En 2020, la préfecture de La Réunion a recensé plus de 73 000 chiens de rue, dont 42 000 errants et 31 000 divagants. Ils font partie des 80 000 animaux abandonnés chaque année en France. Selon la direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (Daaf), 80 % de ces animaux sont abandonnés au moment de départs en vacances, spécialement vers l'Hexagone.
Alors même que notre continuité territoriale est mise à mal, voilà qu'Air France, société dans laquelle l'État investit massivement, a décidé d'établir une nouvelle tarification pour le transport des animaux de compagnie : 200 euros contre 75 euros auparavant pour un voyage en soute et 125 euros contre 55 euros en cabine. Lorsque les associations et les clients interrogent la compagnie à ce sujet, sa réponse est la suivante : les autres compagnies internationales pratiquent des prix plus élevés et nous appliquons aux outre-mer les mêmes tarifs que pour les vols vers l'Afrique du Nord et l'Europe. Notre appartenance à la communauté nationale se fait-elle donc au gré des intérêts capitalistes des grandes entreprises ?
Cette augmentation de prix aura un impact désastreux, d'autant qu'elle a fait des émules : d'autres compagnies vont l'appliquer. Les associations qui jouent un rôle majeur dans la lutte contre l'errance en envoyant des animaux par avion en vue d'une adoption dans l'Hexagone pour désengorger notre île vont être mises en difficulté. Ce seront autant d'animaux en plus qui erreront sur nos routes et dans nos villes.
Monsieur le ministre délégué chargé des outre-mer, mettre à mal le portefeuille des familles et des associations, c'est aggraver la situation sociale et sanitaire déjà tendue sur l'île. « J'entendais mes poules crier, je suis sorti et j'ai vu les chiens leur courir après, ils en avaient déjà tué une dizaine » témoignait un éleveur local après une attaque survenue en avril dernier. Au mois d'avril, une dizaine d'animaux ont été tués, en février, une douzaine et au cours de l'année précédente, une centaine dans une seule et même exploitation. En l'espace d'une semaine, un agriculteur de l'ouest de l'île a perdu cinq cabris nains destinés à sa ferme pédagogique et une quinzaine d'oies. Au choc moral – car il aime ses animaux – s'ajoute pour lui une perte financière de 4 000 euros.
Les chiens livrés à eux-mêmes forment des meutes pour survivre et finissent par entrer chez les particuliers et s'en prendre aux exploitations agricoles pour se nourrir. Les collectivités et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) investissent déjà beaucoup pour lutter contre ce phénomène mais les obstacles sont nombreux : fourrières non adaptées aux besoins de l'île, manque de sensibilisation à l'échelle du territoire tout entier, pénurie de moyens pour les personnels de la police municipale. Il n'existe, par exemple, que quatorze capteurs d'animaux errants dans mon intercommunalité du Territoire de la côte ouest (TCO) qui couvre une superficie de 53 000 hectares. Le manque de moyens est réel.
Cette situation appelle une intervention claire de la part du Gouvernement. Il s'agit d'un enjeu majeur de santé publique, d'un enjeu majeur pour le bien-être animal, d'un enjeu majeur pour notre île.
Monsieur le ministre délégué, que peut faire le Gouvernement face à cette augmentation injuste des tarifs qui va à l'encontre du principe de continuité territoriale ? Quelles mesures est-il prêt à prendre pour endiguer une bonne fois pour toutes le problème de l'errance animale dans notre île ?