Intervention de Didier Martin

Réunion du mercredi 29 mars 2023 à 9h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDidier Martin, rapporteur de la mission d'évaluation :

Je répondrai tout d'abord à Charlotte Parmentier-Lecocq en précisant que la loi est globalement méconnue du public mais aussi des soignants, hormis ceux qui travaillent dans les services de réanimation, en gériatrie ou en USP. Bien que la formation des aides-soignants, des infirmiers et des médecins inclue des modules de soins palliatifs, il est nécessaire d'améliorer l'information des personnels soignants concernant leurs droits mais aussi leurs obligations, notamment celle de soulager les douleurs. En effet, certains soignants seront amenés un jour à prendre des décisions sur la fin de vie, en particulier dans le cadre de la discussion collégiale.

Ensuite, la sédation profonde et continue maintenue jusqu'au décès n'est pas mal appliquée. Il faut néanmoins rappeler que notre capacité d'analyse en la matière est limitée puisque les résultats des décisions collégiales sont consignés dans les dossiers médicaux, auxquels nous ne pouvons pas accéder.

Sandrine Dogor-Such et d'autres commissaires ont évoqué les sujets financiers. Il est important de comprendre qu'en matière de soins palliatifs, les moyens humains sont cruciaux. En effet, il s'agit d'une médecine au chevet des patients, à qui il faut consacrer du temps pour les écouter, recueillir leurs volontés, s'assurer de leur bien-être et de leur confort afin de proposer des solutions adaptées. Cette médecine, moins performante en termes de progrès techniques, repose sur l'accompagnement et le service. Elle s'oppose au temps rapide et à la tarification à l'acte telle que la T2A l'a mise en place. C'est la raison pour laquelle nous proposons d'adapter cette T2A et de tracer, dans les budgets hospitaliers, les moyens financiers dédiés au niveau national aux soins palliatifs afin qu'ils soient bel et bien affectés aux USP.

À Thibault Bazin, je répète que la loi Claeys-Leonetti a été conçue pour ceux qui vont mourir dans les jours à venir et dont la souffrance ne peut être apaisée alors que leur maladie est incurable. La question de l'aide active à mourir se posera pour ceux qui veulent mourir, ceux pour lesquels le pronostic va au-delà de quelques jours. Je rappelle que certains pays nous envient le trésor national qu'est cette loi, y compris ceux ayant mis en place l'euthanasie.

Je souligne l'importance d'une culture palliative, qui doit intervenir en amont au moment de la prise en charge des maladies. Ce n'est pas lorsque l'on arrive à la fin du traitement que l'on passe le relais aux soins palliatifs. Par ailleurs, les lacunes de l'offre des soins palliatifs dans de nombreux territoires sont en contradiction avec les premières lignes de l'article 1er de la loi. Nous devons nous attacher à couvrir l'ensemble du territoire.

Frédéric Valletoux a évoqué avec justesse la question de l'évaluation. Lorsque la loi initiale ne prévoit pas d'indicateurs précis, il est difficile de procéder ensuite. Si nous voulons évaluer le rapport entre l'offre et la demande, il faut intégrer ces indicateurs dans la loi ou dans des décrets. Comme le président Olivier Falorni l'a souligné dans son intervention liminaire, aucune évaluation n'était intervenue sept ans après la promulgation de la loi alors même que son article 14 prévoyait un rapport annuel.

De notre côté, nous avons été raisonnables : nous avons considéré un rapport tous les deux ans suffisant. Mais ce travail doit impérativement être fait. De plus, il importe de déterminer les indicateurs retenus. L'Inspection générale des affaires sociales (Igas) avait émis des recommandations en ce sens, que nous pourrions étudier. Par ailleurs, les questions financières et la notion d'égalité territoriale sont essentielles.

Enfin, certains ont évoqué l'accompagnement éthique face à la mort. Mais nous ne sommes pas là pour parler de la mort dans sa dimension métaphysique. En revanche, il faut parler de la vie, en soins palliatifs ou dans nos travaux de législateurs. Je pense que l'entrée en soins palliatifs peut être abordée comme une nouvelle étape de la vie, quand bien même il s'agit de la dernière.

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