Intervention de Cyrielle Chatelain

Séance en hémicycle du mardi 2 mai 2023 à 15h00
Bilan de la loi de programmation militaire 2019-2025

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCyrielle Chatelain :

La LPM nous a été présentée comme une loi de réparation : le budget de la défense aurait été sacrifié sur l'autel des dividendes de la paix. Il est dommage que l'on présente les choses ainsi et que l'on semble regretter les avancées de la paix dans le monde. Je ne nie pas les défis géopolitiques que nous devons relever, mais les efforts massifs de désarmement du monde qui ont suivi la fin de la guerre froide ont été un progrès et non un sacrifice. La professionnalisation des armées et la fin du service militaire obligatoire, décidées par le président Chirac – qui ont d'ailleurs permis de réduire les dépenses de défense –, n'étaient pas un sacrifice, mais une avancée.

Le premier bilan de la LPM actuelle fait état d'une très forte augmentation – 44 % – des crédits de paiement consacrés à la dissuasion nucléaire : leur montant est passé de 3,2 milliards d'euros en 2018 à plus de 4,6 milliards en 2023 – ces crédits s'entendent indépendamment des crédits d'équipements conventionnels qui participent à la mission permanente de dissuasion. Sans aborder la question de la pertinence de la doctrine de dissuasion nucléaire, on peut s'interroger sur la compatibilité de cette forte augmentation avec les engagements de la France en faveur du désarmement, notamment avec le principe de stricte suffisance, la France s'étant, rappelons-le, engagée à maintenir son arsenal nucléaire au niveau le plus bas possible compatible avec le contexte stratégique.

Par ailleurs, je regrette que ce bilan ne comporte pas de données relatives à la féminisation de nos armées. Des dépenses spécifiques sont-elles prévues pour permettre aux femmes de remplir leurs missions, de disposer d'équipements et de locaux adaptés ? De même, alors que, je le sais, nos armées sont de plus en plus conscientes de l'impact du dérèglement climatique, d'une part, parce qu'il peut être à l'origine de déstabilisations géostratégiques ou de défis d'intervention, d'autre part, parce qu'il leur revient de diminuer l'empreinte carbone de la défense – aucun secteur ne devant être exempté d'efforts dans ce domaine –, ces thématiques ne font l'objet d'aucune réflexion concrète dans ce rapport.

Or, il faut prendre à bras-le-corps, y compris dans le cadre de la politique de défense, la question de l'adaptation au changement climatique. C'est pourquoi je m'étonne que les rapporteurs proposent d'alléger les normes environnementales issues du secteur civil pour les infrastructures de défense militaire. Encore une fois, ces normes, qui visent à préserver notre biodiversité, doivent s'appliquer à toutes et à tous, y compris aux infrastructures de défense.

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