Comme M. Guedj, je monte à cette tribune accompagné : je commencerai mon propos en vous parlant de ma mère. À 90 ans, elle fait partie de ces personnes âgées dont l'esprit reste vif, mais dont les jambes ne suivent plus. Malgré cela, elle vit chez elle et refuse d'entrer dans un Ehpad. Elle bénéficie de l'assistance personnalisée et adaptée de professionnels à domicile, qui, en l'aidant notamment pour le ménage, la toilette et le portage des repas, lui permettent de rester dans sa maison, grâce aux travaux d'adaptation qui y ont été réalisés. Ces professionnels sont pour elle une bouffée d'air frais : c'est grâce à eux qu'elle conserve une certaine autonomie et peut continuer à vivre chez elle. La solidarité du voisinage joue également un rôle crucial pour les courses et la veille au quotidien.
Toutefois, le manque d'effectifs dans les structures d'accompagnement à domicile rend difficile la couverture des besoins en assistance, notamment le soir et le week-end. Malgré l'importance de ces métiers, il est difficile d'attirer suffisamment de professionnels qualifiés et formés. Ceux qui le sont dénoncent ainsi souvent des conditions de travail difficiles et un manque de reconnaissance.
L'exemple de ma mère est malheureusement courant : de nombreux Français sont confrontés à la prise en charge de leurs parents et grands-parents, quand d'autres en sont simplement témoins. Nous devons tous garder à l'esprit que le vieillissement ne signifie pas la fin de la vie : les personnes âgées ont encore des projets et des envies. Elles ont besoin d'un accompagnement adapté pour vieillir dignement. Les personnes âgées doivent rester des citoyens à part entière et demeurer actrices de leur vie.
Le nombre de personnes âgées de plus de 85 ans – âge moyen auquel survient la perte d'autonomie – passera de 1,4 million à près de 5 millions au cours des trente prochaines années. Bien que des avancées significatives aient été réalisées dernièrement, notamment avec la création de la cinquième branche, le renforcement du soutien à domicile et la reconnaissance des aidants, les professionnels et les usagers attendent des actions fortes pour assurer une meilleure lisibilité du système et pour permettre le virage domiciliaire plébiscité par plus de 85 % des Français. L'enjeu est bien entendu financier, mais aussi sanitaire et social.
La présente proposition de loi répond à plusieurs demandes exprimées par des milliers de professionnels ainsi que par des millions de personnes âgées sur le terrain. Elle s'appuie sur un débat nourri par différents travaux, y compris ceux menés par le Gouvernement dans le cadre du CNR « Bien vieillir » ces derniers mois. Les mesures proposées incluent la création d'une instance de pilotage nationale, pour faire de la perte d'autonomie une priorité de nos politiques publiques, ainsi que des dispositions visant à renforcer l'attractivité des métiers du domicile et des mesures de soutien aux professionnels, comme le déploiement de la carte professionnelle et un soutien financier à la mobilité. Le texte vise également à renforcer la lutte contre la maltraitance et à permettre un meilleur repérage des personnes vulnérables, par le biais de plusieurs mesures.
Bien que le texte ne puisse prétendre résoudre tous les problèmes liés à la politique du bien vieillir en France, il prévoit des mesures importantes et a été enrichi en commission, comme il le sera à nouveau au cours de son examen en séance. Les ajouts proposés incluent le déploiement sur tout le territoire d'équipes locales d'accompagnement sur les aides techniques, la sensibilisation généralisée à la perte d'autonomie et à l'adaptabilité des logements, ainsi que la création d'un service public territorial de l'autonomie, pour garantir une réponse complète et coordonnée à chaque demande.
Il sera crucial de s'attaquer concrètement à la gouvernance de l'écosystème du grand âge, tant ce dernier doit devenir plus simple, plus structuré et plus lisible, pour les acteurs comme pour les usagers. Enfin, les députés du groupe Horizons et apparentés saluent les deux rapporteures et, plus largement, la majorité présidentielle pour le travail accompli sur ces questions.
Nous soutiendrons cette proposition de loi parce qu'elle va dans le bon sens, parce qu'elle prévoit de nombreuses avancées pour nos aînés et les professionnels qui les accompagnent, et parce qu'elle n'est qu'un texte parmi d'autres, qui apporte son concours pour répondre à un enjeu crucial pour notre société et pour l'avenir.