à l'exil.
Madame la ministre, je vous sais attachée au principe d'égalité des chances. Pouvez-vous nous présenter le plan d'action de votre ministère pour que ce genre de situation ne se reproduise plus et pour assurer une équité de traitement entre les candidatures ? Je suis convaincu en effet que l'indépendance et le bon fonctionnement de nos laboratoires de recherche sont une ambition que vous poursuivez.